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Mardi, 05 Nov. 2024

Début de la lutte réelle contre la corruption en Ukraine et chute imminente du régime de Volodymyr Zelensky?

Auteur : Catherine Roman | Editeur : Walt | Lundi, 04 Nov. 2024 - 14h18

De la corruption des institutions de l’état ukrainien (de l’énergie nucléaire au trafic d’armes en passant par le marché noir et la corruption dans les services de sécurité) à l’Ukrainegate (l’histoire de liens douteux entre les élites ukrainiennes et les dirigeants US du parti démocrate, allant de projets communs avec des magnats ukrainiens à l’utilisation démesurée de l’aide militaire et financière), l’histoire de l’Ukraine allie stratagèmes criminels et un spectacle désolant de morts de citoyens enrôlés dans une guerre qui n’aurait jamais dû exister.

Dans cet article, nous nous focaliserons sur la corruption des élites ukrainiennes laissant de côté l’implication présumée de Washington dans la corruption des personnes à des postes clés de l’Union Européenne et des instances internationales.

A ce stade et à titre d’exemple, suite à un audit sur un montant de 2,1 milliards de dollars envoyé à Kiev de janvier à décembre 2022, le Pentagone n’est pas sûr du sort que de 1,1 milliard de dollars faute de documents justificatifs. Dans ces conditions, le Pentagone ne peut pas fournir des garanties de transparence dans l’utilisation des fonds d’aide à l’Ukraine, ce qui pose des problèmes de traçabilité des 76 milliards de dollars alloués à Kiev ces dernières années. Cette déclaration émane du Bureau de l’inspecteur du Pentagone : « Sans suffisamment de documents pour justifier et vérifier ces paiements, le ministère de la Défense ne peut fournir au public, aux dirigeants de l’agence ou au Congrès des assurances de transparence concernant l’utilisation des fonds d’aide à l’Ukraine ».

Ces mêmes problématiques se posent pour les autres fonds émanant, entre autres, de l’Union Européenne, de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International (FMI) qui viennent s’ajouter aux risques de solvabilité (à fin septembre 2024, officiellement, la dette de l’Ukraine a atteint un niveau record de 156 milliards de dollars) et au problème du respect des droits de l’homme y compris des minorités.

I – Prêts du FMI, de la Banque Mondiale, de l’Union Européenne et confiscation des revenus des actifs gelés russes compatibles avec le niveau de corruption en Ukraine ?

1 – Les prêts du Fonds Monétaire International (FMI)

Le 18 octobre 2024, le Conseil d’Administration du FMI a approuvé le versement à Kiev de 1,1 milliard de dollars dans le cadre du mécanisme élargi de crédit (MEDC) validé en mars dernier et visant à soutenir le budget du pays. Il est à noter qu’une des trois missions cruciales du FMI est de décourager les politiques économiques susceptibles de nuire à la prospérité, d’où la question de la corruption endémique en Ukraine qui semble faire obstacle à ce principe fondamental. Dans la mesure où les prêts sont d’ordinaire assortis de mesures correctrices, les prêts du FMI (selon l’institution) apportent la garantie que des politiques publiques judicieuses sont mises en œuvre ce qui vise à encourager le retour des investisseurs privés et protéger les tranches les plus vulnérables de la population. Une fois le prêt approuvé par le conseil d’administration, le FMI surveille la mise en œuvre des mesures sur lesquelles il repose afin de garantir le remboursement des fonds à l’organisme international….A ce titre on peut s’interroger sur le principe de lutte contre la corruption locale.

