Americans for Peace Now devient le premier groupe sioniste américain à appeler au cessez-le-feu à Gaza
L'organisation de gauche demande à Biden de pousser Israël à passer "de la guerre au maintien de la paix", une fissure dans le large soutien apporté à la campagne par les groupes sionistes.
WASHINGTON (JTA) — Americans for Peace Now, un groupe pro-israélien de gauche, a appelé au cessez-le-feu à Gaza dans la guerre qui oppose actuellement Israël et le Hamas. C’est la première organisation sioniste américaine à le faire à l’issue de plus de trois mois de combats sur le terrain.
« Continuer cette guerre dévastatrice entraîne des risques inacceptables pour Israël, pour les civils gazaouis et pour la région toute entière », a estimé lundi le président du groupe, James Klutznick, dans une déclaration. « Au nom de la sécurité et du bien-être des civils en Israël et à Gaza, l’administration Biden doit pousser Israël à accepter une cessation immédiate des hostilités et à passer de la guerre à la construction de la paix ».
Une déclaration qui révèle l’apparition, peut-être, d’une fissure dans le large soutien apporté par les organisations juives américaines à la campagne militaire d’Israël qui avait suivi l’attaque meurtrière perpétrée sur le sol israélien, le 7 octobre. Jusqu’à présent, les seuls groupes juifs américains à s’être prononcés en faveur d’un cessez-le-feu étaient antisionistes ou non-sionistes, et ils avaient réservé leurs critiques à l’État juif dès le début du conflit actuel. Les autres organisations juives des États-Unis, de droite comme de gauche, avaient exprimé leur soutien à l’effort de guerre israélien.
Depuis le massacre perpétré par les hommes armés du Hamas, le 7 octobre – les terroristes avaient massacré environ 1200 personnes, en majorité des civils, et ils avaient kidnappé 240 personnes, prises en otage dans la bande à Gaza.
Selon le ministère de la Santé placé sous l’autorité du Hamas au sein de l’enclave côtière, 23 000 Palestiniens ont été tués depuis qu’Israël a décidé d’anéantir le Hamas en réponse aux attaques du 7 octobre, en lançant une offensive à grande échelle dans la bande de Gaza. Les chiffres émis par le ministère de la Santé, dans la bande, sont invérifiables et le groupe terroriste ne fait pas de distinction, dans son bilan, entre civils et hommes armés. Israël, pour sa part, estime que plus de 8 500 terroristes ont été tués depuis le lancement de l’incursion terrestre à Gaza, à la fin du mois d’octobre. Un millier d’hommes armés avaient déjà été tués sur le territoire israélien, le 7 octobre et les jours qui avaient suivi.
Le nombre de victimes à Gaza a mis à mal la quasi-unanimité qui prévalait parmi les Juifs américains – comme cela a été également le cas de la rhétorique employée par certains membres d’extrême-droite de la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu. La semaine dernière, l’Union pour le Judaïsme réformé, qui représente le plus important courant religieux des Juifs aux États-Unis, a appelé Netanyahu à mieux contrôler les ministres qui appellent au déplacement des Palestiniens qui vivent à Gaza.
Americans for Peace Now est membre de la CoP ( Conférence des présidents des organisations juives américaines), une coalition de groupes juifs américains qui s’est donnée, en matière de politique étrangère, une mission principale : celle de soutenir Israël. D’autres groupes de gauche appartenant eux aussi à la CoP n’ont, pour leur part, pas encore appelé à mettre un terme au conflit.
J Street, un groupe juif libéral dont les activités portent sur la politique au Moyen-Orient, qui est une référence centrale pour les progressistes américains pro-israéliens, continue aussi, de son côté, à soutenir la campagne militaire de Tsahal. Il a toutefois appelé, ces dernières semaines, à faire davantage pour protéger la vie des civils et il a demandé au gouvernement israélien de rejeter les appels lancés en faveur du transfert des civils hors de Gaza. Il avait émis un avertissement, il y a un mois, disant que si rien ne devait changer à ces deux niveaux, « J-Street ne sera plus en mesure de fournir son soutien organisationnel à la campagne militaire actuelle ».
Les manifestants brandissent des panneaux lors de la Marche pour Israël, sur le National Mall de Washington, le 14 novembre 2023. (Crédit : Daryl Perry)
J Street n’a pas encore mis sa menace à exécution. Mais le groupe a annoncé, la semaine dernière, qu’il n’organiserait pas sa conférence annuelle, cette année, en raison « de la situation dans le conflit en cours » – laissant entendre que les controverses entraînées par la guerre pourraient décourager les participants de venir y assister.
« En raison de la situation dans le conflit en cours, nous avons décidé de reporter à 2025 la prochaine Convention annuelle 2024 », a écrit J Street sur son site Internet. « Si nous sommes déçus d’être dans l’incapacité de tenir notre Convention au mois d’avril prochain comme c’était prévu, nous avons également la conviction que c’est le meilleur moyen de garantir que notre Convention sera aussi importante, dynamique et utile que nous savons qu’elle peut l’être et qu’elle se doit d’être ».
Cette annonce a aussi été notable dans la mesure où elle a impliqué que le groupe s’abstiendra de faire une Convention au cours d’une année marquée par des élections. L’AIPAC (American Israel Public Affairs Committee), le plus important groupe de pression pro-israélien, n’a pas organisé, de son côté, sa Conférence politique annuelle depuis 2020.
J Street est un groupe idéologiquement allié à Americans for Peace Now et les deux organisations étaient intégrées dans « un bloc de la paix » lors du rassemblement pro-israélien massif qui avait eu lieu au National Mall, à Washington, DC., au mois de novembre. Elles avaient toutefois exprimé leur malaise après la manifestation en raison de l’agressivité dont avaient fait preuve certains intervenants et elles s’étaient opposés à la présence de John Hagee, à la tête d’une organisation chrétienne et pro-israélienne de droite, lors de l’événement.
Il y a eu d’autres signes de fissures au sein de la communauté juive israélienne. Au mois d’octobre, peu après l’attaque commise par le Hamas, les démocrates juifs, à la Chambre américaine des représentants, avaient émis un communiqué saluant et appuyant le soutien sans faille apporté par le président Joe Biden à Israël – un communiqué qui avait été signé par tous les Démocrates juifs siégeant au sein de l’institution. Au mois de décembre néanmoins, un certain nombre d’entre eux ont rejoint les appels au cessez-le-feu – et notamment l’un des initiateurs du communiqué qui avait été émis au mois d’octobre, le représentant Jamie Raskin du Maryland.
Photo d'illustration: Les manifestants brandissent des pancartes disant : « Pro Israël, Anti Hamas ; Pro Peace, Anti Bibi' alors qu'ils assistent au rassemblement de la Marche pour Israël, le 14 novembre 2023, au National Mall de Washington. (Photo AP/Jacquelyn Martin)
- Source : The Times of Israël (Israël)