Brésil: Le Mondial et la Mafia
La plus grande organisation criminelle du Brésil a menacé de semer la terreur pendant le Mondial 2014 de football et les élections présidentielles et législatives qui se tiendront en octobre de la même année, a révélé, mardi, le quotidien O Estado de Sao Paulo. Le Premier commando de la capitale (PCC), originaire de l'État de Sao Paulo, a promis une «coupe du monde de la terreur» si ses chefs incarcérés dans des prisons de l'État de Sao Paulo étaient transférés et isolés dans d'autres établissements pénitentiaires. Indiscutablement, cette organisation criminelle dispose des moyens de ses déclarations.
Le parquet brésilien a récemment requis l'arrestation de 175 membres du PCC et le transfert dans d'autres prisons de 32 détenus, dont les chefs de cette organisation, actuellement détenus dans le pénitencier de Presidente Venceslau, dans l'État de Sao Paulo. C’est ce que conteste l’organisation criminelle. Le PCC n’est pas n’importe quoi : il brasse 60 millions de dollars chaque année et s'étend au Paraguay et en Bolivie, pays frontaliers d'où provient une grande partie de la drogue vendue par l'organisation.
Créé en 1993 par des trafiquants de drogue incarcérés dans le pénitencier de Taubaté (141 kilomètres de Sao Paulo), le PCC est aujourd'hui présent dans 22 des 27 Etats fédérés du Brésil. L'organisation contrôlerait 135 des 152 prisons de l'Etat de Sao Paulo. Un rapport du Secrétariat national de la sécurité publique du ministère brésilien de la Justice avait déjà indiqué, en 2012, que le groupe était en plein essor. Un autre rapport accuserait le PCC d’être responsable de la vague de violence qui a fait plus de 300 morts en 2012, dont une centaine de policiers. A la veille du mondial 2014, dans le pays où le football est roi, les autorités sont sur les nerfs et le qui-vive pour assurer la sécurité de l’événement. En 2014, tous les regards du monde seront nécessairement tournés vers le Brésil.
De son côté, la présidente Dilma Roussef cherche, par une sorte de plébiscite sur une nouvelle plate-forme programmatique, à reconquérir la popularité perdue depuis les protestations historiques du printemps. C’est le scepticisme qui l’emporte dans la population alors qu’une dégringolade dans les sondages affecte toute la classe politique brésilienne, aussi bien le parti officiel que les partis d’opposition. Trois semaines après les manifestations populaires, les gouverneurs et maires des régions et des grandes villes brésiliennes comme Rio de Janeiro ou Sao Paulo étaient contestés de toutes parts. Le gouverneur de Sao Paulo, Gerardo Alckmin membre du parti d’opposition le Psdb (Partido de la Social Democracia Brasilena) perdit 14 points en juin, passant d’une approbation de 52% à 38%. De son côté, le maire de Sao Paulo, Fernando Haddad du parti officiel, le Parti des Travailleurs de Lula a vu sa côte passée de 34% à 18%. A Rio de Janeiro, le gouverneur Sergio Cabral perdait lui aussi 30 points de popularité (de 55% à 25 %) et le maire de Rio, Eduardo Pacs, 20 points (de 50 % à 30 %), tous les deux appartenant au Pmdb (Partido del Movimiento Democratico), membre de la coalition gouvernementale.
Le peuple ne rejette pas en soi les partis politiques mais il n’a plus confiance en ses politiciens. C’est ce que confirme Aécio Neves, le leader du Partido de la Social Democracia Brasilena et sans doute, futur candidat présidentiel : « il y a une insatisfaction brésilienne continue contre toute la classe politique en général ». Cette insatisfaction brésilienne entraîne un certain immobilisme dans tout le pays. Personne n’ose se lancer, proposer, entreprendre des initiatives. Le Brésil depuis les émeutes est comme paralysé.
Les élections présidentielles au Brésil vont avoir lieu en 2014. Dilma Youssef est toujours donnée gagnante mais 54 % des personnes interrogées ont déclaré ne se reconnaître dans aucun candidat. Le pouvoir de gauche mène une offensive tous azimuts pour répandre l’idée que le gouvernement a bien entendu le message de la rue. Le Brésil souhaite des réformes politiques mais il est terrassé par ce Mondial de football qu’il voit comme le mondial de tous les dangers ! C’est sur ce climat, cette température politique qu’on ressent partout au Brésil que l’organisation criminelle du PCC tente de surfer.
Il était impossible qu’après la crise connue ce printemps dernier par le Brésil, son image politique interne n’en soit pas affectée. Après des manifestations aussi populaires, les gouvernants, que ce soit au niveau municipal, régional ou fédéral, ne pouvaient sortir indemnes de la crise. Le Brésil est donc maintenant entré dans une histoire conjecturale et d’une certaine manière imprévisible. Le Parti Gouvernemental en sera le plus affecté, le peuple ayant misé en lui tous ses espoirs.
Cette semaine, c’est la blessure de Ronaldinho qui inquiète les Brésiliens et son club en vue du prochain Mondial mais pas seulement. La blessure de Ronaldinho inquiète aussi la présidente du Brésil en personne ! Dilma Rousseff, réactivant son compte Twitter, en a profité pour envoyer un message de soutien au meneur de jeu : « Je suis solidaire de Ronaldinho, la star de mon Galo. Notre soutien pour lui permettre d’être prêt pour le Mondial. » Le joueur a répondu mardi sur son compte Twitter en remerciant la présidente. « Avec ce soutien et cette motivation, je ne peux que revenir. Merci pour ce soutien madame la présidente Dilma Rousseff. Je suis concentré sur cet objectif. » Le Brésil, une manière si footballistique d’exister !...
- Source : Metamag