2 –  Le nouveau fonds de la Banque Mondiale en faveur de l’Ukraine

Mi-octobre 2024, la Banque Mondiale, dont l’opacité a été révélée récemment par l’audit d’Oxman qui a mis en lumière que jusqu’à 41 milliards de dollars de financements climat ne figuraient pas dans les bilans de la Banque Mondiale ( ces financements climat ont disparu des bilans entre le moment où les projets auxquels ils ont été alloués ont été approuvés et le moment où ces projets ont été clos), a créé un nouveau fonds en faveur de l’Ukraine à partir de budgets de pays donateurs. Comme le déclare une source proche du dossier « Bien que les décisions sur l’utilisation des fonds soient prises par le comité de gestion des fonds, qui comprendra à la fois des donateurs et des représentants du gouvernement ukrainien, une utilisation incontrôlée des ressources du fonds est impossible »…..Aux vues de ce qui est exposé précédemment, on ne peut rester que sceptique et s’interroger sur le montant des fonds susceptibles d’être détournés. Il faut rappeler qu’un des moteurs de la stratégie de la Banque Mondiale est la bonne gestion des finances publiques et de la dette qui met en exergue que la gouvernance du secteur public et la lutte contre la corruption font partie des grandes priorités de développement.

Les initiateurs du nouveau fonds sont le Canada, le Japon et les Etats-Unis pour un montant d’au moins 10  milliards de dollars auquel pourrait se joindre le Royaume-Uni.

3- La nouvelle tranche d’aide de l’Union Européenne

Fin octobre 2024, Volodymyr Zelensky a signé une loi autorisant l’enquête sur les affaires de corruption. Cette loi est une condition pour le versement de la prochaine tranche de facilité financière de l’Union Européenne, soit 4 milliards d’euros. Le montant total de l’enveloppe allouée en février 2024 par Bruxelles se monte à 50 milliards d’euros étalée sur plusieurs années dont 16 milliards pour cette seule année 2024. Selon la Banque Nationale d’Ukraine, si les exigences de l’Union Européenne sont remplies, les tranches seront reçus par Kiev chaque trimestre.

4 – La confiscation des revenus des actifs gelés russes et intérêt général

Une majorité des avoirs russes gelés est située à Euroclear Bank SA, basée en Belgique et donc régit par le droit belge et qui se doit de respecter les règles du droit européen qui sont d’application directe. La confiscation des revenus des actifs russes gelés soulèvent la question de la conformité du droit européen au droit international (notamment au droit de propriété dont un des trois piliers est le « fructus ») et de la conformité au droit européen lui-même. En effet, le droit de propriété au sein de l’Union Européenne est garanti par :

  • L’article 1er du Premier protocole de la Convention européenne des droits de l’homme qui prévoit que « chacun a le droit au respect de ses biens »
  • La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000, qui l’érige au rang de « droit fondamental de l’Union européenne ».  Il faut notamment retenir l’article 17 à ce titre : 

« Toute personne a le droit de jouir de la propriété des biens qu’elle a acquis légalement, de les utiliser, d’en disposer et de les léguer. Nul ne peut être privé de sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, dans des cas et conditions prévus par une loi et moyennant en temps utile une juste indemnité pour sa perte. L’usage des biens peut être réglementé par la loi dans la mesure nécessaire à l’intérêt général ».

Mais dans le cas actuel, comment parler d’intérêt général alors que l’Ukraine est accusée par plusieurs pays européens d’avoir fait exploser les gazoducs « Nord Streams » qui approvisionnaient l’Union Européenne en gaz russe à bas coût et ont permis à son industrie de prospérer ces dernières années.

Quid également de la nécessité pour Bruxelles de prolonger une guerre contre la Russie qui va à l’encontre des intérêts économiques européens et qui semble perdue d’avance face à la Russie qui est pour beaucoup de spécialistes la première armée du monde ?

De même, au regard de la corruption actuelle du régime de Kiev, le financement de celui-ci ne peut objectivement être qualifié d’intérêt général de l’UE. C’est d’ailleurs dans ce cadre, que pour bénéficier d’un prêt de 35 milliards d’euros provenant des avoirs russes gelés, selon le Journal officiel de l’UE, l’Ukraine doit adhérer à des politiques « démocratiques » qui incluent le multipartisme, l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme, y compris les droits des minorités. La Commission Européenne et le Service européen pour l’action extérieure se sont engagés à veiller au respect de cette condition, le non-respect de ces exigences entraînant la suspension des paiements et la cessation du soutien fourni dans le cadre de l’aide financière à Kiev. On peut se demander quel sort sera donc réservé à la lutte contre la corruption par le gouvernement de V.Zelensky.

