La manipulation des cours de l’or par les banques centrales (Vidéo)
Bonsoir à tous et bienvenue au "Larry Parks Show". Nous avons l’honneur et le plaisir de recevoir ce soir Chris Powell. Chris est l’éditeur du Journal Inquirer, à Manchester (Connecticut), et le secrétaire-trésorier du Gold Anti-Trust Action Committee, également connu sous l’acronyme de "GATA". Bill Murphy et Chris ont fondé le GATA en 1999, en vue d’exposer la manipulation du marché de l’or par les banques centrales occidentales, via leurs agences, les banques d’affaires. Il écrit des chroniques politiques pour des journaux du Connecticut, ainsi que pour le Providence Journal (Rhode Island). Il est aussi l’éditeur du GATA Dispatch, le journal électronique quotidien de l’organisation.
Larry Parks: Chris, merci beaucoup de participer à notre émission.
Chris Powell: Ravi d'être ici.
Larry Parks:Avant de commencer, parlez-nous un peu du GATA…
Chris Powell: Nous avons fondé le GATA car nous suspections le marché de l’or d’être manipulé. Notre président, Bill Murphy, un ancien trader sur les marchés à terme, a fondé un site internet, lemetropolecafe.com, fin 1998, qui couvre en grande partie les marchés de l’or et de l’argent.
En s’intéressant de prés aux marchés de l’or et de l’argent, il a commencé à remarquer certaines activités étranges… Il semblait que les prix de l’or et de l’argent étaient régulièrement martelés à la baisse par les mêmes entités à chaque fois qu’ils approchaient des seuils critiques. Et, en tombant sur son site internet, j'ai réalisé que certaines activités allaient à l’encontre des lois antitrust, que je connais bien. Je lui ai dit qu’au lieu de se plaindre de la chose, il fallait agir… que si quelqu’un voulait fonder un comité, engager des avocats et poursuivre ces ‘salauds’, j’y investirais $500. Il a trouvé que c’était une bonne idée, et le GATA a été constitué selon le droit du Delaware, en janvier 1999.
Nous avons passé presque deux ans à colliger des documents et à comprendre l’histoire de la manipulation et nous nous sommes rendu compte qu’il ne s’agissait pas d’un schéma typique de fixation des prix par des sociétés privées, mais plutôt d’une politique gouvernementale menée en secret via des intermédiaires.
Larry Parks: Politique gouvernementale aux États-Unis, ou politique gouvernementale dans le monde entier ?
Chris Powell: C’est certainement une politique gouvernementale dans le monde occidental. Cela se faisait ouvertement… le London Gold Pool était un système coordonné de contrôle du prix de l’or qui opérait ouvertement, orchestré par les États-Unis, le Royaume-Uni et cinq ou six de leurs alliés en Europe de l’ouest. Ce système a fonctionné jusque dans les années ’60 en contrôlant le prix de l’or via la diminution coordonnée des réserves d’or des banques centrales. Mais il s’est effondré en mars 1968 car ils commençaient à manquer d’or en essayant de garder le prix de l’or à $35 l’once au moment où l’inflation explosait dans le monde entier, et cela devenait trop difficile à contenir.
Donc, le gouvernements et les banques centrales qui tentent de contrôler le prix de l’or, c’est une vieille histoire. Cela se faisait officiellement et honnêtement, mais maintenant cela se fait de manière secrète, via des intermédiaires.
Larry Parks: Tout cela a-t-il un rapport avec les accords de Bretton Woods ? expliquez-nous…
Chris Powell: Oui. Les accords de Bretton Woods, en 1944, ont établi le dollar us comme monnaie de réserve internationale en le fixant au prix de l’or. Le gouvernement américain a ensuite réalisé qu'il n'avait pas besoin de maintenir la valeur du dollar aussi stable que l'or, mais seulement de prétendre qu’il valait autant. Alors ils ont continué à imprimer des dollars, à inonder le monde… et le déséquilibre entre la quantité de dollars et la quantité d’or dans le monde a finalement eu raison du London Gold Pool, en mars 1968.
Larry Parks: C'était à une époque où il était encore illégal pour les américains de détenir de l'or mais cela était lié au fait que les gouvernements étrangers et les banques centrales pouvaient encore convertir leur dollar en or.
