En Allemagne, les deux tiers des insectes ont disparu en dix ans
En 2017, des chercheurs ont tiré la sonnette d’alarme lorsqu’ils ont constaté que le nombre d’insectes volants avait chuté de façon spectaculaire en Allemagne. Une nouvelle étude qui a analysé un large éventail d’espèces dans trois aires protégées allemandes a confirmé ces craintes, constatant que certaines populations avaient diminué de près des deux tiers au cours de la dernière décennie.
Il y a deux ans, une équipe internationale de chercheurs a rapporté qu’au cours des 27 dernières années, la biomasse des insectes volants a chuté de 75 % en Allemagne. L’utilisation des terres ou les changements météorologiques n’ont pas pu à eux seuls expliquer cette baisse spectaculaire de la biomasse d’insectes.
Une dramatique baisse de la population d’insectes alerte sur les prémices d’une catastrophe écologique
Les insectes, qu’ils aiment la terre ou qu’ils suivent le vent, sont essentiels au fonctionnement et à la santé des écosystèmes. Ils sont responsables de la pollinisation de 80 % des plantes sauvages et fournissent de la nourriture à une vaste gamme d’espèces, dont 60 % de tous les oiseaux.
Dans une nouvelle étude, des chercheurs dirigés par Sebastian Seibold et Wolfgang Weisse, tous deux professeurs d’écologie terrestre à l’Université technique de Munich, ont analysé des données sur des insectes volants provenant de 290 sites dans des habitats forestiers et herbagers. Les sites ont été inventoriés par des biologistes entre 2008 et 2017, qui ont compté les insectes volants, ainsi que les arthropodes comme les araignées et les mille-pattes, en utilisant des filets et des pièges.
Les résultats suggèrent que tant dans les prairies que dans les forêts, le nombre d’espèces a diminué d’environ un tiers pendant la période étudiée. Leur biomasse, qui indique la taille de la population, a diminué de 67 % dans les prairies et de 40 % dans les forêts.
Parmi les facteurs qui pourraient être responsables du déclin, les chercheurs ont identifié la déforestation, les espèces envahissantes, l’urbanisation, le réchauffement planétaire, la modification des zones humides et des rivières et l’agriculture. Ce dernier serait responsable d’environ la moitié de l’impact.
Les chercheurs allemands ont constaté que le dépérissement des insectes était particulièrement accentué dans les prairies entourées de terres arables. Les espèces qui ne couvraient pas de longues distances ont le plus diminué dans ces zones. Par ailleurs, dans les forêts, ce sont surtout les espèces qui parcourent de longues distances qui souffrent le plus, peut-être parce qu’elles entrent en contact avec l’agriculture pendant leur migration.
Selon les chercheurs dans leur étude :
"Le déclin a affecté des espèces rares et abondantes, et les tendances différaient d’un niveau trophique à l’autre. Nos résultats montrent que la biomasse, l’abondance et le nombre d’espèces d’arthropodes diminuent considérablement d’un niveau trophique à l’autre. Le déclin des arthropodes dans les forêts démontre que la perte n’est pas limitée aux habitats ouverts".
Ces résultats alarmants suggèrent que le déclin des insectes est très réel et tout aussi grave que ce que d’autres études ont déjà rapporté. Et ce n’est certainement pas seulement en Allemagne.
Plus tôt cette année, une étude (décrite dans le lien ci-dessous) a révélé que la moitié des espèces d’insectes dans le monde sont en déclin et qu’un tiers sont déjà en danger.
Les ordres lépidoptères, Hyménoptères et Coléoptères (papillons, abeilles et coléoptères, respectivement), sont les groupes les plus touchés. L’une des études incluses dans l’analyse montre que le nombre d’espèces de papillons très répandues sur les terres d’élevage au Royaume-Uni a diminué de 58 % entre 2000 et 2009. Les abeilles se débattent aussi : L’Oklahoma a perdu la moitié de ses espèces de bourdons entre 1949 et 2013. Le nombre de colonies d’abeilles aux Etats-Unis était de 6 millions en 1947, mais 3,5 millions ont disparu depuis. Selon cette méta-analyse, les espèces de coléoptères sont également en déclin, en particulier les coléoptères du fumier.
"Nos résultats suggèrent que les principaux facteurs de déclin des arthropodes agissent à plus grande échelle spatiale et sont (du moins pour les prairies) associés à l’agriculture au niveau du paysage. Cela implique que les politiques doivent s’attaquer à l’échelle du paysage pour atténuer les effets négatifs des pratiques d’utilisation des terres".
Comme l’agriculture est le principal moteur de ce déclin, les responsables politiques, les agriculteurs et les efforts de conservation doivent travailler de concert afin de coordonner l’inversion de cette tendance désastreuse. Des progrès ont été réalisés à cet égard. Cette année, l’Association des agriculteurs allemands a volontairement cédé des terres arables à la nature en créant un corridor de 230 000 km de long et de 5 mètres de large pour des espaces sauvages (Cela à un terme spécifique en français, que le Guru à sur le bout de la langue… si un(e) lecteur(trice) pouvait l’aider…). Les insecticides tels que les néonicotinoïdes et l’herbicide glyphosate (Roundup) ont également été examinés pour leurs effets néfastes potentiels sur la biodiversité. Les mesures qui restreignent leur utilisation peuvent également jouer un rôle majeur dans la régénération des populations d’insectes.
- Source : GuruMeditation