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Mercredi, 04 Juin 2025

Famine à Gaza : Un petit guide sur la manière d’affamer une population jusqu’à ce qu’elle meure de faim

Auteur : Jonathan Cook | Editeur : Walt | Lundi, 02 Juin 2025 - 15h33

Votre système d'aide conduira au chaos, car les personnes désespérées et affamées se battront pour obtenir de la nourriture. Voilà qui est très bien. Ils ont l'air d'une masse grouillante de ces « animaux humains » dont vous parliez depuis le début.

Un petit guide sur la manière de mettre en place un génocide par la famine et le nettoyage ethnique :

1. Choisissez le moment opportun. Vous avez procédé au nettoyage ethnique, à l’occupation, à l’oppression et au massacre de vos voisins pendant des décennies, et les tribunaux internationaux ont jugé vos agissements illégaux. Mais tout cela n’aura plus aucune importance lorsque vos voisins se vengeront en vous attaquant. Ne vous inquiétez pas. Vous pouvez compter sur les médias occidentaux pour vous aider. Ils seront ravis de prétendre que l’histoire a commencé le jour où vous avez été attaqué.

2. Répondez en déclarant votre intention d’affamer vos voisins, en les traitant comme des “animaux humains”, en les privant de nourriture, d’eau et d’électricité. Vous serez surpris de voir combien de politiciens occidentaux sont prompts à soutenir cette mesure au nom de votre “droit à l’autodéfense”. Les médias ne manqueront pas de leur emboîter le pas. Il est essentiel de ne pas se contenter d’évoquer le blocage de l’aide. Il faut mettre en œuvre ce blocage. Vous ne rencontrerez aucune opposition sérieuse avant de nombreux mois.

3. Allez-y progressivement. Le temps joue en votre faveur. Laissez filtrer un peu d’aide. Mais veillez à calomnier sans relâche l’efficacité du système de distribution de l’aide mis en place depuis des décennies par la communauté internationale, pourtant transparent, responsable et parfaitement intégré dans les communautés bénéficiaires. Prétendez haut et fort qu’il est infiltré par des “terroristes”.

4. Servez-vous de ces allégations – nul besoin de preuves, les médias occidentaux n’en demandent jamais – comme prétexte pour bombarder entrepôts, centres de distribution et soupes populaires des organisations humanitaires. Au passage, n’oubliez pas de bombarder toutes les boulangeries privées, de saccager les champs, d’abattre tous les animaux et de liquider quiconque tente de pêcher, bref tout ce qui pourrait constituer une source d’alimentation alternative. Vous contrôlez à présent l’aide au compte-gouttes apportée à une population en proie à une famine galopante.

5. Passez à la vitesse supérieure. Faites en sorte de bloquer toute l’aide internationale. Vous inventerez une couverture humanitaire (nous allons y revenir). Le danger, à l’ère des réseaux sociaux, étant que les images de bébés mourant de faim vous font très mauvaise presse. Ne vous laissez pas abattre. Vous y êtes presque. Affirmez, toujours sans preuve, car les médias occidentaux n’en demanderont toujours pas, que les “terroristes” détournent l’aide. Vous serez surpris de voir à quel point les médias sont prompts à parler de bébés “affamés”, en passant sous silence que c’est vous qui les affamez, voire de “famine”, comme si vous étiez victimes d’une sécheresse ou d’une mauvaise récolte, et non d’un plan soigneusement conçu.

6. Gardez à l’esprit l’objectif global. Vous refusez l’aide humanitaire pour “exterminer les terroristes”. Après tout, que valent un bébé, un enfant – voire un million d’entre eux – au regard de la lutte contre une armée hétéroclite de “terroristes” mal armés n’ayant jamais combattu hors de leur terre ancestrale ?