Je pense que ce que vous voulez dire est que les banques centrales avaient l'intention de manipuler le cours de l'or en coordonnant les achats et ventes.
Chris Powell: Oui… c’était fait ouvertement. Et s’ils veulent le faire ouvertement aujourd’hui, qu’ils le fassent, mais les gens doivent savoir qu’ils manipulent le marché de l’or.
Les gens ne réalisent pas, mais le Gold Reserve Act (GRA) de 1934, amendé dans les années ’70, donne au gouvernement américain le droit d'intervenir secrètement sur le marché de l’or. Le gouvernement américain, ou son Trésor, via l’Exchange Stabilisation Fund, est également autorisé à intervenir secrètement sur tous les marchés. Il s’agit d’un extraordinaire pouvoir totalitaire. Mais si vous allez sur le site du Trésor américain, à la page Exchange Stabilisation Fund, vous y découvrirez que le gouvernement est pleinement autorisé à intervenir secrètement sur n'importe quel marché.
Il y a quelques semaines, des documents archivés à la Commodities and Futures Trading Commission (CFTC) ont été dévoilés. L’un des documents révèle que CME Group, opérateur majeur du marché des contrats futures, offre des rabais en fonction des volumes à des banques centrales qui négocient ces contrats sur les marchés. C'est sans précédent, c’est nouveau… des banques centrales qui échangent secrètement sur les marchés américains ! Et les médias n'en parlent pas ! La déclaration 10-k de CME Group, remplie cette année pour la Securities and Exchange Commission (SEC), démontre qu'il y a des banques centrales et des gouvernements parmi les clients de CME Group ! Selon moi, c'est un scandale.
Une confirmation, par des documents officiels du gouvernement américain, et c’est aussi sur le site de la CFTC, que les banques centrales opèrent secrètement sur tous les marchés à termes importants. Cela équivaut à dire qu’il n’y a plus de marchés, mais uniquement des interventions des banques centrales pour manipuler le prix de chaque instrument financier, de chaque matière première… mais les médias ne s’y intéressent pas !
Larry Parks: Ça fait peur… d’une certaine façon, selon moi, cela a à voir avec le transfert de richesse des gens ordinaires vers le système bancaire. Et, en fait, vous parlez de la collusion entre le système bancaire et les banques centrales pour générer des profits sur le dos des gens ordinaires; C'est bien ça ?
Chris Powell: Oui, Larry, je pense bien. Vous savez, les portes tournantes entre le gouvernement et les grosses banques d’investissement poussent à se demander s’il y a une différence entre l’industrie bancaire et le gouvernement. Est-ce que le président de Goldman Sachs sait vraiment à quel moment il travaille pour la banque ou pour le gouvernement, en tant que secrétaire au Trésor ? Ce sont tous les mêmes personnes... ils font des va-et-vient entre le gouvernement et les banques. Le gouvernement ne travaille pas pour les gens ordinaires, mais bien pour l’industrie bancaire. L’objectif du gouvernement est de maintenir la profitabilité et la domination politique du secteur bancaire, j’en ai bien peur.
Larry Parks: Je crois que vous avez raison… il y a environ un mois nous avons reçu dans cette émission un dénommé Charles Calomiris, qui enseigne à Columbia (NY). Il a écrit, avec le professeur Stehen Haber, un livre magnifique, "Fragile by design", dans lequel il parle d’une entente entre les politiciens et les banques dans tous les pays. Je lui ai dit que si j’avais eu à intituler ce livre, le titre aurait été "Dishonest by design", et j’aurais décrit cette collaboration entre les banques et les politiciens comme un complot criminel gigantesque.
Chris Powell: Vous avez raison… je crois que c'est moralement répugnant. Plus notre organisation se penchait sur ces « interventions » sur le marché de l’or, plus nous réalisions que ça fait tout simplement parti de l'histoire. C'est la manifestation du conflit entre la classe productrice et les financiers, un conflit qui a toujours existé... et nous sommes tombés dans une nouvelle manifestation. J’espère qu’un jour la classe productive prendra conscience que les financiers abusent d'eux, et que les marchés redeviendront libres.
