Le cauchemar des entreprises américaines de puces électroniques ne fait que commencer
Le fournisseur américain d’équipements de fabrication de puces, Lam Research, a prévenu, mercredi, d’une potentielle perte de revenus de 2 à 2,5 milliards de dollars en 2023, en raison des derniers contrôles à l’exportation de Washington sur les semi-conducteurs et équipements avancés exportés vers la Chine, une perte qui représente environ 30% des ventes de l’entreprise américaine, a rapporté Reuters.
Lam Research est la plus récente entreprise de puces électroniques à prévoir une perte de chiffre d’affaires en raison de l’interdiction d’exportation vers la Chine par les États-Unis. La semaine dernière, Applied Materials estimait une baisse de 250 à 550 millions de dollars de son chiffre d’affaires net pour le trimestre se terminant le 30 octobre, avec un impact supplémentaire attendu dans les mois à venir.
Bien que les commentaires des milieux d’affaires américains sur le dernier cycle de répression technologique des États-Unis à l’encontre de la Chine semblent modérés, leurs inquiétantes perspectives de ventes ne constituent pas une situation isolée, mais concernent toutes les entreprises formant la chaîne d’approvisionnement mondiale en puces, en particulier celles des États-Unis. En effet, le cauchemar causé par l’interdiction des puces par les États-Unis pour leurs propres entreprises ne fait peut-être que commencer.
Il est compréhensible que dans un environnement dominé par la pression politique de Washington et une opinion publique manipulée contre la Chine, les chefs d’entreprise doivent garder la tête basse face à une intervention unilatérale des États-Unis dans le secteur hautement mondialisé des semi-conducteurs.
Mais il est plus que jamais essentiel que les entreprises parlent de l’impact de telles mesures au lieu de rester silencieuses. Le monde a besoin d’avoir connaissance des chiffres pour connaître l’ampleur des dégâts que va subir l’industrie à cause des manœuvres géopolitiques américaines. Au fur et à mesure que les pertes s’accumuleront, l’impact commercial sur la politique de Washington augmentera également.
Ce n’est un secret pour personne que les États-Unis resserrent de plus en plus les restrictions sur les exportations de haute technologie vers la Chine, en particulier dans le secteur des semi-conducteurs, dans une apparente tentative de contenir le développement indépendant de la Chine et ses percées dans le domaine de la science et de la technologie. En conséquence, les perspectives du marché pour les entreprises américaines de puces électroniques se sont considérablement assombries.
Avant même les dernières mesures de répression américaines, les entreprises productrices de puces souffraient déjà. Selon un rapport du Wall Street Journal de la semaine dernière, sur les 15 plus grandes sociétés de puces qui ont publié leurs résultats pour le trimestre finissant en septembre, 10 devraient enregistrer un ralentissement de la croissance de leurs revenus par rapport au trimestre finissant en juin.
Leur situation va s’aggraver après que l’administration Biden a dévoilé des règles de contrôle des exportations « les plus agressives » au début du mois, dans le but de limiter les ventes de semi-conducteurs et d’équipements de pointe à la Chine.
La Chine est le plus grand marché au monde pour les puces électroniques, et elle a importé pour environ 400 milliards de dollars de semi-conducteurs en 2021, ce qui représente près de 60% du marché mondial des puces. Les entreprises américaines de haute technologie sont les plus grands bénéficiaires de cette demande massive de la Chine, c’est donc leur plus grande source de profits. Il est impensable pour tout fabricant de puces de perdre un marché aussi important. Cela affecterait grandement leurs plans de dépenses et entraînerait à son tour une perte indirecte de ventes pour les fournisseurs d’équipements de semi-conducteurs comme Lam Research et Applied Materials.
Alors que le secteur mondial des semi-conducteurs est confronté à une chute des ventes d’ordinateurs personnels et de smartphones dans un contexte de récession, cette dernière interdiction concernant les puces, prise par Washington, déstabilise sérieusement la chaîne industrielle mondiale. Cette politique, qui semble ignorer complètement l’impact sur l’ensemble de l’industrie des puces, ressemble surtout à une volonté de l’administration Biden de montrer ses muscles et de jouer les durs contre la Chine à l’approche des élections américaines de mi-mandat.
Mais loin d’assurer la domination des États-Unis dans le secteur des puces, les contrôles à l’exportation pourraient nuire aux entreprises technologiques américaines en termes de ventes et donc réduire leurs investissements en recherche et développement.
Du point de vue de la Chine, le marché est énorme et il est douteux que les États-Unis puissent utiliser des décrets unilatéraux pour empêcher les entreprises de puces non américaines de mener une coopération et un commerce normal avec la Chine. Si les entreprises non américaines ne se joignent pas au mouvement, les interdictions unilatérales américaines ne feront que réduire la compétitivité des entreprises américaines en les privant du marché chinois.
Les restrictions américaines ne feront qu’accélérer le développement du secteur chinois des puces, car le marché chinois n’attendra pas que les États-Unis reviennent à la raison. Si le secteur chinois des puces rattrape rapidement son retard et ne dépend plus des importations, ce ne sera pas une perte de 2,5 milliards de dollars pour une seule entreprise américaine, mais des centaines de milliards de dollars de perte pour l’industrie entière.
Traduction Wayan, relu par Hervé, pour Le Saker Francophone
- Source : Global Times (Chine)