Obstruction du Sénat à la demande de pétition de Laurent Toubiana sur l’accès aux données
Vaccination et mortalité : une pétition demandant l’accès aux données des décès toutes causes selon le statut vaccinal dans le goulot d’étranglement technique du Sénat. Le 19 février 2022, l'épidémiologiste Laurent Toubiana a déposé une demande de pétition auprès du Sénat, afin d’obtenir l’accès aux données complètes des décès dans le cadre de l’enquête sur les effets secondaires des vaccins Covid-19. Il analyse et met en ligne depuis deux ans de nombreuses données sur la crise Covid-19.
Sa pétition, qui respecte pourtant tous les critères nécessaires à sa validation, est bloquée entre les mains de la commission de tri des pétitions qui décide de mettre, ou non, les pétitions déposées par les citoyens en ligne sur le site du Sénat. Le motif avancé est celui d’une « validation technique ». Ce blocage semble long au regard de l’urgence de l’analyse.
Le Sénat a ouvert une commission d’enquête sur les effets secondaires suite à la pétition du Dr Julien Devilleger déposée le 14 janvier 2022. Le 10 février, avec 34 000 signatures, les sénateurs avaient décidé de ne pas attendre le seuil de 100 000 signatures déclenchant l’obligation pour les sénateurs d’examiner la pétition. Catherine Deroche, sénatrice LR observant une « dynamique » de la pe?tition, explique que les sénateurs s’en sont saisi pour « re?pondre aux inquie?tudes qui s’expriment ». Elle est confiée à l’OPECST (Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques).
La pétition déposée par Laurent Toubiana vise à adjoindre aux travaux de cette commission l’analyse des décès toutes causes afin de s’assurer que soit étudié avec attention les liens entre les décès et les injections. Pour cela, il est nécessaire de permettre à des chercheurs indépendants (sans liens avec le gouvernement ou les laboratoires), d’accéder aux données de décès par statut vaccinal. Plus d’un an après le début de la campagne vaccinale, des travaux simples vérifiant si, à âge égal, les personnes vaccinées meurent effectivement moins que les personnes non-vaccinées, et vérifiant s’il n’existe effectivement aucun lien entre la date de vaccination et la date de décès auraient pourtant dû être menées. Face au silence du Ministère, il convient que la commission d’enquête fasse toute la lumière sur ce sujet. Rappelons que la sénatrice Muller-Bronn avait déjà demandé accès aux données pour les chercheurs dans son allocution au Sénat le 13 octobre 2021.
En complément : justification de la pétition
La pétition repose sur deux éléments principaux qui justifient l’urgence de connaître le statut vaccinal des personnes décédées.
- De trop nombreux effets indésirables déclarés
- Des concordances entre les campagnes vaccinales et des périodes de surmortalité.
De trop nombreux effets indésirables déclarés
Le dernier rapport de l’ANSM [1] fait état de plus de 137 000 effets indésirables renseignés en France, dont ¼ sont considérés graves. L’ANSM ne publie pas aujourd’hui le nombre de décès ayant suivi ces déclarations d’effets indésirables. Le site Eudravigilance [2] (remontées de pharmacovigilance européenne) comptabilise plus de 17 000 décès ayant suivi une déclaration d’effet indésirable.
Table 1 : remontée des données Eudravigilance au 17/02/2022
Des résultats similaires sont observés sur le site VAERS (remontées de pharmacovigilance des Etats-Unis).
Généralement, la création de nouveaux médicaments et a fortiori ceux à but prophylactique comme un vaccin, requiert de nombreuses années et de longs essais thérapeutiques avant leur mise sur le marché. Un nouveau vaccin nécessite une veille sanitaire particulièrement rigoureuse et une transparence totale sur les analyses des effets indésirables, voire un arrêt de l’expérimentation si leur fréquence est importante.
Depuis le début de la vaccination, 141 millions de doses ont été administrées en France. Un an plus tard, on constate que ce qui avait été proposé comme la stratégie médicale unique à base d’une thérapie génique devant protéger, n’a ni empêché la diffusion du virus, ni les contaminations, ni les malades.
Des concordances entre les campagnes vaccinales et des périodes de surmortalité
Le site Eurostat (L'institut statistique de l’Union Européenne) diffuse régulièrement les décès hebdomadaires par pays et tranche d’âge {3]. Le site ECDC (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) diffuse le nombre de doses distribuées de manière hebdomadaire par pays et tranche d’âge [4].
Le nombre de décès dans un pays varie beaucoup au cours du temps :
- D’une part, le vieillissement de la génération des baby-boomers implique que le nombre de personnes de plus de 70 ans augmente fortement chaque année. Par conséquent, le nombre de décès de ces générations augmente et continuera d’augmenter pendant plusieurs années, jusqu’à ce qu’une majeure partie de cette génération soit décédée. A l’inverse, les jeunes sont de moins en moins nombreux, le nombre de décès des jeunes a donc tendance à diminuer. Vouloir comparer brutalement les décès 2020 ou 2021 aux années précédentes amènera nécessairement à conclure à une surmortalité des personnes âgées et une sous-mortalité des jeunes, alors qu’il ne s’agit que d’évolutions de population.