Larry Parks: Nous y reviendrons… mais je voudrais que vous me disiez pourquoi les banques centrales s’intéressent-elles à l’or ? Dans quelle logique ? Officiellement, elles ont sorti l’or du système monétaire; elles ont modifié un article du FMI en 1978 afin d’empêcher les pays membres d'adosser leurs devises à l’or… et maintenant qu’il ne fait plus partie du système monétaire, pourquoi manipulent-elles le prix ?
Chris Powell: Parce l’or est la monnaie ultime. Et ils le savent… l’or reste une monnaie. Peut-être qu’ici, aux États-Unis, nous l’avons oublié, mais en Inde, en Asie, au Moyen-Orient, les gens savent que l’or est une monnaie, et ils le traitent ainsi, car il est toujours susceptible de redevenir de la monnaie, car c’en est véritablement une… L’or peut potentiellement devenir la monnaie mondiale. C'est une monnaie qui concurrence les autres monnaies émises par les banques centrales.
De plus, la littérature académique disponible, incluant un essai de Larry Summers, qui est devenu secrétaire au Trésor, après avoir écrit cet essai alors qu’il était à Harvard, démontre qu’il existe une longue relation entre le prix de l’or et la valeur des devises et les taux d’intérêt. Généralement, il y a une relation inverse entre le prix de l’or et les taux d’intérêt. Les gouvernements veulent que les taux d’intérêt soient bas et que le prix des obligations soit élevés. Pourtant, la littérature académique dit que cela nécessite un bas prix de l’or pour que les taux d’intérêt soient bas… excusez-moi, je veux dire un prix de l’or élevé pour que les taux d’intérêt soient bas par rapport au marché. L’or est vraiment un élément déterminant, il donne une valeur aux devises et au prix des obligations; C’est pourquoi les banques centrales haïssent l’or : parce qu’il limite leur puissance. Si les gens se tournaient vers l’or car c'est une meilleure devise, alors les devises émises par les banques centrales se déprécieraient progressivement, les taux d’intérêt grimperaient, la valeur des monnaies gouvernementales chuterait et les banques centrales perdraient de leur pouvoir… c’est un conflit pour le pouvoir…
L’or est, potentiellement, la monnaie du peuple. Les banques centrales, les gouvernements ne veulent pas cela. Les banques centrales et les gouvernements veulent être en mesure de contrôler tous les prix dans l’économie.
Larry Parks: Bien dit ! Nous parlions de transfert de richesse… nous voyons la richesse être transférée des gens ordinaires, ceux qui produisent, vers les banques commerciales, les banques privées. Et, selon nous, l’or se met en travers de leur chemin. Quand les banques prêtent, elles font beaucoup d’argent, mais avec l’or comme monnaie elles ne pourraient pas le faire. N’est-ce pas ?
Chris Powell: Oui, définitivement. La vertu de l’or est cette restriction qu’elle impose au système financier. L’or est beaucoup plus limité que les devises des gouvernements. Les gouvernements ont trouvé un moyen de détruire cette finitude de l’or en émettant des certificats d’or, des prêts d’or, des swaps… ils ont créé une quantité presque infinie d’or-papier dans le but de détruire l’or dans sa forme finie, limitée, de monnaie.
Les gens pensent qu’il y a probablement cent fois plus d’or que ce qu'il y a en réalité, car les banques centrales ont soutenu ce système d’or-papier. Encore une fois, c’est la vertu de l’or : la finitude de son offre, dans le sens qu’il ne peut être créé aussi facilement que les devises des gouvernements (il ne peut pas être créé à partir de rien). Les gens peuvent se tourner vers l'or quand les devises des gouvernements sont dévaluées.
L’or est le grand ennemi des banques centrales et il reflète l’irresponsabilité des gouvernements. J’irais même jusqu’à dire que d’empêcher le prix de l’or de monter est un des objectifs majeurs et ce, depuis très longtemps, de la politique étrangère et de la politique monétaire des États-Unis.
Larry Parks: Je crois que cela pourrait être vrai ! Nous avons remarqué autre chose… un américain, une icône de l’investissement, qui n’aime pas trop l’or, a souligné les dangers de la monnaie papier. On parle, évidemment, de Warren Buffett. Dans le rapport 2012 de Berkshire Hathaways, il explique pourquoi les instruments financiers libellés en devises, il parle des bons du Trésor, sont les endroits les plus risqués, les plus dangereux où placer son argent. Et c’est l’or qui indique le mieux ce danger… êtes-vous d’accord avec cela ?