7. Maintenant que la population est entièrement à votre merci, que diriez-vous de mettre en place une alternative “humanitaire” au système existant que vous avez diabolisé et détruit ? Il aurait sans doute été judicieux d’œuvrer en coulisses à cette partie du plan bien en amont, et de consulter régulièrement les Américains sur sa mise en œuvre. Ceux-ci pourraient même se montrer disposés à la financer. C’est généralement le cas. Vous aurez toute latitude d’occulter leur rôle en évoquant des “prestataires privés”.

8. Le moment est venu de passer à l’action. Évidemment, le but n’est pas vraiment de fournir de l’aide, juste d’en donner l’apparence sous une forme qui permette à la famine et au nettoyage ethnique de suivre leur cours. Veillez à ne distiller que d’infimes quantités dans quelques postes de distribution que vous aurez préalablement mis en place avec vos “prestataires privés”. Cette stratégie présente deux avantages.

9. Elle contraint la population à se rendre là où vous le souhaitez, en la piégeant comme des rongeurs. Attirez-les aux confins du territoire, où vous pourrez, le moment venu, les refouler au-delà des frontières et vous en débarrasser une bonne fois pour toutes.

10. Votre stratégie engendrera le chaos, car les populations affamées et désespérées se battront pour se nourrir. Vous y gagnerez : elles ressembleront alors à la “masse grouillante d’animaux humains” évoquée en amont. N’ont-elles pas mérité leur sort ? En outre, les hommes jeunes et robustes, notamment ceux issus de grandes bandes criminelles souvent armées, s’accapareront l’essentiel des marchandises. Ils voleront ce qu’ils ne peuvent pas se procurer aux points de distribution en s’attaquant à ceux qui tentent de rentrer chez eux chargés de lourds colis de secours. À première vue, une telle stratégie semble contre-productive, puisque vous préconisez l’élimination des “terroristes”. Ces jeunes hommes vigoureux ne vont-ils pas, au fur et à mesure que les conditions se détériorent, grossir les rangs des “terroristes” ? Mais rappelez-vous que le véritable objectif consiste à affamer la population au plus vite. Les jeunes, les anciens, les malades et les plus vulnérables mourront les premiers. Plus nombreux seront les morts, plus forte sera la pression incitant les autres à fuir la région pour sauver leur peau.

Vous y êtes presque. Bien sûr, confrontés aux corps émaciés de vos victimes, les politiciens occidentaux tiendront des discours sévères. Mais ils vous ont déjà accordé 20 mois d’avance. Soyez-leur reconnaissants. Vous y êtes presque. Pendant qu’ils tergiversent, passez à la phase d’extermination. Il appartiendra à l’histoire de juger du cours réel des choses.

Traduit par Spirit of Free Speech

L'auteurJonathan Cook, est un journaliste britannique indépendant, anciennement au Guardian et à l’Observer. Il a vécu à Nazareth, en Israël, pendant 20 ans avant de rentrer au Royaume-Uni en 2021. Il a passé une grande partie de cette période à couvrir le conflit israélo-palestinien, où il a été témoin du rôle joué par les médias traditionnels dans la perpétuation des souffrances des populations de la région sans demander de comptes aux politiciens et aux décideurs occidentaux. 

Il a vécu à Nazareth, en Israël, pendant 20 ans avant de rentrer au Royaume-Uni en 2021. Il a passé une grande partie de cette période à couvrir le conflit israélo-palestinien, où il a été témoin du rôle joué par les médias traditionnels dans la perpétuation des souffrances des populations de la région sans demander de comptes aux politiciens et aux décideurs occidentaux.

***

Gaza – tous complices ou/et responsables

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a annoncé en Mai 2025 une nouvelle campagne militaire sur la bande de Gaza, prévoyant la «conquête de tout le territoire». Selon des militaires cela entraînerait le «déplacement de la plupart de ses habitants ». Pour cette opération, des dizaines de milliers de de réservistes sont rappelés sous les drapeaux.