- D’autre part, le nombre de décès des personnes âgées est particulièrement élevé lors des épisodes de froid et des épidémies hivernales. A l'inverse, les jeunes ont plutôt des hausses de mortalité l’été, probablement plus dues à des phénomènes sociétaux et comportementaux (vacances d’été notamment).
Il est donc nécessaire de réaliser des projections considérant ces 2 aspects (tendance de long terme et saisonnalité) pour déterminer s’il y a une surmortalité. Nous avons projeté la tendance du nombre de décès de chaque semaine entre 2013 et 2018 sur 2019, 2020 et 2021. Ainsi, la tendance du passé est poursuivie pour considérer les évolutions de population et la saisonnalité est respectée, puisque chaque semaine est projetée grâce aux semaines qui lui correspondent dans le calendrier.
Les décès projetés sont en gris, et les décès constatés sont en rouge.
La différence entre mortalité attendue et mortalité observée nous permet d’observer les semaines de surmortalité (mortalité observée supérieure à l’attendu), les semaines de sous-mortalité (mortalité observée inférieure à l’attendu), et de les comparer aux périodes de vaccination. On observe pour la France, mais également pour d’autres pays Européens, des correspondances entre les semaines de surmortalité, leur niveau et les campagnes de vaccination.
Nous considérons ici que la campagne de vaccination a démarré lorsque 5% de la population cible a reçu au moins une dose (de façon à ne pas comptabiliser la période où seul un petit nombre de personnes considérées fragiles est vacciné).
D’une part, nous constatons que la surmortalité est plus grande en 2021 depuis la vaccination que pour la même période en 2020, pour toutes les tranches d’âge avant 80 ans. C’est très étonnant, car le discours médiatique fait état d’une hécatombe en 2020 due à la Covid-19 en l’absence de vaccins. Les nouveaux variants 2021 sont réputés moins mortels et les populations protégées grâce au vaccin. On s’attendait donc à découvrir l’inverse. Nous ne sommes en revanche pas surpris de la moindre surmortalité des plus de 80 ans, cette génération subissant habituellement “l’effet moisson” : lorsqu’une année, une forte surmortalité est observée, liée à une canicule (comme en 2003) ou à une épidémie (comme en 2015), la mortalité recule l’année suivante.
D’autre part, nous constatons que les campagnes de vaccination sont liées à des hausses de surmortalité pour toutes les tranches d’âge excepté les 25-49 ans (qui est la seule tranche d’âge d’amplitude 25 ans et donc très hétérogène).
Le test de significativité statistique (Spearman) valide le constat visuel : les campagnes de vaccination sont significativement corrélées à des hausses de mortalité pour les 15-24 ans, les 70-79 ans et les plus de 80 ans.
L’urgence de connaître le statut vaccinal des personnes décédées
Avec les données à disposition, le statut vaccinal des personnes décédées n’est pas connu. Il est ainsi impossible de conclure à une causalité entre le nombre de décès et le nombre de vaccins administrés dans la population. Il ne s’agit alors pas d’une preuve définitive de causalité, mais d’un signal d’alarme qui vient appuyer les remontées de pharmacovigilance.
Il est donc nécessaire que le ministère de la Santé fournisse les données des décès par statut vaccinal avec les données du SNDS (Système National des Données de Santé). Il sera alors possible pour chaque tranche d’âge de savoir :
- La part de personnes considérées vaccinées par le système de santé (car pour le moment le Ministère divise un nombre de piqûres réalisées par une population estimée par l’INSEE qui n’a pas pu faire de recensement en 2020)
- Le taux de mortalité par période et statut vaccinal (pour vérifier si les vaccinés meurent réellement moins que les non-vaccinés)
- La concordance entre date d’injection et date de décès (en cas d’innocuité, il ne doit y avoir aucune concordance)
- La comparaison avec les autres campagnes vaccinales du passé, notamment antigrippale (pour observer s’il existe une spécificité aux vaccins anti-covid)
- Les taux de mortalité selon le lot du vaccin (pour vérifier qu’il n’existe aucune différence entre lots)
Il est nécessaire que la commission d’enquête du Sénat se saisisse du sujet et garantisse cette analyse. Il est alarmant de constater que la pétition qui le demande est pour le moment bloquée.
Notes
Laurent Toubiana est directeur de l'Institut de recherche pour la valorisation des données de santé (IRSAN) et responsable du SCEPID (Systèmes Complexes et Epidémiologie) du Laboratoire d'Informatique Médicale et d'Ingénierie des connaissances en eSanté.
[1] https://ansm.sante.fr/uploads/2022/02/04/20220203-vaccins-covid-19-fiche...
[2] https://www.adrreports.eu/fr
[4] https://opendata.ecdc.europa.eu/covid19/vaccine_tracker/csv/data.csv
- Source : FranceSoir