Chris Powell: Oh, oui ! L’or est le baromètre du système dans son ensemble. Il est la mesure de toutes les devises, des bons du Trésor et de la solvabilité des gouvernements, c’est vraiment la raison pour laquelle il doit être manipulé. C’est un garant de la liberté… c’est une monnaie vers laquelle les gens devraient pouvoir se tourner s’ils ne font pas confiance aux autres devises. Le but des banques centrales occidentales et des Trésors occidentaux, et ce depuis longtemps, est d'enlever cette option aux populations, afin de les garder prisonniers du système monétaire du gouvernement.
Larry Parks: Je pense qu’ils font ça… je crois que les banques font ça… afin d’augmenter leurs profits, ne croyez-vous pas ?
Chris Powell: Certainement. L’industrie bancaire a carte blanche pour créer de la monnaie à l'infini, du crédit à l'infini, des instruments financiers à l'infini pour arnaquer les gens et leur soutirer leurs économies… c’est évident.
Larry Parks: Dans une séquence vidéo diffusée dans cette émission, Dick Durbin, le Majority Whip (au Congrès), dit que les banques « possèdent » le Congrès.
Chris Powell: Oui, les banques possèdent le Congrès. J’aimerais bien que le sénateur Durbin écrive une lettre au département du Trésor américain leur demandant d'expliquer clairement la position du gouvernement sur l’or, le marché de l’or, et les interventions dont nous sommes témoins au quotidien, comme le démontrent les documents de la CFTC et de la SEC. Si le sénateur Durbin est vraiment contre l’industrie bancaire, il lui suffit d’écrire une ou deux lettres au gouvernement et au département du Trésor pour exiger ces informations, et alors le système pourrait changer.
Larry Parks: Mais il n’est pas contre l’industrie bancaire… il fait partie des membres du Congrès que les banques ont dans leurs poches.
Chris Powell: Vous avez probablement raison…
Larry Parks: Non, pas probablement, mais certainement. Il a été au Banking Committee, sa campagne a été financé par les banques… et il ne fait que dire "oui, mais c’est comme ça…". J'ai une vidéo du sénateur, et Robert Kaiser, qui est déjà venu dans cette émission, a écrit un livre, "Act of Congress", au sujet de la loi Dodd-Frank, dans lequel il cite également cette phrase du sénateur Durbin. Dans la vidéo, on voit que Durbin sort cette phrase sans avoir l’air de se plaindre de la situation, mais il semble tout simplement dire que c’est comme ça. Il ne semble pas prêt à y faire quelque chose. Vous avez accompli un gros travail au GATA pour exposer les preuves de cette manipulation… Pourriez-vous nous en parler un peu ?
Chris Powell: C’est la partie la plus importante de notre travail. Nous amassons, colligeons et publions des documents officiels qui prouvent que les banques centrales occidentales interviennent secrètement sur le marché de l’or.
Nous avons des témoignages de plusieurs de ces banquiers, incluant quatre anciens présidents de la Fed, l’ancien président de la Bank for International Settlements (BIS, ou Banque des Règlements Internationaux), Jelle Zijlstra, qui était en même temps président de la banque centrale des Pays-Bas, et une déclaration de l’ancien économiste en chef de la BRI, William R. White, qui a dit, dans un discours de 2005, que « contrôler » le prix de l’or constituait un des objectifs primordiaux de ces banques.
Nous nous sommes procuré le Secret Staff Report du FMI de mars 1999, qui indique que les banques centrales occidentales voulaient impérativement cacher leurs opérations de prêts et de swaps d’or, car les faire en toute transparence via des comptes réguliers les empêcherait d'intervenir secrètement sur le mécanisme de fixation des prix de l'or et des devises.
Nous avons même une présentation Powerpoint qu’a faite la BRI pour les futurs membres de la banque centrale, dans laquelle elle vante ses services. Et, parmi ces services que la BRI vante à ses clients potentiels, les banques centrales, figure l’intervention secrète sur le marché de l’or ! Et nous avons cette présentation Powerpoint sur notre site internet.
