La lumière bleue réduirait considérablement l’espérance de vie
Ces résultats alarmants constatés sur des mouches devraient ouvrir la voie à des recherches approfondies sur les humains.
L’exposition prolongée à la lumière bleue des écrans n’est pas sans risque, et l’on connaît de mieux en mieux son impact sur les yeux et le sommeil. Selon une nouvelle étude sur des mouches drosophiles, la lumière bleue endommage aussi les cellules nerveuses et réduit l’espérance de vie, même sans passer par les cellules rétiniennes, ce qui interroge sur les conséquences sur l’homme.
Le constat édifiant de l’exposition à la lumière bleue
La lumière est nécessaire à la vie : la lumière naturelle est cruciale pour le rythme circadien du corps humain, c’est-à-dire l’enchaînement de cycles sur 24 heures permettant la régulation de l’activité neuronale, hormonale et cellulaire, lié au rythme du sommeil et de l’alimentation. Mais l’exposition prolongée à la lumière artificielle des LED, ou plus précisément ce que l’on nomme « lumière bleue » — par sa longueur d’onde se situant majoritairement autour de 460 nanomètres — présente désormais dans tous les écrans, n’est pas sans danger.
Une étude de l’Oregon State University, publiée le 17 octobre dernier dans Aging and Mechanisme of Disease de la prestigieuse revue Nature, a analysé la réaction de la drosophile, un animal dont la structure cellulaire et les mécanisme de développement sont proches de ceux des humains, à une exposition prolongée à la lumière bleue. Les auteurs de la publication écrivent : « Les hommes sont exposés à des quantités croissantes de lumière située dans le bleu du spectre produit par des LED (ou les DEL, diode électro-luminescente en français), qui peuvent interférer avec les cycles de sommeil. Les technologies LED sont relativement nouvelles ; cependant, les effets à long terme de l’exposition à la lumière bleue au cours d’une vie ne sont pas compris.
Afin d’observer les conséquences d’une exposition prolongée, des dizaines de mouches étaient divisées en plusieurs groupes : un groupe était exposé à de la lumière bleue pendant douze heures, et douze heures d’obscurité. Les autres groupes n’y étaient pas exposés, conservés dans une atmosphère à la lumière filtrée ou dans l’obscurité totale.
Les résultats sont édifiants. Les mouches maintenues dans des cycles alternant 12 heures de lumière bleue et 12 heures d’obscurité montraient une espérance de vie très réduite par rapport aux mouches maintenues dans une obscurité totale ou dans une lumière blanche filtrant les longueurs d’ondes de lumière bleue. Les organismes des drosophiles concernées montraient un vieillissement accéléré, causant des dommages aux cellules rétiniennes, de la neurodégénérescence et une mobilité aliénée. Ce n’est, de plus, pas qu’une question de vision : les dommages cérébraux et les problèmes de locomotion ne dépendent pas que de la dégénérescence de la rétine, car ces symptômes se retrouvaient aussi sur les mouches dont les yeux avaient été génétiquement retirés. De plus, la lumière bleue induit un stress chez les mouches les plus âgées sans toucher les plus jeunes, ce qui porte l’équipe à croire que la lumière bleue est un facteur de stress cumulatif avec le temps.
Qu’en est-il pour les hommes ?
L’étude explique que « les effets de la lumière sur les tissus extra-rétinaux pourraient ne pas être limités aux invertébrés ». Toutes les conséquences sur l’homme ne sont pas connues car, comme explique Jadwiga Giebultowicz, membre de l’équipe et chercheuse à l’Institut de biologie intégrative de l’université d’Oregon, à ScienceDaily, « cette technologie, l’éclairage aux LED, n’a — même dans les pays les plus développés — pas été utilisée depuis assez longtemps pour que l’on puisse connaître ses effets sur la durée d’une vie humaine ».
Eileen Chew, assistante de recherche dans le laboratoire de Giebultowicz et co-auteure de l’étude, note que les avancées en technologie et en médecine pourraient s’associer pour offrir une réponse aux effets négatifs de la lumière, si cette recherche s’applique aux humains. En attendant, certaines réponses simples peuvent être apportées : des lunettes filtrant la lumière bleue, ou des modes anti-lumière bleue, de plus en plus répandus dans les téléphones et ordinateurs. « Dans le futur, il pourrait y avoir des téléphones ajustant automatiquement leurs émissions de lumière selon la durée d’utilisation, explique Trevor Nash, un co-auteur. Ce genre de téléphone pourrait être difficile à produire, mais il aurait probablement un vrai effet sur la santé ».
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C’est la première fois qu’une étude lie de manière directe exposition et réduction de l’espérance de vie, que l’étude attribue majoritairement au phénomène de neurodégénérescence. Des études antérieures s’étaient surtout penchées sur la réduction de la longévité causée par le spectre total de la lumière blanche (ici et ici). En ce qui concerne les humains, les recherches avaient notamment avéré les troubles du sommeil induits par l’exposition tardive à la lumière bleue (sur les liseuses ou autres écrans), et ses dangers pour la rétine.
Ces résultats sans appel permettront peut-être de pousser des études futures sur les humains, afin de connaître pleinement les effets de la lumière bleue à laquelle l’homme est de plus en plus exposé, afin de s’en prémunir au mieux.
Photo d'illustration: © Alliance / Adobe Stock
- Source : Science Daily (Etats-Unis)