Assange va être « transféré » sine die
Très mauvaise nouvelle pour ceux qui se soucient encore de la liberté de la presse et de ce que le sort de Julian Assange signifie pour l’artefact-Premier amendement ajouté à la Constitution américaine il y a 240 ans. La Haute Cour britannique vient d’annoncer qu’elle entendra l’appel américain d’une décision d’un tribunal inférieur contre l’extradition de Julian Assange. Godot arrivera probablement avant que les États-Unis et le Royaume-Uni ne terminent la pantomime juridique qui prive Assange de sa liberté.
La décision de la Haute Cour consolide le statut de la Grande-Bretagne en tant qu’État vassal des États-Unis, au mépris de l’héritage de 800 ans de la Magna Carta. Donnant un mauvais nom à l’hypocrisie obséquieuse, l’annonce de la Haute Cour intervient une semaine et demie après que le principal témoin du dernier acte d’accusation d’Assange se soit rétracté.
Il n’est pas surprenant que les fonctionnaires de la « Justice » britannique suivent l’approche détaillée du « Manuel de Washington » qui a été exposée par l’organisation WikiLeaks elle-même en février 2012.
Certains lecteurs se souviennent peut-être que les courriels confidentiels de la société de renseignement privée américaine Stratfor, révélés par WikiLeaks, mentionnaient que les États-Unis disposaient déjà d’un acte d’accusation secret contre le fondateur de WikiLeaks. Assez mauvais.
Inspecteur Javert
Ce qui ressort également des courriels de Stratfor, c’est l’approche implacable, de type Inspecteur Javert, adoptée par un certain Fred Burton, vice-président de Stratfor chargé du contre-terrorisme et de la sécurité des entreprises. (Burton avait été chef adjoint de la division antiterroriste du Département d’État pour le Service de sécurité diplomatique).
Voici Javert – je veux dire Burton :
« Transférez-le [Assange] d’un pays à l’autre pour qu’il fasse face aux accusations pendant les 25 prochaines années. Mais saisissez tout ce que lui et sa famille possèdent, y compris toute personne liée à Wiki. » [mon commentaire : « de pays à pays », ou – tout aussi efficace – de tribunal à tribunal]
« Poursuivez les accusations de conspiration et de terrorisme politique et déclassifiez la mort d’une source, quelqu’un qui pourrait être lié à Wiki ».
« Assange est un pacifiste. Il faut lui plonger la tête dans une cuvette de toilette pleine à Gitmo (Guatanamo Bay) ».
« Faites sauter l’argent. Poursuivez son infrastructure. Les outils qu’on utilise pour coincer et déconstruire Wiki sont les mêmes que ceux utilisés pour démanteler et traquer Al-Qaïda ».
« Mettez d’abord ce connard en faillite ; ruinez sa vie. Donnez-lui 7 à 12 ans pour conspiration ».
« Assange va se faire une belle mariée en prison. On *mmerde le terroriste. Il va manger de la pâtée pour chat pour toujours… l’extradition vers les USA est de plus en plus probable ».
Published by WikiLeaks in 2012: Correspondence from private security contractor Stratfor on how to handle arrest of Julian #Assange
— WikiLeaks (@wikileaks) July 8, 2021
"Pile on. Move him from country to country to face various charges for the next 25 years.." https://t.co/8gAOsF4dGQ pic.twitter.com/iUO4IkdKEL
Des gens bien – qui ont prêté serment de « soutenir et défendre la Constitution des États-Unis contre tous les ennemis étrangers et nationaux ». Puisque les comparaisons sont injustes, je présente mes excuses à « Javert » et à Victor Hugo.
Pendant ce temps, à Belmarsh
On ne sait pas si des gens comme Fred Burton ont pu dicter le menu de Julian Assange (mais qui en serait surpris ?). Ce qui est clair, c’est qu’à moins qu’une grande campagne populaire ne prenne de l’ampleur, et rapidement, Julian risque d’être déplacé d’un tribunal à l’autre, d’une prison à l’autre – le tout sous couvert de la loi – jusqu’à ce qu’on détruise ce qu’il reste de lui. C’est une triste pantomime, un simulacre de justice. On dirait Les Misérables !
Comme l’a souligné le rapporteur de l’ONU pour la torture, Nils Melzer, Julian Assange est soumis à la torture psychologique, au vu et au su du reste du monde. Et, aussi répréhensible que soit ce crime, l’enjeu est encore plus grand pour les démocraties, qui ne peuvent exister sans des médias libres.
Samedi dernier, Julian Assange a « célébré » son 50e anniversaire dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, à Londres. On m’a demandé d’enregistrer un message qui serait diffusé à haute voix lors de la manifestation de soutien à Julian devant la prison ce jour-là. Voici l’enregistrement. Pour ceux qui n’apprécient pas mon chant, le discours de 8 minutes est transcrit ici.
Traduction par Aube Digitale
- Source : AntiWar.com (Etats-Unis)