Larry Parks: Pour nos auditeurs, quelle est l’adresse du site ?
Chris Powell: C’est GATA.org. Si vous allez dans la colonne de gauche du site, vous y trouverez une section nommée « The basics », qui contient un résumé de l’accord de suppression du prix de l’or et son but, et il y a une section « Documentation » dans laquelle nous conservons tous les documents officiels du gouvernement, les entrevues, les dossiers des procédures, etc. qui confirment que les banques centrales interviennent quotidiennement sur le marché de l’or. Il ne s’agit pas d’une théorie du complot, mais bien de documents officiels… et plusieurs de ces documents proviennent du site internet du gouvernement, et ils y sont encore !
Cela me dépasse, je trouve cela étonnant, car c'est un projet journalistique assez simple à réaliser. J’ai certaines aptitudes pour cela parce que j’ai été dans le journalisme pendant 45 ans, à peu près. Mais l’histoire est là, accessible à tous ! Il suffit de jeter un coup d’œil à la documentation et poser certaines questions spécifiques aux banques centrales. Par exemple, demander à la Bundesbank : "Peut-on voir l’historique de votre compte d’or à la BRI ?", ou encore "Avez-vous effectué des swaps d’or avec les États-Unis ou une agence américaine ?". La même question pourrait être posée à la Fed et au département du Trésor : "Laissez-nous voir le détail de votre compte d’or à la BRI et de vos swaps d’or." La Fed l’a d’ailleurs admis lors du litige qui nous a opposé dans notre poursuite basée sur le Freedom of Information Act. Mais si vous posez des questions très directes aux banques centrales au sujet de leurs interventions sur le marché de l’or, elles vous enverront balader ! Elles ne lâcheront pas d’informations… les lieux de stockage et l'état actuel de l'or des banques centrales, est un secret bien plus sensible que les plans pour la fabrication d’armes nucléaires.
Larry Parks: C’est remarquable. Mais, premièrement, je voudrais vous remercier pour tout le travail que vous effectuez avec le GATA. Vous avez rendu service à beaucoup de personnes à travers le monde.
Chris Powell: Merci…
Larry Parks: Au sujet de le BRI… nous avons fait une émission récemment, dans laquelle nous avons mentionné un livre, Tower of Basel. Vous connaissez ce livre ?
Chris Powell: Non, mais il y a effectivement une tour à Bâle, en Suisse…
Larry Parks: Une des choses qui ressort dans ce livre est que la BRI est souveraine… elle exerce sa souveraineté comme si c’était un pays. Ils n’ont pas à se justifier auprès de qui que ce soit. Ils se considèrent comme une alarme incendie. Ils sont là pour éviter que les incendies se déclenchent. Et ils semblent très fiers du fait que leurs données soient confidentielles. Mais changeons de sujet pour un moment. Ceux qui ont le plus souffert de toute cette manipulation du prix de l’or sont les producteurs, les compagnies minières. Et, ces dernières années, leur capitalisation boursière est passée de quelque $500 milliards à moins de $130 milliards, environ. Comment se fait-il qu’ils n’ont pas réagi ? Pourquoi n’ont-ils pas participé à ce combat contre la manipulation ?
Chris Powell: Je peux vous donner deux raisons pour lesquelles il est très difficile pour eux de le faire. même si je pense qu’ils devraient faire quelque chose. Vous savez, c’est une question de mourir debout ou à genoux. Mais je crois qu’il y a deux choses. Premièrement, aucune industrie n’est plus vulnérable aux règlementations gouvernementales ou à l’expropriation que l’industrie minière. l’industrie minière dépend du gouvernement pour les permis, les claims miniers, les brevets, l’application des lois sur l’environnement, le versement des redevances… Le gouvernement peut fermer n'importe quelle mine à tout moment, sous n'importe quel prétexte, que ce soit les redevances, les brevets d’exploitation ou les régulations environnementales. L’industrie est totalement à la merci du gouvernement.
