L’Iran souffle le chaud et le froid sur Israël
On attendait une frappe iranienne sur Israël dès le début de la semaine. L’Iran et le Hezbollah ne se pressent pas: cela fait partie d’une guerre psychologique destinée à isoler Israël un peu chaque jour sur la scène internationale. Selon les dernières informations, l’Iran s’abstiendrait de toute riposte si Israël arrêtait les hostilités à Gaza. Si Tel-Aviv refuse la main tendue, ses soutiens continueront à s’amenuiser sur la scène internationale. En attendant, la Jordanie hésite à ouvrir son espace aérien à Israël et ses alliés en cas d’attaque iranienne. Et les Etats-Unis appuient sur la pédale de frein. Cela n’empêche pas Téhéran de diffuser dans le monde entier des images de certains de ses missiles de nouvelle génération.
HULA VALLEY, April 12, 2024 (Xinhua) — (Ayal Margolin/JINI via Xinhua)
L’Iran et les mouvements combattants de l’Axe de la Résistance jouent avec les nerfs de la société et du gouvernement israélien. La frappe de représailles pour le double meurtre du chef du Hamas et d’un des principaux responsables du Hezbollah par Israël n’a toujours pas été déclenchée. Pourtant, certains, aux USA, l’annonçaient pour lundi dernier.
Une intense activité diplomatique
La diplomatie fonctionne à plein. Les Etats-Unis et le Qatar négocient avec l’Iran. (On oublie les ingérences de notre mouche du coche nationale; sa mention dans les médias signifie seulement que nous sommes dans une phase diplomatique et que Macron essaie de se donner une importance).
Retenons que l’Iran affirme être prêt à surseoir à des frappes pourvu que les combats cessent à Gaza. Tout en diffusant dans le monde entier des images de ses nouvelles générations d’armes, en particulier des missiles.
L’intelligence stratégique a déserté l’Occident
Sous emprise américaine, le monde euro-atlantique ne sait plus faire grand chose du point de vue stratégique. Tu me frappes, je te frappe plus fort. Il y a aussi la version israélienne: je te frappe préventivement et si tu me frappes en retour, je décrète que tu es antisémite, ce qui justifie que je te frappe à nouveau.
La Russie, l’Iran, la Chine, combinent ensemble des millénaires de diplomatie. Ils pensent le temps long. Ils font du temps un allié. Tu voudrais que je te frappe tout de suite? Tu attendras. Je peux d’ailleurs renoncer à te frapper si tu deviens raisonnable.
Israël détruit sa réputation un peu plus chaque jour
Loin de profiter de la suspension de la riposte iranienne et libanaise pour faire de la diplomatie, Tel-Aviv a continué à creuser dans le champ de l’horreur: plainte du ministre Smotrich que la communauté internationale empêchent Israël de massacrer autant que le gouvernement le voudraient; révélations sur les crimes commis par des soldats israéliens sur des prisonniers palestiniens, suivies de tentatives publiques de disculpation des criminels; bombardements sur Khan Younès; bombardements au Liban.
Chaque jour qui passe prouve un peu plus au reste du monde que si l’Iran frappe, ce sera contre un Etat-voyou (“rogue state”‘).
Les Etats-Unis appuient sur la pédale de frein
Il y a l’apparence et puis la réalité. 40 députés démocrates ont boycotté le discours de Benjamin Netanyahu au Congrès; pour dissimuler les rangs vides, on les a remplacés par des fonctionnaires de l’administration parlementaire qui avaient pour mission d’applaudir comme les Républicains.
Kamal Harris sait qu’une partie de l’électorat démocrate est profondément pro-palestinienne. Ce qui compte encore plus, ce sont les évaluations du Pentagone – qui correspondent d’ailleurs à des analyses israéliennes. Les Etats-Unis ne peuvent pas se permettre de déployer à chaque attaque iranienne ce qu’ils ont mis en œuvre le 14 avril dernier. Ou bien leurs stocks s’épuiseront rapidement – au détriment de l’Ukraine et de Taïwan.
Et puis il y a le fait que la Jordanie hésite à interdire son espace aérien à des puissances qui voudraient défendre Israël contre une attaque de l’Iran.
La marge de manœuvre de Netanyahu se réduit chaque jour. il donne le change en faisant monter les enchères. Il est donc probable qu’il refusera le cessez-le-feu à Gaza. Et que les frappes iraniennes auront bien lieu.
C’est au petit matin que l’ennemi attaquera, quand les sentinelles ont tendance à s’endormir, après une nuit d’attente fiévreuse.
- Source : Le Courrier des Stratèges