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Dimanche, 22 Déc. 2024

« Salops de pauvres… ! »

Auteur : Charles SANNAT | Editeur : Walt | Mercredi, 03 Sept. 2014 - 20h43

Je voulais faire aujourd’hui un papier « sérieux », traiter un sujet de fond avec calme et pondération mais finalement, ce sera sans doute plus un billet d’humeur en réaction aux derniers propos de notre sinistre du Chômage, François Rebsamen, pour qui la seule façon de baisser le nombre de demandeurs d’emploi dans notre pays ce n’est pas en créant du boulot pour tous, mais en radiant le maximum de demandeurs d’emploi pour fraude… Voilà un beau programme « socialiste » en approche.

Revenons sur les propos exacts :

Pôle Emploi : Rebsamen veut « renforcer les contrôles »

« Le ministre du Travail, invité d’iTélé ce mardi matin, veut vérifier que les chômeurs inscrits «cherchent bien un emploi», soulignant le risque de «sanction» pour les irrégularités.

« En France, 350 000 emplois ne trouvent pas preneurs.» Partant de ce constat, le ministre du Travail, François Rebsamen, a demandé ce mardi à Pôle Emploi de « renforcer les contrôles » pour vérifier que les chômeurs inscrits « cherchent bien un emploi ». Et de souligner qu’une « sanction » était nécessaire dans le cas contraire. »

« Le ministre, invité d’iTélé, a rappelé qu’être «chômeur au sens du bureau international du travail» c’est rechercher un emploi. Et d’ajouter: « C’est négatif pour ceux qui recherchent des emplois d’être à côté de personnes qui ne cherchent pas d’emploi. »

Je vous passe les aspects langagiers avec une novlangue dans toute son horreur, notamment lorsqu’il affirme pour « adoucir » faussement ses propos qu’il est insupportable que les vrais chercheurs de travail soient à côté des faux chercheurs. Personnellement, si je suis chômeur, je préfère être en concurrence qu’avec des faux chercheurs, j’aurais plus de chances de trouver, et puis la recherche d’emploi est un acte solitaire, individuel, personnel, ce n’est pas un travail d’équipe mon cher ministre, donc savoir si le gusse d’à côté cherche ou pas est bien la dernière de mes préoccupations.

Ce n’est pas le cas en revanche si je mets ma casquette de « cotisant » ou de « con-tribuable ». Là, effectivement, cela me « coûte » de l’argent et je souhaiterais qu’on lutte contre les abus, mais des abus y en-a-t-il seulement de significatifs ?

La réponse est objectivement non. Bien sûr que beaucoup recherchent mollement et qu’ils sont sans doute trop nombreux. Cependant, le véritable problème c’est le manque de travail et sa raréfaction. Ensuite, je rappelle que contrairement à nombre de minima sociaux comme le RSA ou les allocations handicap, les « Assedic » sont limitées dans le temps. Très limitées dans le temps même puisque l’on bénéficie au maximum de 23 mois d’indemnisation. C’est plutôt dans l’assistanat à long terme qu’il faut trouver la cause des emplois non pourvus et j’y reviendrai plus loin.

Et puis, de vous à moi, le régime particulier des intermittents du spectacle coûte légalement infiniment plus cher que la fraude illégale à la collectivité. Mais de cela, le ministre ne parlera pas.

Le mythe des emplois qui ne trouvent pas preneurs…

Haaa mais quel discours de droite, une droite rance, nauséabonde, qui nous rappelle les « heures les plus sombres de notre histoire », jetant à la vindicte populaire cette catégorie de chômeurs-profiteurs… Haaa, ma femme me glisse dans l’oreillette que non, ce n’est pas Marine Le Pen qui vient de déclarer que des centaines de milliers de paresseux pompaient l’argent du travailleur français honnête et qui se lève tôt demain matin de bonne heure, mais un bon socialo bon teint bien rosé et bien nourri.

Non, la réalité pour les emplois non pourvus c’est que c’est beaucoup plus compliqué qu’un simple chiffre pour la bonne et simple raison que cela ne veut rien dire et que les estimations des emplois non pourvus va de 40 000 (selon le… MEDEF lui-même) à 500 000 selon certains « sarkozystes ».

Ensuite, si les emplois sont non pourvus c’est qu’ils ne trouvent pas preneurs… (si, si) et s’ils ne trouvent pas preneurs, c’est parce que vider des poulets toute la journée par le croupion (et pas des ministres parce que là, il y aurait plein de volontaires) dans un abattoir en se levant à 4 heures du matin pour 800 euros par mois alors qu’en ne faisant rien et avec vos deux gosses, votre femme et l’aide alimentaire vous gagnerez beaucoup plus en demandant le RSA et les allocations logement, vous ne paierez pas d’impôt, ni la cantine, ni le centre de loisirs pour les gamins, etc, etc.

