Ukraine : il est temps pour l’UE et la Russie de défendre ensemble des intérêts qu’elles ont en commun
Contre les accords de Minsk et sans tenir compte des propositions des représentants des républiques populaires de Donetsk et Lugansk, le Président ukrainien refuse d’introduire un statut spécial pour le Donbass dans la Constitution. L’UE et la Russie devraient en tirer, ensemble, les conclusions qui s’imposent.
Piotr Poroshenko a présenté les modifications envisagées de la Constitution ukrainienne en ce qui concerne la tant attendue réforme territoriale. Il annonce pompeusement que contrairement à son voisin, il faut entendre la Russie, pays totalitaire, il prévoit une réforme territoriale qui ne pourrait exister dans une dictature puisque en gros elle prévoit un schéma très classique de décentralisation du pouvoir avec une auto-administration locale ... comme il en existe en Russie en fait. Des conseils locaux, des responsables élus, un budget local. Bref rien d’exceptionnel, mis à part les effets de manche politique.
Car pour présenter une copie plutôt bâclée, le Président ukrainien tape sur tout ce qui l’entoure. La Russie, c’est normal, d’autant plus qu’il a du mal à expliquer en quoi les systèmes de décentralisation diffèrent sur le fond. Et surtout pour faire oublier qu’il n’a pas respecté les accords de Minsk, car il ne prévoit aucun statut particulier pour le Donbass et n’a pas tenu compte des propositions faites par les concernés. A tel point que même le Ministère français des affaires étrangères suggère délicatement que peut-être toutefois en y regardant bien mais sans être sûr car il pourrait aussi en être différemment peut être donc ce texte ne serait pas conforme aux accords de Minsk.
C’est un acte de courage incroyable qu’il est important de souligner, d’admirer, d’applaudir, que dis-je, d’ovationner. Rien de moins. Car finalement il n’est suivi d’aucun résultat. Pour la simple et bonne raison que ni la France, ni l’Union européenne, n’ont d’influence sur la politique ukrainienne, ce ne sont pas eux qui décident. Ce que P. Poroshenko affirme vertement en parlant de la demande faite par l’Union européenne à l’Ukraine de respecter les accords de Minsk et de reconnaître un statut spécial au Donbass :
« Aucune pression sur l’Ukraine, sur le pouvoir ukrainien et sur moi personnellement n’est envisageable, car je ne permettrai pas une telle pression, parce que je suis le Président, le garant de la Constitution ukrainienne et nous prendrons notre décision uniquement en tenant compte des intérêts de l’Ukraine. »
Autrement dit, pour ceux qui n’auraient pas compris, sous cette gouvernance, l’intérêt de l’Ukraine est de récupérer le Donbass par la force, de ne pas négocier et de ne pas trouver de solution politique au conflit. A l’inverse, il faut faire durer le conflit. Evidemment ni la Russie, ni l’UE n’ont intérêt à un tel scénario, mais ont-elles le choix ? Le moment semble arriver pour ces deux entités de reprendre la main et de s’allier pour défendre des intérêts qu’ils ont en commun, contre une division voulue qui les affaiblit.
- Source : Karine Bechet-Golovko