Deuxièmement, il s’agit de l’industrie qui a la plus haute intensité de capital au monde. Il est quasiment impossible de construire une mine digne de ce nom pour un montant inférieur à plusieurs milliards de dollars. Cela nécessite un financement via les plus grandes banques mondiales d’investissement, qui sont clairement les agents des banques centrales. Et la grande majorité des banques ne veulent pas des restrictions que l’or imposerait au système financier.
Quand je demande aux minières de participer au combat contre la manipulation de l’or par les banques centrales occidentales, c’est un peu comme si je leur demandais de se tirer une balle dans le pied… parce que ça ne plaira pas au gouvernement et à leurs banquiers… l’industrie minière est vraiment impuissante à ce niveau là. Mais, d'un autre côté, comme vous l’avez souligné, il y a l’effondrement de la valorisation de l’industrie minière…
Larry Parks: Vous parlez des minières aurifères…
Chris Powell: Oui, bien sûr. Mais si un bout de papier sur lequel est écrit le mot "or", émis par une banque d’investissement et, soit-disant, garanti par la banque centrale, a autant de valeur qu’un morceau de métal, plus personne n’a besoin de l’industrie minière ! Si les investisseurs sont contents de détenir un morceau de papier à la place de l'or physique, l’industrie aurifère peut tout simplement fermer boutique. Ce qui déplace le problème hors de l’industrie aurifère elle-même, vers les investisseurs. Cette suppression des prix de l’or – et aussi de l’argent – prendra fin seulement quand les investisseurs refuseront d’accepter du papier à la place du métal. Mais aussi longtemps qu’ils accepteront du papier… l’or-papier continuera d'être imprimé à l'infini.
Larry Parks: Nous avons fait une émission sur comment protéger ses économies et se préparer à la retraite, et nous suggérions d’acheter des pièces d’or American Eagle. Nous avons insisté sur la livraison, sur la nécessité d'en prendre possession, pour les raisons que vous avez mentionnées. Le GATA a réalisé un gros travail sur l’effet de levier « papier » dans le marché de l’or… pourriez-vous nous en parler ?
Chris Powell: Il est désespérant de voir que malgré sa grande appréciation, de $260 en 1998 jusqu’à $1,200 environ aujourd’hui, en passant par $1,900, l’or n’a pas suivi le CPI (indice des prix à la consommation). Mais il y a une explication à cela : c’est le développement de ce marché d’or-papier, l’émission infinie de certificats sur de l’or qui n’existe pas. C’est ce qui explique la suppression du prix. J’ai entendu des témoignages lors des audiences de la CFTC, il y a quelques années, disant que l’effet de levier (déconnexion entre les marchés « papier » et physique) était d’environ 100:1. Il y a environ un an et demi, la banque de réserve de l'Inde a mené sa propre étude et est arrivée à un ratio de 92:1. Cela suggère que le prix réel de l’or, si tout cet or imaginaire était enlevé de l’équation, serait de 92 à 100 fois plus élevé qu’aujourd'hui.
Je crois qu’il y a de l’espoir pour l’industrie aurifère, qu’il y a de l’espoir pour l’or en tant que monnaie, et je crois qu’il y a l’espoir que l’humanité se sorte de ce système monétaire fiduciaire, quand elle se rendra compte que ce système n’agit pas de manière responsable. Mais j’ai bien peur que cet espoir réside en Asie, pour le moment, car on n’en parle pas du tout dans la presse financière occidentale.
Larry Parks: Cela me rappelle le Gold Reserve Act de 1934, quand ils ont dit que l’adossement du dollar sur l’or devait être de l’ordre de 40%... mais vous dites qu’il n’y aurait même pas 1% d’or, non seulement derrière le dollar, mais sur tout ce qui est basé sur l’or ou qui promet de l’or ?