Cette campagne décidée par le Premier ministre israélien est, en fait, le dénouement de la déclaration incendiaire faite auparavant par le ministre des Finances, également ministre aussi de le Défense, le sinistre Bezalel Smotrich: «Nous mettrons fin à cette campagne que lorsque sera démantelée le Hezbollah sévèrement battu, l’Iran privée de son arme nucléaire, Gaza nettoyée du Hamas et que des centaines de Gazaouis auront quitter la bande de Gaza pour d’autres pays, que nos otages auront été rendus certains à leurs foyers et d’autres aux tombes d’Israël ».

En agissant ainsi, Benyamin Netanyahou montre une fois de plus sa malhonnêteté en refusant d’appliquer la deuxième phase de l’accord passé avec le Hamas, au risque de la mort des otages encore vivants, dès lors, de facto, tués sur ordre de lui-même.

Un bref exposé rappellera aux lecteurs la présente situation à Gaza après dix-neuf mois d’une guerre génocidaire :

  • Plus de 55 000 morts en majorité des femmes et des enfants, sans compter ceux encore sous les décombres (ce qui représente à l’échelle de la France plus que les 1 300 000 morts de la Première Guerre mondiale !)
  • Plus de 150 000 blessés.
  • 1 200 journalistes palestiniens tués (avec toujours l’interdiction de journalistes observateurs étrangers).
  • Les hôpitaux et les écoles hors service.
  • La mort de 1 500 membres du personnel de santé, dont des membres de l’ONU.
  • Les tentes, où s’étaient réfugiés les Gazaouis brûlés.
  • Des blessés assassinés, y compris des enfants.

75 % de l’immobilier détruit

L’instauration de la famine par le blocage par Israël, depuis deux mois de l’entrée de nourriture ou d’aide humanitaire, touchant délibérément plus de deux millions de Gazaouis, dont près d’un million d’enfants. Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) de l’ONU est au bout de ses réserves. Les boulangeries ont fermé les unes après les autres. Les signes de malnutrition apparaissent en particulier sur le corps de milliers d’enfant, identifiés par les agences de santé de l’ONU, comme en état de malnutrition avancée.

Tout cela représente des crimes de guerre, et des crimes contre l’humanité, un génocide comme l’a démontré Amnesty International.

Malgré cette situation mortifère, le Hamas, et les autres combattants palestiniens de Gaza, poursuivent leur résistance inébranlable. Évoquant, à juste raison, «la guerre de la faim», le Hamas a lancé un appel à la communauté internationale à faire pression sur Israël pour faire cesser ses crimes

Quelle a été la réponse à l’appel du Hamas des Israéliens ?

Le 5 mai 2025, le cabinet politico-sécuritaire a approuvé la possibilité d’une «distribution humanitaire si nécessaire à Gaza» (?). Objectif prétendu: «empêcher le Hamas de prendre le contrôle des approvisionnements». Au surplus, Gaza «ne manque pas de nourriture» (?). Ce projet a été approuvé sans l’aval du sinistre ministre d’extrême droite à la sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, favorable à la destruction des rares stocks de vivre encore disponibles dans l’enclave à Rafah

«Les ONG présentes à Gaza ont tiré la sonnette d’alarme. Six semaines d’hostilité intense, combinées à deux mois de blocage complet de l’aide humanitaire, ont privé les civils des moyens indispensables à leur survie», écrit le journal La Croix du 6 mai 2025. Poursuivant il cite le dire de Gavin Kelleher du Norwegian Refugee Council (NRC) revenant d’une mission dans la bande de Gaza: «Israël ne se contente pas d’empêcher de faire entrer de la nourriture, il a aussi orchestré une situation où les Palestiniens ne peuvent plus faire pousser leur propre nourriture. Par ailleurs, le métier de pêcheur est devenu l’un des plus dangereux au monde».

Quelle a été la réponse à l’appel du Hamas de la communauté internationale ?

