Les faillites d'entreprises s'envolent en France : +34,6% au premier trimestre
Le nombre de défaillances d'entreprises a bondi de 34,6% entre le premier trimestre 2021 et le premier trimestre 2022, selon une étude du cabinet Altares. Après avoir atteint des niveaux extrêmement bas grâce au "quoi qu'il en coûte", le nombre de faillites en France frôle ses niveaux d'avant-crise sans toutefois les dépasser. Si les conséquences du conflit en Ukraine et l'inflation impactent l'économie, le cabinet ne prévoit pas néanmoins de déferlante des faillites au cours des prochains mois.
Les indicateurs passent au rouge les uns après les autres. Après un coup de frein de l’économie française prévu au premier trimestre, l’horizon s’assombrit pour les entreprises tricolores. Dopés aux mesures d’urgence du “quoi qu’il en coûte”, beaucoup de secteurs ont pu profiter de la mise en sommeil des tribunaux de commerce pendant de longs mois.
Avec le débranchement progressif de toutes ces béquilles et la dégradation de la conjoncture liée à la guerre en Ukraine, la plupart des économistes s’attendent à une remontée des faillites. “Dans ce contexte très incertain, il y a une hausse de la peur de stagflation et les craintes de récession. Les conséquences de la guerre en Ukraine peuvent donner un coup de grâce à l’économie mondiale”, a déclaré l’économiste du cabinet Oxford Economics, Daniela Ordonez, lors d’un récent point presse.
“Aucun territoire épargné”
Dans son dernier bilan dévoilé ce lundi 11 avril, le cabinet d’étude Altares, spécialisé dans la donnée d’entreprise, a enregistré une envolée des faillites d’entreprises de 35% entre janvier et mars dernier par rapport au premier trimestre 2021. “Au premier trimestre 2022, l’étau de la crise sanitaire se desserre et les aides s’arrêtent. Un retour à une forme de normalité qui implique aussi une reprise des défaillances. La hausse s’amorce donc et elle est déjà très nette dans les secteurs qui comptent sur la reprise des habitudes de consommation comme aller au restaurant ou chez le coiffeur. Aucun territoire n’est épargné par le phénomène”, souligne Thierry Millon, directeur des études chez Altares.
L’éclatement de la guerre en Ukraine et ses conséquences économiques sur le Vieux continent pourraient accélérer les difficultés pour un bon nombre de secteurs. “En ce début d’année 2022, la confiance en l’avenir gagnait du terrain : les niveaux de trésorerie, les carnets de commande bien remplis laissaient présager une reprise de l’économie. Toutefois, depuis le 24 février et le début de l’invasion russe en Ukraine, l’horizon s’assombrit : la flambée des prix de l’énergie, les difficultés d’approvisionnement, les pénuries de matériaux, l’inflation qui s’emballe… autant de signaux qui incitent à la prudence”, ajoute-t-il. L’expert ne prévoit pas non plus de déferlante de faillites dans les mois à venir. A l’approche du second tour de l’élection présidentielle prévu le 24 avril prochain, cette remontée du premier trimestre pourrait faire de l’ombre au bilan du président sortant Emmanuel Macron.
Une hausse encore inférieure au niveau pré-crise
Le nombre de défaillances a bondi par rapport au premier trimestre 2021 passant de 7.406 à 9.972, soit une hausse de 34,6%. Il demeure néanmoins bien inférieur aux niveaux pré-Covid enregistrés en 2018 (14.698) et 2019 (14.146). Il semble que les jeunes entreprises soient les plus touchées par ce mouvement de faillites. En effet, près de la moitié des entreprises qui ont déposé le bilan au cours du premier trimestre ont été créées il y a moins de cinq ans.
Celles qui ont été immatriculées juste avant le début de la pandémie ou pendant la crise sanitaire ont particulièrement souffert (+52%). “Les difficultés des jeunes entreprises sont particulièrement marquées dans les activités « magasins multi-rayons » (essentiellement des commerces d’alimentation générale) où les défauts sont trois fois plus nombreux ce trimestre ; mais aussi dans la restauration (+180%), où le nombre de procédures était exceptionnellement bas il y a un an”, soulignent les auteurs de l’étude.
Des PME au bord du gouffre
Par taille d’entreprise, les petites et moyennes entreprises (PME) de moins de 50 salariés sont bien plus confrontées à des difficultés que les plus grandes. Le nombre de défaillances a ainsi bondi de 56% entre janvier et mars par rapport à au premier trimestre 2021, dépassant son niveau d’avant crise. À l’opposé, les entreprises ayant un effectif supérieur à 50 salariés semblent résister à cet envol des faillites.
Le commerce et la restauration durement frappés
L’autre enseignement de cette étude est que les activités à destination des consommateurs sont en première ligne. Il s’agit principalement du commerce, de la restauration et des services aux particuliers. Dans l’alimentation générale (+83%) ou encore le commerce d’habillement (+34%), les hausses sont vertigineuses.
Pour la restauration, cette hausse n’est pas vraiment surprenante au vu des longs mois de fermeture de l’ensemble des établissements. Beaucoup de restaurateurs avaient exprimé de fortes craintes au moment du débranchement des aides gouvernementales. À cela se sont ajoutées les démissions en grand nombre et les fortes difficultés de recrutement depuis l’automne 2021.
Photo d'illustration: Dans la restauration, les défaillances ont bondi de 111% entre le premier trimestre 2021 et le premier trimestre 2022. (Crédits : Reuters)
- Source : La Tribune