La lutte contre la corruption ne devra ainsi ne pas être qu’un « habillage » mais une réelle bataille contre la corruption qui devra être engagée sous peine de remise en cause des prêts et fonds versés ainsi qu’une remise en cause de la crédibilité des institutions internationales et européennes.

II – La chute de l’administration de Volodymyr Zelensky sur fond de lutte contre la corruption

Un dispositif efficace de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT) contribue à prévenir, décourager et repérer les activités de blanchiment des produits de la corruption.

Sur la base des normes internationales établies en la matière par le Groupe d’action financière (GAFI) sur le blanchiment de capitaux que la plupart des institutions internationales ont fait siennes, quatre aspects essentiels du dispositif d’un pays à cet égard permettent de soutenir les efforts de lutte contre la corruption :

1) les mesures préventives mises en œuvre par les institutions financières et d’autres entités chargées de communiquer des données ; 

2) la transparence des entités (par exemple, l’accès à des renseignements élémentaires sur la propriété effective des personnes morales et des constructions juridiques) ;

3) un système de justice pénale qui incrimine les actes de corruption et le blanchiment des gains illicites et qui permet d’enquêter sur ces actes, ainsi que de saisir ou de confisquer les gains en question ;

et 4) la coopération internationale et le recouvrement des avoirs liés à la corruption transnationale et à ses produits.

Des condamnations contre les fonctionnaires corrompus et la confiscation des produits de leurs activités illégales sont nécessaires pour renforcer les efforts de responsabilisation et de lutte contre la corruption.

A l’heure actuelle, il existe trois scenarii possibles compte tenu des financements et des engagements antérieurement cités :

  • Soit les fonds internationaux sont versés suite à une lutte réelle contre la corruption et le régime actuel de Kiev est chassé du pouvoir par des poursuites judiciaires
  • Soit les fonds sont versés et le régime actuel de Kiev perdure et on pourra parler de corruption potentielle des institutions internationales et européennes ainsi que celle de Volodymyr Zelensky payé pour continuer la guerre (condamnable par la convention contre la corruption de l’ONU signée et ratifiée, entre autres, par l’Ukraine surtout aux vues des actifs de Volodymyr Zelensky dont certains dans les paradis fiscaux comme l’a démontré l’enquête liée aux Pandora Papers réalisée en 2021 par un consortium de journalistes). Ceci débouchera sans doute sur des poursuites au niveau international que ce soit pour les entités ou les personnes physiques incriminées d’où un départ à terme de l’administration actuelle kiévienne et de ses cadres .
  • Soit les conditions de lutte contre la corruption en Ukraine ne sont pas remplies et reconnues officiellement et les fonds ne sont pas versés ce qui entraînera une chute du régime de Kiev pour banqueroute et des poursuites.

Conclusion

En conclusion, les pays dotés d’institutions solides sont plus résilients et mieux à même de faciliter l’essor du secteur privé, de réduire la pauvreté, d’assurer des services de qualité, de lutter contre le changement climatique, de gagner la confiance des citoyens et, enfin, de prévenir les situations de conflit et de fragilité.

La corruption est un mal insidieux qui sape la démocratie, l’état de droit et qui entraîne la violation des droits de l’homme, fausse le jeu des marchés, nuit à la qualité de vie et crée un terrain propice à la criminalité organisée, au terrorisme et à d’autres phénomènes qui menacent l’humanité.

Au regard de ce qui a été exposé précédemment l’Ukraine a un grand défi à relever qui ne semble pas pouvoir être réalisé par l’administration actuelle et ceux qui l’entoure. Un renouveau politique parait nécessaire dans un contexte qui peut apparaître dangereux en terme d’intégrité physique et de menaces.

Pour finir, la confiscation des revenus des actifs russes gelés ne semble pas conforme au droit contrairement aux déclarations du G7 et de l’Union Européenne.

Image en vedette : Capture d’écran. Zelensky au Fonds monétaire international en décembre 2023.


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