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Pause fiscale ou prose fiscale…

Auteur : Mediavox.fr | Editeur : Stanislas | Mercredi, 11 Sept. 2013 - 17h13

Pierre Moscovici est venu aux Universités d’été du MEDEF faire sa rentrée politique. Après son fameux « ras-le-bol » fiscal, il a voulu marquer les esprits, et accompagné de Bernard Cazeneuve, tenter de séduire les chefs d’entreprises à l’heure ou certain à gauche se demande si le gouvernement n’a pas frappé trop fort en matière de hausse d’impôts.

A Jouy en Josas, il a jugé devant les patrons que le niveau des prélèvements obligatoires des entreprises n’était pas « bon ». Depuis il n’a de cesse que d’annoncer des baisses d’impôts en 2014.

Devant la montée de la grogne, François Hollande empêtré dans le problème syrien décrète une pause fiscale. Lui emboitant le pas, Jean-Marc Ayrault, premier ministre de son état, annonce le gel du barème de l’impôt sur le revenu. Le gouvernement se rallierait-il à un libéralisme bon teint ? Que nenni, « ces promesses n’engagent que ceux qui les écoutent »(Henri Queuille député radical-socialiste de la Corrèze et membre de nombreux gouvernements, mais également parrain politique de François Mitterrand et symbole de l’inefficacité et du discrédit de la IVe République). En y regardant de plus près, le gouvernement joue sur les mots pour nous préparer de nouveaux maux.

Il faut se rappeler que Bruxelles n’a accepté de donner deux ans de plus à la France pour ramener son déficit public sous la barre des 3% du PIB, soit en 2015 au lieu de 2013 que sous certaines conditions, à savoir un effort de réduction du déficit structurel de 0,8 point de PIB.

A l’heure où les prévisions de croissance flirtent avec le 0,2%, le déficit public de la France va donc déraper cette année d’environ 4% du PIB alors même que ce déficit était inscrit dans le budget 2013 pour 3,5%.

Le gouvernement est face à une équation impossible : réduire le déficit sans augmenter les impôts tout en augmentant les dépenses sociales (élections municipales obligent). En fait tout est question de sémantique. Dans les propos de l’exécutif, il faut comprendre qu’une pause est en fait un ralentissement dans l’accroissement de la pression fiscale. D’ailleurs, Bernard Cazeneuve, grand argentier de l’État et donc à ce titre le collecteur des impôts, ne dit pas autre chose lorsqu’il annonce que le projet de budget 2014 comprendrait « beaucoup moins de six milliards » d’euros d’impôts nouveaux, mais sans préciser le nouveau chiffre.

Les couloirs bruissent d’un chiffre tournant autour de 2 milliards, mais c’est bien à 2 milliards d’impôts nouveaux qu’il pense. Dont acte, mais au travers de cette prose, on comprend que c’est bien d’un ralentissement de l’augmentation dont il s’agit, au travers de ces mots de nouveaux maux.

Dans notre société, il n’y a que deux solutions pour remplir les caisses de l’Etat, taxer la production ou la consommation, c’est-à-dire imposer les entreprises ou les ménages, mais surtout les deux en même temps ce qui est plus rentable et rapide. Les entreprises sont le moteur de l’économie, et les ménages en sont les consommateurs. En toute logique; il faut donc faire repartir le moteur avant de penser à consommer. Les consommateurs étant des électeurs, on peut toujours jouer sur les mots et promettre la Lune à ces électeurs, ce que n’a pas manqué de faire François Hollande pour se faire élire. Avec les entreprises, c’est une autre affaire, les promesses ne peuvent servir de garantie bancaire pour investir et embaucher ou mieux remplir leur carnet de commande. Le pragmatisme étant de rigueur en ces périodes de disette économique, les mots ne peuvent remplacer la compétitivité, donc la performance et les marchés.

En matière de pause fiscale telle que la conçoit le gouvernement, c’est-à-dire un ralentissement de l’accroissement, les entreprises pourraient être amenées à y croire après les annonces faites lors des Universités d’été du MEDEF. Ces envolées lyriques laissent sceptique le nouveau « patron des patrons » Pierre Gattaz. Effectivement adepte de Saint Thomas, et échaudé par des années de management de son entreprise, il demande à voir, comme nous d’ailleurs.

Restent les ménages qui n’ont pas d’université pour faire entendre leur voix. Ces ménages qui ont pour seul moyen d’expression un bulletin de vote. Mais les élections sont loin, et l’utopie gouvernementale permet d’espérer un retournement de la situation économique comme de l’inversion de la courbe du chômage pour escompter participer à la finale des prochaines élections en bonne place.

Dos au mur de Bruxelles, le gouvernement est obligé de donner des gages aux patrons pour espérer faire repartir le moteur économique. Donc retour dans la prose gouvernementale pour essayer de comprendre ce qui va nous arriver. C’est acquis, les prélèvements obligatoires vont augmenter pour atteindre deux milliards d’euros suivant certain et quatre selon d’autres.

Une seule certitude, ça va augmenter. En sus de cette augmentation; il faut ajouter tout ce qui est en préparation, à savoir : la hausse de 0,4 point du taux de TVA (environ 6 milliards de recettes nouvelles) destinée à financer le fameux crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) pour les entreprises, mais également celle de 0,15 point des cotisations vieillesse (environ 1 milliards de recettes nouvelles mais qui vont peser sur les salaires nets) acquittée par les salariés et les employeurs pour combler le déficit des retraites.

Côté entreprise, la « modernisation » de la fiscalité des entreprises devrait rapporter 4 milliards d’euros de recettes supplémentaires à l’Etat pour compenser la fin de mesures fiscales votées l’an dernier.

Le gouvernement planche également sur la suppression de deux impôts basés sur le chiffre d’affaires – l’IFA (imposition forfaitaire annuelle) et la C3S (contribution sociale de solidarité des sociétés)- et de les remplacer par un nouveau prélèvement de 3% sur l’EBE (excédent brut d’exploitation) plus rentable qui devrait rapporter quelques 6 milliards d’euros. En mal de séduction, le gouvernement envisage de réduire le taux d’impôt sur les sociétés (IS), qui pourrait être ramené à 30% (encore à l’état de promesses suivant Les Echos). Alors pour compenser ces « cadeaux » et rester dans le créneau fixé par Bruxelles, le gouvernement va agir sur les ménages. On commence par les familles, bêtes noires de la gauche socialiste, suivant le très galvaudé mot d’ordre « Les familles aisées seront particulièrement sollicitées. »

Retour donc aux projets de matraquage fiscal des familles, dont seul ce gouvernement a le secret, mais surtout l’obsession. 445 millions d’euros d’économisés sur la réduction d’impôt pour les familles ayant des enfants scolarisés dans le secondaire, un milliard d’euros engrangé grâce à la nouvelle réduction du quotient familial (1.500 € par ½ part). On estime à 1,3 million de ménages touchés par cette mesure,

Un milliard d’euros gagné sur la suppression de la déduction de charges sociales dont bénéficient les contrats collectifs de complémentaire santé des salariés, soit 13 millions de personnes impactés par la mesure.

Ces mesures vont peser sur le pouvoir d’achat des ménages, par le biais des impôts ou de la baisse des salaires, pour la modique somme de 10 milliards d’euros… Ce n’est pas à proprement parler ce qu’on appelle une pause, mais comme je ne parle pas le socialiste couramment, je ne peux comprendre les finesses de la prose de ces annonces.

Vous avez dit pause fiscale, alors que ce n’est que de la prose fiscale !


- Source : Mediavox.fr

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