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Jeudi, 28 Mars 2024

Affaire Buzyn – La CJR donne-t-elle de premiers signes de partialité en faveur de Macron ?

Auteur : Éric Verhaeghe | Editeur : Walt | Samedi, 11 Sept. 2021 - 10h20

Le Monde révélait hier que Agnès Buzyn était convoquée ce matin pour une première mise en examen, pour mise en danger de la vie d’autrui, devant la Cour de Justice de la République. Effectivement, le 10 septembre au soir, Madame Buzyn est sortie de cette convocation non pas sous le statut de témoin assisté mais mise en examen. Cette première manifestation claire de la Cour de Justice dix-huit mois après le début de l’épidémie pose le problème vital de l’impartialité de la Cour, qui a reçu 14 700 plaintes liées au COVID et n’a pour l’instant procédé à aucune mise en examen… Madame Buzyn est-elle simplement un bouc émissaire commode qui évitera une mise en cause complète du système ?

Agnès Buzyn a bien été mise en examen aujourd’hui, comme l’annonçait Le Monde ! Visiblement, la Cour de Justice de la République s’est intéressée à l’action concrète de la ministre au début de la crise du coronavirus et en a tiré la conviction que ladite ministre s’est rendue coupable d’une mise en danger de la vie d’autrui…

Les questions posées par l’affaire Buzyn

On s’interrogera évidemment ici sur la signification nécessairement politique de cet acte de procédure. Les contempteurs du gouvernement des juges se sont d’ailleurs précipités pour expliquer que le travail des juges n’était pas d’évaluer l’action du gouvernement.

On connaît la musique : alors même que l’état d’urgence a aboli tous les contre-pouvoirs efficaces, il faudrait que notre Constitution soit vidée de son sens en ne convoquant plus la Cour de Justice, seule instance habilitée à juger de la responsabilité des ministres. Au fond, si la justice pouvait ne même plus être une « autorité » (puisque la Constitution gaullienne la qualifie comme telle, et non comme pouvoir à part entière), et se contenter de ne punir que les citoyens ordinaires sans s’attaquer aux puissants, certains en seraient très contents… y compris parmi certaines figures de gauche dont la crise du COVID a dévoilé toutes les vérités profondes.

Reste que le temps nous dira si Agnès Buzyn est la première d’une longue série que la Cour de Justice de la République a l’intention de juger de façon aussi impartiale que possible, ou si la ministre est la simple bouc-émissaire d’un système qui va chercher à étouffer les affaires.

Les amours de François Molins avec Macron

Comme souvent en France, toute la difficulté de l’exercice ne tient pas seulement à l’impartialité de la justice, mais aussi à son apparence d’impartialité, une notion beaucoup plus importante chez les Anglo-Saxons que chez nous.

S’agissant de la Cour de Justice de la République, il faut souligner qu’elle accorde un rôle essentiel au procureur général de la Cour de Cassation, qui est l’équivalent de son « parquetier ». Or ce procureur n’est autre que François Molins, l’ancien procureur général de Paris, bien connu des Français depuis les attentats de 2015.

François Molins, procureur général de la Cour de Cassation

Si les Français ont appris à vivre, à une époque, avec les comptes-rendus précis de François Molins, ils savent que le même procureur ne s’est jamais situé très loin de Emmanuel Macron. Comme la presse l’a révélé à plusieurs reprises, le même procureur a notamment été approché à plusieurs reprises pour devenir ministre, de l’Intérieur ou de la Justice.

Cette circonstance ne signifie pas que François Molins soit aux ordres du pouvoir. Cela signifie seulement que les apparences de l’impartialité ne sont guère respectées à la Cour de Justice, comme elles ne le sont ni au Conseil Constitutionnel, ni au Conseil d’État

L’immense besoin de justice des Français

Une fois de plus (et sauf à accepter la proposition Macron selon laquelle l’avis des Français ne compte plus et n’a aucune importance), l’impartialité de l’État risque donc de s’exposer aux critiques de plus en plus acerbes des opposants à la Macronie, qui s’exaspèrent de voir les contre-pouvoirs disparaître les uns après les autres. Cette situation constitue de notre point de vue un risque politique grandissant, dans la mesure où la soif de justice est immense dans le pays.

Le fait que la Cour de Justice ait reçu plus de 14 000 plaintes sur la gestion de la crise COVID est un bon indicateur de la situation. Le prétoire est, dans l’esprit de beaucoup de Français, le lieu par excellence où le désaccord avec la Macronie doit se régler.

Nous avons eu l’occasion de le dire : l’inconvénient de cette voie, est qu’elle repose toute entière sur des juges qui ne sont pas neutres. Au fond, les Français délèguent aujourd’hui à des magistrats dont la promotion dépend du pouvoir la fonction de réguler les abus de ce même pouvoir. Voilà qui ne peut qu’être déceptif.

Une meilleure solution consiste, selon nous, à mener la bataille politique dans le champ politique, et non judiciaire. Mais il est vrai que la déraison macronienne obligera assez rapidement à recourir à des méthodes de rupture, comme la désobéissance civile, pour établir un rapport de force significatif.


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