Chris Powell: C’est une fraction de tout l’or-papier qui existe… on ne sait pas exactement. On peut seulement comparer les volumes de transactions sur les marchés à terme. On se fie à ce que les experts ont dit à la CFTC, ce que la banque centrale indienne a calculé. Le niveau d'or physique qui soutient les réclamations de règlement de contrat papier en or physique est extrêmement bas. Le ratio de réclamations-papier vs l’or physique est probablement de 50, 60, voire 70 pour 1. Éventuellement, c’est l’Asie qui va mettre fin à tout cela. L’Asie est en train de développer ses propres bourses de métaux précieux…
Larry Parks: En Chine…
Chris Powell: Oui, la Chine en particulier. Un banquier de la banque centrale de Russie, en 2004, a fait un discours devant le London Bullion Market Association, à l’hôtel Kempinski de Moscou et les seuls mots qu’il a prononcés en anglais étaient ‘Gold Anti-Trust Action Committee’. Nous avons finalement mis la main sur ce discours : il disait aux banquiers londoniens que la Russie était au courant que les banques centrales occidentales manipulaient le prix de l’or, que cela allait à l’encontre des intérêts de la Russie, en tant que pays producteur de matières premières…
Depuis des années, la presse chinoise, contrôlée par le gouvernement, parle beaucoup de la manipulation du prix de l’or par les banques centrales occidentales. L’Asie est au courant, ils en parlent dans les journaux chinois. Nous avons même publié plusieurs rapports sur la manipulation de l’or qui proviennent de la presse chinoise ! Mais il est impossible de publier ces choses dans la presse occidentale…
Larry Parks: Incroyable ! Un des grands perdants… j’aimerais que vous en parliez… de toute cette manipulation a été le continent africain et particulièrement l’Afrique du Sud et les pays pauvres africains fortement endettés, où l’or est important. Ces pays, qui sont souverains, pourraient théoriquement monter un dossier. Mais comment se fait-il qu’ils ne font rien au sujet de la manipulation du prix ?
Chris Powell: Je crois que c'est une grande trahison des banques centrales. Plusieurs banques centrales des pays émergents producteurs d’or viennent du FMI… et le FMI rassemble des pays impérialistes; La manipulation du prix de l’or est un mécanisme essentiel de cet impérialisme. C’est la trahison des banques centrales. Cette trahison est plus forte, comme vous venez de le dire, dans les pays comme l’Afrique du Sud.
J’étais au surinam, en février, pour essayer d’expliquer cela aux gens. Le président de la banque centrale du pays est un ancien officier du FMI… Le Surinam est un grand pays producteur d’or, mais le FMI veut démonétiser l’or et le maintenir à un prix bas. Et les banques centrales occidentales décident qui sera à la tête des banques centrales des pays émergents. Notre groupe (GATA) en a souvent parlé en Afrique du Sud…
Larry Parks: Vous y avez tenu une conférence…
Chris Powell: Oui, en effet. J’ai beau me demander, mais je ne comprends pas pourquoi l’Afrique du Sud ne s’est pas levée en bloc pour combattre et dénoncer cette manipulation du prix par les banques centrales occidentales. L’industrie minière de ce pays est en déclin constant… et ce pays est la clé pour sauver toute l’Afrique. Si l’Afrique du sud ne peut être sauvée, l’Afrique continuera de sombrer. Mais si l’Afrique du sud, qui a le potentiel pour être un pays industrialisé, réussi à se sauver, et obtient le juste prix du marché pour sa production, alors l’Afrique pourra se sortir d’affaire. Réussira-t-elle ? Je ne sais pas. Mais l’Afrique ne sera certainement pas sauvée si les africains ne se lèvent pas pour défendre l’Afrique.
Larry Parks: Ils en ont certainement le pouvoir… on peut se demander pourquoi ils n’utilisent pas ce pouvoir…
Chris Powell: Je pense que les banquiers de la banque centrale d’Afrique du sud n’ont qu’une envie : prendre leur retraite à Mayfair, à Londres !
Larry Parks: Vous savez, je me rappelle, il y a une dizaine d’années, l’Afrique du sud employait plus de 400,000 travailleurs dans ses mines, et aujourd’hui, ils ne sont que 100,000… je parle des mines d’or… et chacun de ces mineurs avaient une dizaine de personnes à leur charge. Alors, si l’or passait à $5,000, $10,000, $15,000, tout le pays pourrait se retourner…
Chris Powell: L’Afrique du Sud, le Surinam, le Mexique, le Ghana… sont tous des pays riches qui semblent tout faire pour rester pauvres.
Larry Parks: Chris, c’était fascinant. J’ai beaucoup d’autres questions… mais il vous faudra revenir car notre temps est écoulé.
Chris Powell: Merci, Larry.
- Source : LarryParks