Un Parlement quasi-vide valide le passe sanitaire jusqu’au 31 juillet 2022
Le Parlement a adopté le projet de loi de "vigilance sanitaire", qui permet notamment le recours au passe sanitaire jusqu’au 31 juillet 2022. Avec seulement 36% de députés présents, l'Assemblée nationale valide, donc, le texte au nom des deux chambres, malgré l'opposition du Sénat. L’intégralité du régime de "sortie de l'état d'urgence sanitaire", en vigueur depuis fin mai, est aussi prolongée jusqu'au 31 juillet. Le texte contient également une disposition qui autorise les directeurs d'écoles et les chefs d'établissements de collèges et lycées à connaître le statut vaccinal des élèves. Plusieurs parlementaires ont tenté en vain d’obtenir une abrogation sans délai du passe sanitaire tandis que d’autres ont mis en avant les propositions émises par le Sénat, mais en vain.P
1- Maintien du passe sanitaire jusqu’au 31 juillet
Le recours au passe sanitaire est permis par une loi adoptée en mai, qui ne l’autorise à l’origine que jusqu’au 15 novembre. Prolonger cette mesure est la principale raison d’être de ce nouveau projet de loi, qui permet d’imposer son utilisation jusqu’au 31 juillet 2022.
Les députés ont inscrit dans le projet de loi une série de critères devant justifier le recours au pass : taux de vaccination, le taux de positivité des tests de dépistage, taux de saturation des lits de réanimation… Mais ils n’ont pas fixé de seuils chiffrés.
Le gouvernement devra présenter au Parlement – au plus tard le 15 février 2022 – un rapport sur les mesures prises, leur impact sur les indicateurs sanitaires et les perspectives. Ce rapport-bilan pourra faire l’objet d’un débat en commission ou en séance publique, ce à quoi s’est engagé le gouvernement, sans satisfaire les oppositions
L’Assemblée nationale a, donc, voté l’ultime mouture du projet de loi de «vigilance sanitaire», conforment aux vœux du gouvernement.
2- Seulement 36% des députés présents
Le vote de l’Assemblée nationale, qui valide le texte au nom des deux chambres, après l’opposition du Sénat, a été acquis par 118 voix pour, 89 contre et une abstention.
L’assemblée comporte 577 députés élus et ce matin seulement 208 étaient présents, soit 67% d’absentéisme !
Plus les jours passent et moins les députés ne daignent se déplacer pour une loi qui constitue, tout de même, une limitation importante des droits et libertés constitutionnels.
L’absentéisme est un phénomène récurrent au sein de l’Assemblée nationale qui nuit à la crédibilité des institutions.
Pendant la dernière campagne des élections législatives, les candidats La République en marche étaient nombreux à dénoncer cette défaillance des parlementaires, promettant qu’avec eux, tout allait changer… ou pas.
3- Prorogation de l’état d’urgence sanitaire
En vigueur depuis juin 2021 pour la France métropolitaine, le régime transitoire de sortie de l’état d’urgence sanitaire est prorogé jusqu’au 31 juillet 2022
C’est la fameuse boîte à outils, dont le gouvernement raffole, qui permet d’ordonner des mesures de restriction, dont le passe sanitaire, à la circulation des personnes, la tenue de manifestations ou encore l’accès aux établissements recevant du public.
En cas d’aggravation de l’épidémie et s’il y avait nécessité de mesures plus lourdes comme un reconfinement ou un couvre-feu, le régime de l’état d’urgence sanitaire pourrait être réenclenché.
Et si ce régime devait être prolongé plus de quatre semaines, il nécessiterait une autorisation du Parlement
Concernant les outre-mer, où la vague épidémique a été forte cet été, le gouvernement a prévu de proroger jusqu’au 31 décembre l’état d’urgence sanitaire en Guyane et en Martinique.
4- Le statut vaccinal des élèves accessible aux directeurs
Jusqu’à la fin de l’année scolaire, les directeurs d’école et les chefs d’établissement du second degré pourront avoir accès aux informations sur le statut virologique des élèves, leurs contacts avec des personnes contaminées et leur statut vaccinal..
Cette mesure avait été retirée par les sénateurs, puis rétablie par les députés. Ses opposants s’inquiétaient d’une “brèche dans le secret médical”.
Le gouvernement la justifie dans un objectif de lutte contre la propagation de l’épidémie, notamment pour prévenir des fermetures de classes ou organiser des campagnes de vaccination.
Cette mesure était présentée pour la deuxième fois, après une première tentative retoquée en juillet.
5- Les oppositions réduites au silence
Au cours des débats, les oppositions de droite comme de gauche ont dénoncé ce projet considéré comme un “blanc-seing” qui “enjambe” les élections présidentielles et législatives.
Une motion de rejet du texte présentée par la France Insoumise, soutenue par les oppositions de tous bords, a été retoquée -71 voix pour, 119 contre – en début de séance.
Le Sénat et les oppositions au Palais Bourbon plaidaient pour la date du 28 février, qui aurait contraint l’exécutif à revenir avant les élections devant les chambres.
Pour le député LR Julien Dive, le pouvoir «a peur d’un débat sur ce sujet à quelques semaines de l’élection présidentielle».
La socialiste Lamia El Aaraje estime quant à elle que «la demande d’un blanc-seing de huit mois est ubuesque» et «joue avec la démocratie».
«Pendant huit mois, tout va pouvoir se décider dans le Conseil de défense en irresponsabilité pénale», affirme le chef de file de LFI Jean-Luc Mélenchon.
Certains des plus hostiles ont aussi redonné de la voix contre le principe du passe et les risques de dérive vers une «société du contrôle généralisé».
Le gouvernement a, lui, rappelé qu’un débat parlementaire sur le sujet aurait lieu autour du 15 février.
«Le contrôle du Parlement est bien présent», assure Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès d’Olivier Véran.
Sans convaincre les oppositions, qui réclament un examen en bonne et due forme de la politique gouvernementale avec vote décisionnel.
Les Républicains et la gauche ont d’ores et déjà prévu des recours auprès du Conseil constitutionnel.
- Source : Le Courrier des Stratèges