Affaire Taubira : la palabre est à la défense
L’invitée politique de la dernière émission de Laurent Ruquier était Christiane Taubira. Le petit monde de l’entre-soi frétillait. On regrette Zemmour car Léa Salamé, en contradicteur supposé, a bâclé le travail.
Après l’introduction complaisante du présentateur, le garde des Sceaux s’est déchaîné dans l’emploi de ce qu’Orwell appelait la « novlangue », des mots vides de sens pour décrire une réalité sordide.
Sur les attentats de janvier, elle évoque doctement « des temps difficiles, des temps funestes ». Elle a confirmé ne pas avoir voulu s’exprimer dans les médias à chaud, ne voulant jamais disperser sa parole. Bizarrement, ses nombreux « tweets », parfois en créole, n’ont pas été rappelés.
Si les Français jugent négativement son action et l’accusent de laxisme, selon un récent sondage, elle le qualifie d’« incontestablement malveillant ». Ruquier a alors volé à son secours en avançant que cette opinion négative pouvait s’expliquer par son silence. Réponse (surprenante) du ministre : « Oui, sans aucun doute. »
Mme Taubira assume totalement sa « politique pénale », à ce détail près que les Français en supportent les conséquences.
Selon elle, la France n’est pas dans une guerre de civilisation. Il y a juste des erreurs dans les politiques publiques. Lesquelles ? Désolée, l’heure n’est pas au bilan parce qu’il y a urgence à « retisser le lien social ». Circulez, il n’y a rien à voir !
L’existence de « foyers de radicalisation », d’un communautarisme, qu’elle admet enfin, s’explique par le retrait de l’État de certains quartiers. Alors, forcément, « les gens s’organisent ». Sa méthode pour réduire les problèmes est d’installer des quartiers dédiés aux plus radicaux dans les prisons. Elle veut protéger la population carcérale des influences et déradicaliser, dans la mesure du possible. Les Français sont censés être rassurés par ce bric-à-brac.
Il ne faut pas stigmatiser. Il faut des animateurs de rue, des éducateurs sociaux, une politique de la ville. En deux ans et demi, on ne peut pas rattraper les erreurs du passé. La décennie de l’UMP aux commandes est à la racine du mal. La droite avait hypocritement fait voter des lois plus sévères tout en procédant à l’aménagement des peines. Lorsque Léa Salamé lui a fait remarquer que, depuis trois ans, la situation s’aggravait, le ministre est resté sans voix.
Pour finir, nous avons eu droit au rappel des vieilles lunes (Blum, Jaurès) par Aymeric Caron gloussant, constamment aux anges. Ils se sont entendus sur la défaite culturelle de la gauche, due à un discours « sommaire » qui convainc les Français.
Christiane Taubira a alors décoché sa dernière flèche, toute en menaces : la gauche est peu audible donc il faut « percer la roche obstinément pour arriver à faire réentendre cette conviction que la gauche a et son patrimoine d’actions publiques ».
- Source : Eric Le Gal