Selon une déclaration du porte-parole de l’Union européenne Anouar El Aouni, lors du point de presse quotidien de la Commission européenne, celle-ci est «préoccupée par l’extension prévue de l’opération des forces israéliennes à Gaza qui entraînera de nouvelles victimes et souffrances pour la population palestinienne. L’U.E. exhorte Israël à faire preuve de la plus grande retenue». «Préoccupée…exhorte», des mots toujours des mots – alors que la présidente de l’U.E, ne cesse de réclamer de nouvelles sanctions contre la Russie dans la guerre en Ukraine !

Le Président de la République, Emmanuel Macron, a déclaré au sujet de Gaza: «La situation la plus critique que l’on ait jamais connue». Des mots, toujours des mots.

De son côté, le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot, le 6 mai, avait déjà assuré devant l’Assemblée nationale que «Gaza est au bord de l’effondrement, du chaos et de la famine (…) L’attitude d’Israël n’est pas acceptable. L’armée israélienne a aussi la responsabilité de l’approvisionnement en nourriture et autres produits de première nécessité ».

Il a condamné de façon très ferme le plan dévoilé le 5 mai par Israël. Ajoutant : «L’urgence, c’est le cessez-le-feu, l’accès sans entrave de l’aide humanitaire massif et la libération des otages du Hamas». «Condamné de façon très ferme». Des mots, toujours des mots.

Quelques mois auparavant, les ministres des Affaires étrangères arabes, réunis au Caire, avaient réclamé la levée du siège imposé par Israël à Gaza, réclamant l’acheminement « immédiat de l’entrée de l’aide humanitaire, de nourriture et de carburant pour aider les 2,3 millions de Palestinien soumis à des raids aériens d’Israël en réponse à l’attaque du Hamas». «Réclamé la levée du siège». Des mots, toujours des mots.

De son côté la Chine ne fait guère mieux. Suivant de près la situation entre la Palestine et Israël, le porte-parole du ministère des affaires étrangères a déclaré le 6 mai: «La Chine s’oppose à la poursuite des opérations militaires à Gaza». «S’oppose». Là encore des mots, toujours des mots.

Pour en revenir aux déclarations de B. Smotrich et de son compère I. Ben Gvir, qu’attend le Président de l’Autorité palestinienne, le chef de l’Etat de Palestine, Mahmoud Abbas, pour demander qu’une enquête soit engagée par le Tribunal Pénal International à leur encontre pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité et poursuivis par la suite devant le dit TPI, comme le sont, depuis le 21 novembre 2024, Benyamin Netanyahou et l’ancien ministre de la Défense Yoav Gallant.

A ces deux personnages pourrait s’ajouter une enquête, diligentée, toujours pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, sur le cas de la Présidente de l’Union Européenne, Ursula von der Leyen, comme l’a demandé la rapporteure spéciale des Nations, Francesca Albanese.

Me Maurice Buttin

Image en vedette : Capture d’écran. M. Netanyahou serre la main d’Itamar Ben Gvir, ministre israélien de la Sécurité nationale, après la prestation de serment du nouveau gouvernement de coalition la semaine dernière à Jérusalem.Photograph by Amir Levy / Getty 

*

Me Maurice Buttin est président par intérim du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient (CVPR PO), Membre du Conseil d’Administration de l’Association de Solidarité France Palestine (AFPSD) et des «Amis de Sabeel-France», une association œcuménique créée en juin 2010. Son conseil d’administration est composé de chrétiens engagés dans les diverses Églises de France. A l’instar d’autres associations d’Amis de Sabeel dans une dizaine de pays, en Europe, en Amérique, en Océanie et en Afrique, l’association «Amis de Sabeel France» a pour objet de développer des liens de solidarité avec l’ensemble des Églises présentes en Palestine-Israël, certaines depuis les tout premiers temps du christianisme.

La source originale de cet article est madaniya.info


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