La société de surveillance et la nécessité d’un Internet citoyen
Finie la vie privée ? Les algorithmes d’intelligence artificielle, en plus de manipuler les profils des internautes et de faciliter les fraudes électorales, permettront d’analyser les micro-expressions des passants sous prétexte d’anticiper d’éventuelles situations criminelles, au grand désespoir de millions de personnes innocentes.
Cette réalité rend nécessaire l’analyse de stratégies de contrôle social basées sur le cyber-espionnage, le big data, les fausses nouvelles, la publicité post-vérité et les éternelles campagnes électorales polluées.
Fraude électorale
L’informaticien argentin Ariel Garbarz a confirmé devant le Ministère Public argentin la dénonciation de la possibilité réelle que lors des prochaines élections présidentielles et législatives d’octobre une fraude électronique ait lieu et a dénoncé que le logiciel acquis par le Ministère de l’Intérieur de la société transnationale Smartmatic, appelé Election-360, facilite les possibilités de manipulation et de fraude.
Election-360, dénoncé pour fraude dans différents pays où il a été utilisé, est un logiciel fermé et propriétaire, ce qui signifie que les procureurs informatiques affectés aux urnes ne pourront le contrôler car ses codes sources sont secrets. Les programmes ou logiciels utilisés doivent être transparents afin de pouvoir être audités par des spécialistes locaux et internationaux qui interviennent généralement à cette fin et dans ce cas, cela sera impossible à réaliser.
Les médias hégémoniques insistent sur le fait que Smartmatic est une entreprise vénézuélienne et que grâce à elle, les gouvernements chavistes ont pu cumuler des victoires successives depuis 1999. Mais la réalité est qu’elle n’opère pas au Venezuela et que le grand patron de la société est Lord Mark Malloch-Brown, président du SGO Business Group, avec lequel Smartmatic s’est associé en novembre 2014.
« Lord Mark Malloch-Brown a été vice-président des fonds d’investissement du spéculateur, promoteur des révolutions de couleur et contrôleur de la gauche George Soros, ainsi que de son Open Society Institute, vice-président de la Banque Mondiale et principal partenaire international de Sawyer Miller, une société de conseil politique« , selon le site officiel de Smartmatic.
Aux doutes générés par le système de vote électronique de Smartmatic concernant la violation du secret et la falsification possible des résultats, s’ajoutent les risques liés au système d’identification biométrique des empreintes digitales que la société a elle-même développé. L’inscription de chaque électeur est informée en temps réel auprès d’un centre informatique : ainsi le gouvernement peut disposer de ces informations pour optimiser la gestion de son système client, y compris décider dans quels établissements prolonger le vote si nécessaire.
Caméras de surveillance
Les sociétés transnationales de technologie travaillent sur l’intelligence artificielle – par l’analyse des images des caméras de surveillance à l’aide d’algorithmes – afin de mettre les données collectées au service de la sécurité et de la détection présumée de crimes, ce qui se traduit généralement par une diminution des droits des citoyens et une répression accrue.
Selon les experts, le langage non verbal indique si le citoyen capté par les caméras est nerveux ou montre des signes d’agressivité. Froncer les sourcils, serrer les dents ou serrer les poings sont quelques unes des indications. Et ils créent des algorithmes pour analyser et isoler ce genre de modèles grâce à des systèmes d’intelligence artificielle, explique Imnovation-hub.com.
Le Chili et l’Argentine font progresser la mise en œuvre de systèmes d’intelligence artificielle de reconnaissance faciale censés détecter les personnes recherchées, mais le potentiel de cette technologie portera atteinte à la vie privée de millions de citoyens innocents et diminuera les contrôles. Une mesure très controversée en termes de sécurité démocratique et plus proche de la démagogie.
Auparavant, l’Argentine avait annoncé l’achat de ballons aériens de surveillance munis de caméras capables d’enregistrer des images à 360 degrés, avec une vision de jour et de nuit, la vidéo en temps réel et la capacité d’identifier et de suivre des cibles à des kilomètres. Principalement pour les manifestations de masse, des manifestations politiques aux matchs de football.