La véritable question c’est peut-on rémunérer plus l’inactivité que l’activité !

Voilà la seule question que l’on devrait se poser collectivement. Jusqu’où assiste-t-on quelqu’un, comment, pourquoi, en échange de quoi ?

La véritable réalité vraie, c’est que ceux qui « profitent » du système le font parfaitement légalement !! C’est le système en lui-même qui est générateur de « trappes » à inactivité. Notre système les crée lui-même.

Pourtant, je considère que la solidarité est essentielle, que c’est cette solidarité qui fonde le socle même d’une nation, que moralement les forts doivent tendre la main aux faibles car celui qui est fort aujourd’hui sera sans doute ou peut-être le faible de demain.

Mais cette solidarité doit être pensée pour être efficace, pertinente et supportable financièrement par la collectivité qui finance.

Le petit bout de la lorgnette

C’est tout le drame de notre pays que d’avoir à sa tête des nodocéphales ne voyant les choses que par le petit bout de la lorgnette. Le problème de la fraude n’est pas un sujet significatif en terme macro-économique, ce qui ne veut pas dire qu’il faut supprimer les contrôles… au contraire.

Le véritable enjeu macro-économique c’est d’avoir une vision du partage des richesses dans un monde où le travail tel que nous l’avons connu est en voie de disparition pour la simple et bonne raison que votre boulot sera fait soit par un petit Chinois pas cher, soit par un serveur informatique, soit par un robot. Alors comment faire ?

L’autre véritable enjeu est bien sûr de créer du travail autant que faire se peut en axant les politiques économiques sur ce qui n’est ni délocalisable, ni « robotisable » (pour le moment).

Et enfin, nous devons aborder sans plus attendre la façon dont la solidarité nationale s’exprime et les problèmes que cela engendre à long terme en excluant, en les aidant, les gens du marché du travail et de l’effort ce qui nuit plus que fortement à leur « employabilité » sur le long terme.

On ne peut pas accepter en terme intellectuel qu’un bénéficiaire de la solidarité publique gagne plus qu’un smicard, ce n’est économiquement tout simplement pas viable dans l’état actuel de nos modes de fonctionnement.

Monsieur le Ministre, il n’y a pas de travail

Alors pour conclure, je voulais juste rappeler à notre ministre, qui n’a jamais envoyé un seul CV pour chercher un seul vrai boulot comme l’écrasante majorité de notre gouvernement et comme la plus grande partie de la majorité actuelle, qu’il n’y a actuellement tout simplement pas de boulot.

Être chômeur est généralement vécu comme un drame et une déchéance sociale, comme une humiliation. Ceux qui perdent leur boulot ne sont pas « fiers » et ils essaient vraiment d’en retrouver.

Mais dans nos provinces, les usines ferment toutes, les PME suivent et il n’y a plus de boulot. Dans nos grandes villes, y compris à Paris, même pour les cadres la situation est devenue très difficile et rares sont les élus au CDI. D’après les statistiques de votre propre ministère, 85 % des embauches sont réalisées en CDD, 85 % Monsieur le Ministre, alors avant de venir nous faire la leçon, avant de m’expliquer que je suis un tricheur (pas moi, j’ai la chance d’avoir un boulot, mais par exemple ceux de ma famille ou mes proches qui sont au chômage) j’aimerais Monsieur le Ministre qu’une fois, dans votre vie, vous preniez le temps de rédiger un CV sous Word en tapant vous-même, puis de chercher un boulot, un vrai, un travail de « mec », comme chauffeur routier, couvreur l’hiver par -40 ou l’été par +60 sur les toitures, j’aimerais que vous postuliez pour quelques années dans un abattoir pour travailler dans la crasse et la puanteur, ou encore dans une serre pour ramasser des tomates 7h15 par jour (histoire de vous faire apprécier les 35 heures). Je pourrais évidemment multiplier à l’envie ces exemples de boulots de merde dont personne ne veut parce que personne n’en rêve, parce que c’est dur, parce que c’est épuisant, bien plus qu’une sieste sur les bancs de l’Assemblée.

Et pourtant, vous savez quoi Monsieur le Ministre, chaque jour, finalement, ce pays tourne sans vous, les tomates sont ramassées, les poulets vidés, transportés par camion jusqu’à chez vous pour que vous puissiez vous remplir la panse aux frais des con-tribuables alors que vous accusez ceux qui souffrent de tous les maux.

Finalement, à ce rythme-là, je serai bien vite plus socialiste que les socialo, moi qui me pensais social-libéral en fonction des jours, de mon humeur et de mes besoins.

À mes concitoyens chômeurs, ceux qui n’ont pas pu faire la rentrée, je souhaite bon courage et force face à l’adversité, sachez que les ministres, eux, ne font que passer.


- Source : Charles SANNAT

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