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Lundi, 25 Nov. 2024

«La croissance s'écroule à cause de l'austérité et des hausses d'impôts»

Auteur : Ivanhoé Govorof | Editeur : Walt | Jeudi, 15 Mai 2014 - 23h39

L'économiste Eric Heyer explique pourquoi la France se retrouve avec une croissance nulle au premier trimestre 2014.

Les chiffres de la croissance pour le premier trimestre 2014 viennent de tomber. La sentence est lourde: +0% pour la France, l’économie stagne. Le gouvernement maintient son (petit) objectif de 1% de croissance sur l’année, jugé «raisonnable» par le ministre des Finances Michel Sapin ce jeudi matin. Eric Heyer, économiste et Directeur adjoint au Département analyse et prévision de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) revient sur la signification de ce chiffre et sur l’action gouvernementale.

Que signifie ce chiffre de 0% de croissance?

Ce que dit ce chiffre, c’est que la consommation des ménages s’effondre. Elle s’effondre à cause de l’austérité et à cause des hausses d’impôts. Depuis le premier trimestre 2011 on est à 0%, ou presque, de croissance. Et qu’est-ce qui a été mis en place en 2011? L’austérité. Dans un premier temps, les tentatives de réduction du déficit pesaient sur les ménages comme sur les entreprises. La croissance ralentissait mais ne s’effondrait pas. Sauf que depuis 2013, on fait porter tout l’effort sur les ménages et donc fatalement la croissance s’écroule. A partir du moment où on touche au pouvoir d’achat, il était faux de penser que ça n’allait pas altérer les habitudes de consommation des ménages.

Quel impact sur les entreprises?

La baisse de consommation entraîne inexorablement une chute des investissements des entreprises. Leurs commandes ralentissent et les entreprises basculent dans une sous-utilisation de leurs capacités de production. Comme l’austérité casse la demande, les carnets de commande s’effondrent, en France comme en Europe, et les entreprises qui tournent à 70% de possibilité ne ressentent pas le besoin d’investir. On continue donc dans le même rythme et l’économie ne tourne plus.

Le gouvernement assure pouvoir tenir l’objectif de 1% de croissance d’ici la fin de l’année, une affirmation réaliste?

L’objectif de 1% n’est pas encore perdu. Les chiffres avancés aujourd’hui sont provisoires. Il semblerait que les 0,3% sur l’année soit acquis. Il faudrait entre 0,3% et 0,4% de croissance chaque trimestre jusqu’à la fin de 2014 pour y parvenir. C’est possible dans l’hypothèse où le gouvernement a effectivement pris conscience de la nécessité de mise en place d’un réel virage économique. Le pouvoir d’achat des ménages est le dernier moteur et on ne peut pas le couper.

Pour l’instant peut-on voir une réelle différence entre les politiques économiques de l’ancien et du nouveau gouvernement?

C’est le problème. 4 milliards supplémentaires de réduction du déficit ont été annoncés pour d’ici le mois de juin. Sauf que dans la manière d’y parvenir on ne voit pas beaucoup de différences avec la période Jean-Marc Ayrault. Depuis fin 2012, c’est une stratégie issue du rapport Gallois [l’ex-patron de la SNCF Louis Gallois a piloté un rapport sur la compétitivité française, ndlr] qui prédomine. C’est-à-dire basée sur le fait que le seul problème vient de l’offre, donc qu’il faut baisser les cotisations des entreprises et que ce financement doit se faire par tous les moyens sauf une augmentation du déficit. Malheureusement, comme le gouvernement ne peut plus financer, c’est aux ménages de mettre la main à la poche. Aujourd’hui finalement, il n’y a aucun changement: il faut réduire le déficit à tout prix et l’effort pèse toujours essentiellement sur les ménages.

La seule différence pour le gouvernement Valls, sera le contexte économique international plus porteur et favorable. La croissance repart en Europe, et celle de la France pourra s’appuyer dessus.


- Source : Ivanhoé Govorof

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