Le conflit israélo-palestinien s'invite sur les terrains de football au Chili
Au Chili, le club du CD Palestino est au cœur d’une violente polémique après avoir dévoilé son maillot 2014. Les numéros "1" y sont remplacés par des cartes de la Palestine d’avant 1948, ce qui a provoqué l’"indignation" de la communauté juive.
Le 4 janvier, le CD Palestino, club historique du Chili, a dévoilé son nouveau maillot lors de l’ouverture de la saison 2014 face à Everton. Ce cérémonial, qui passe habituellement inaperçu – le CD Palestino joue depuis près d’un siècle en blanc, vert et rouge – a connu cette fois un retentissement inédit. En cause, une modification particulièrement lourde de sens. Depuis le début de l’année, le club a décidé de remplacer les numéros "1" de son maillot par des silhouettes de la carte de la Palestine d’avant 1948
Cette carte, qui inclut donc l’actuel État d’Israël sans délimiter ses frontières, n’a pas manqué de faire réagir la communauté juive. Son président Gerardo Gorodischer a ainsi dit son indignation à l’agence de presse AP : "Nous ne pouvons pas accepter que le football soit utilisé pour transmettre des messages politiques, a fortiori pour importer le conflit du Moyen-Orient ici".
Antagonismes exacerbés
La communauté juive du Chili, qui a fustigé les "managers irresponsables du club", a appelé l’ANFP - la Fédération chilienne de football - à "punir" le Palestino pour avoir été à l’origine d’une "journée noire pour le football chilien". Elle n’exclut pas de porter l’affaire jusqu’à la Fifa, l’instance dirigeante mondiale du football, si le club refuse de présenter ses excuses et de modifier son maillot.
Face au mutisme du club et de la Fédération, un ancien président de la communauté juive du Chili, Gabriel Zaliasnik, s’est publiquement posé la question de savoir si le président de l’ANFP "pourrait avaliser l’irresponsabilité de la direction du CD Palestino". Une hypothèse qui renforcerait la polémique, d’autant que le président, Sergio Jadue, est lui-même d’origine palestinienne.
Suite à cette polémique, la Fédération palestinienne du Chili s’est elle-aussi fendue d’une déclaration publique véhémente. "Nous regrettons profondément que les sionistes chiliens parlent d'une importation du conflit du Moyen-Orient dans notre pays. [...] Nous déplorons l'hypocrisie de ceux qui manifestent leur indignation face à la présence de cette carte, alors qu'ils qualifient toujours les Territoires occupés comme des territoires contestés", détaille le document.
Pas une première
Depuis samedi 4 janvier, la polémique enfle au Chili. Pourtant, ce n’est pas la première fois qu’un symbole identique est arboré par les joueurs du Palestino. En 2002, le gardien de l’équipe Leonardo Cauteruchi avait lui aussi porté un numéro "1" similaire au cours d’un match. À l’époque, l’affaire n’avait pourtant pas suscitée une telle passion. "C’était une décision personnelle qui n’avait pas de connotation politique. C’était seulement un hommage envers un peuple qui souffrait alors beaucoup de la guerre. […] du coup, [les membres de la communauté juive du Chili] ont compris et ce n’est pas allé plus loin", explique aujourd'hui le portier désormais retraité dans les colonnes du journal "La Segunda".
Au Chili, où les autorités ont reconnu les Territoires palestiniens comme un "État libre, indépendant et souverain", le Club Deportivo Palestino est un monument populaire. Derrière les deux géants du football local que sont Universidad de Chile et Colo Colo, le Palestino, né de l’initiative d’un groupe d’immigrants palestiniens en 1920, est l’un des clubs les plus suivis du pays. Il est situé dans la localité de La Cisterna, une commune populaire du sud de Santiago du Chili, la capitale.
Le Palestino, qui bénéficie d’un statut professionnel depuis 1951, est, à ce jour, le seul au monde à porter ce nom.
- Source : France 24