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Un maïs OGM reconnu toxique pour l’alimentation animale

Auteur : Jean-Jacques RéGIBIER | Editeur : Walt | Jeudi, 28 Janv. 2016 - 19h52

Le premier maïs commercialisé pour nourrir le bétail a eu des effets nocifs sur les animaux. C’est ce que révèle une étude du Centre de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique ( CRIIGEN ), présentée aujourd’hui à Bruxelles par José Bové et Michèle Rivasi.

Les résultats de cette étude étaient particulièrement attendus, puisque le maïs OGM mis en cause, cultivé au départ sur quelques milliers d’hectares, était le premier à avoir obtenu l’autorisation de mise sur le marché pour l’alimentation animale. De son nom de code Bt 176, il était commercialisé par le groupe pharmaceutique suisse Novartis ( devenu Syngenta).

Dès 1996, ce maïs OGM avait provoqué plusieurs polémiques. Il produisait un insecticide Bt modifié et contenait également un gène de résistance à un antibiotique. A la suite de ces polémiques, le Bt 176 avait du être retiré du marché.

Ce que plusieurs experts avaient alors dénoncé, c’est qu’aucun test n’avait été mené sur le long terme pour connaître les effets de ce maïs transgénique, avant qu’il ne soit autorisé à la vente. Un seul test de nutrition sur quatre vaches avait été mené pendant seulement deux semaines par la société Novartis, au cours duquel l’une des vaches était morte au bout d’une semaine, sans explication scientifique.

Ce test toxicologique avant la mise sur le marché par Novartis, avait été réalisé aux Etats-Unis.

Le Pr Gilles-Eric Séralini, du Centre de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique, qui, à cette époque (1998-2007), avait eu accès au dossier en tant qu’expert pour le gouvernement français au sein de la Commission du Génie Biomoléculaire - car les résultats n’était pas censés être rendus publics - avait dénoncé ce test de 15 jours, délai scandaleusement trop court selon lui, pour juger des effets du maïs sur la santé des bovins.

C’est sur une autre expérience que se fonde l’étude qu’il a rendue publique aujourd’hui à Bruxelles, relayée par les députés européens Verts, Michèle Rivasi et José Bové.

Cette étude se fonde sur une autre expérience, celle menée par un fermier expérimenté, médaillé pour sa productivité de lait de vache en Allemagne, Gottfried Glöckner. Depuis 1995, Gottfried Glöckner collaborait avec l’industrie des OGM, d’abord pour tester des cultures. Il a été ensuite le premier, dès sa commercialisation, à donner le maïs Bt 176 après ensilage, à ses vaches laitières. Cette expérience qui s’est étendue sur plus de 4 ans, de 1998 à 2002, a été et demeure la plus longue observation détaillée de nourrissage de bétail avec un OGM, qui plus est sur un échantillon de bétail important, 70 vaches.

Sa ferme exemplaire était surveillée par des vétérinaires qualifiés, il n’y avait jamais connu de pathologie grave depuis qu’il avait pris la direction de l’élevage en 1986.

Qu’a-t-il constaté ?

Tout d’abord des paralysies partielles (parésies) sur les vaches, accompagnées de grandes fatigues, de problèmes rénaux et de problèmes de muqueuses, suivies par la mort de 10% des animaux. Malgré de nombreuses analyses, effectuées notamment par des laboratoires universitaires, en accord avec le ministère de la santé allemand et Syngenta, aucune cause microbienne n’a pu être découverte pour expliquer la mort des animaux. La dose de maïs OGM Bt progressivement introduit avait atteint 40% de la ration. En 2002, le fermier était convaincu que le maïs Bt était à l’origine des pathologies. Il poursuivra en justice Syngenta qui le dédommagera partiellement.

Ce sont toutes les données issues de ce test grandeur nature, notamment toutes les analyses de sang et d’urine, qui ont servi de base à l’étude du Pr. Séralini, qui a par ailleurs eu accès aux dossiers vétérinaires et aux archives très complètes pour chaque vache, ainsi qu’au témoignage du fermier titulaire d’un Master en Sciences Agricoles. L’étude a été publiée dans une revue scientifique spécialisée, le « Scholarly Journal of Agricultural Sciences ».

Ses conclusions rejoignent les constats de l’éleveur allemand. Le maïs OGM 176 était bien nocif pour le bétail.

Présentant cette étude, la député verte Michèle Rivasi a demandé que la procédure d’autorisation des OGM au niveau européen soit revue. « Dans le système actuel, il est très difficile pour un État de refuser l’autorisation d’un OGM à l’importation, quand bien même la mise en culture serait, elle, interdite. Par ailleurs, les scientifiques se basent trop souvent sur des études commanditées par les industriels, entraînant des situations de conflit d’intérêts extrêmement dommageables et déjà dénoncées par le passé » a-t-elle expliqué.

Pour José Bové, lui aussi député européen écologiste, membre de la Commission agriculture du Parlement européen, « aujourd’hui, la procédure d’évaluation et d’autorisation des OGM à l’importation en Europe n’a plus aucun sens puisqu’elle a été désavouée par le Parlement européen puis très récemment par le Conseil ( … ) Pour sortir de cette impasse scientifique et institutionnelle, il faut que mettre en œuvre un protocole d’évaluation de long terme pour les OGM, comme cela a été demandé en 2012 par nombre de chercheurs indépendants. Sans cette approche de long terme, on met en péril la santé publique, y compris lorsque seuls les animaux de ferme mangent des OGM."

?Le CRIIGEN  réclame également de toute urgence, la transparence de toutes les études toxicologiques réalisées avant la mise sur le marché des OGM, et des pesticides qu’ils contiennent. Il insiste sur la nécessité d’études sur la vie entière, ainsi que de l’étiquetage spécifique de la nature des OGM alimentaires.

  «Il en va, ajoute le Centre de Recherche et d’information indépendantes, de la santé des animaux d’élevage ainsi que de celle des consommateurs ».

L’étude qu’il vient de rendre publique, révèle une fois de plus l’urgente nécessité d’un étiquetage spécifique de la nature et de la quantité des OGM, notamment dans l’alimentation. Des tests à long terme des OGM alimentaires doivent être effectués et rendus publics, tout comme pour les pesticides qu’ils sont conçus pour contenir.


- Source : l'Humanité

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