De nombreuses questions subsistent : comment les images enregistrées dans les espaces privés sont-elles traitées, qui gère les images, comment se déroulent les processus de stockage et de conservation et combien de temps sont-elles gardées ? La vérité est qu’aucun protocole n’est étudié et qu’aucun débat sur la protection des données personnelles n’est explicite.
Le laboratoire israélien Cortica, spécialisé dans l’intelligence artificielle autonome, base son logiciel sur des modèles d’apprentissage neuronaux détectés dans le cerveau de souris et traduits en formules mathématiques. De cette façon, ses systèmes sont en mesure d’apprendre et de prédire les événements futurs à partir des données recueillies.
Cortica a développé un logiciel pour l’analyse des images des caméras de sécurité afin de détecter les mouvements et les comportements associés aux crimes violents ou au vol. L’outil est suffisamment puissant pour analyser des téraoctets d’information et affiner ses capacités en traitant toutes ces données. Sa capacité à anticiper la criminalité est basée sur ce que l’on appelle les « microexpressions », qui trahissent le criminel présumé.
Analyse des réseaux sociaux
L’analyse des images des caméras de vidéosurveillance n’est qu’une des nombreuses applications de l’IA appliquées à la sécurité publique. Le ministère de la Justice des États-Unis a financé un programme à l’Université de Cardiff pour développer un logiciel d’analyse des réseaux sociaux afin de détecter les zones où des incidents peuvent se produire.
Les mécanismes sont basés sur l’analyse des flambées de violence verbale sur Twitter et des données sur les crimes haineux de la police de Los Angeles afin de les comparer avec les situations de violence déclenchées dans la ville. Par la suite, un algorithme sera en mesure d’apprendre des corrélations passées pour prédire les corrélations futures et ainsi allouer des ressources pour couvrir des zones potentiellement dangereuses.
Par le biais d’Internet et des réseaux dits sociaux, les mensonges se répandent rapidement, imposant des imaginaires collectifs d’une réalité virtuelle, et il s’avère que de grandes entreprises, comme Google ou Facebook, cherchent à imposer leur censure, sans aucune transparence ni critère légal ni contrôle citoyen. Google s’arroge le pouvoir sur ce qui se trouve sur Internet, et pour cela il a changé ses algorithmes, rendant invisibles certains médias, censurant des photographies ou des vidéos.
Les grandes sociétés transnationales de communication et d’information (Google, Microsoft, Facebook et Amazon) exigent l’accès à toutes les données (qu’elles manipulent ou vendent ensuite à des tiers, qu’il s’agisse de pays ou d’autres entreprises). Les pays en développement ont toujours exigé que tous les investissements technologiques incluent des échanges pour développer leurs propres capacités, mais les grandes entreprises refusent.
En même temps, elles rejettent toute obligation de stocker les données localement ou de divulguer le code source des programmes et des algorithmes. Savoir comment ils fonctionnent est fondamental pour pouvoir expliquer leurs résultats.
Nous sommes au milieu d’une guerre de la quatrième et cinquième génération, où l’imposition d’imaginaires collectifs est basée sur des bombardements des perceptions des citoyens et des systèmes neuronaux, utilisant l’intelligence artificielle, le big data, et les réseaux numériques. Et où, à travers l’analyse d’images de caméras de surveillance avec des algorithmes, les données collectées au service de la sécurité et prétendument la détection de crimes, signifie la perte définitive de la vie privée de l’individu.
Sans un internet citoyen qui garantisse la neutralité et la souveraineté citoyenne, qui puisse contrôler la manipulation monopolisée par les méga-entreprises, le contrôle social géré par les grandes sociétés transnationales de communication et d’information en alliance avec quelques États (notamment les États-Unis, la Grande-Bretagne et Israël) continuera à promouvoir des sociétés surveillées par le cyber-espionnage, les fausses nouvelles, les données biométriques et la fraude électorale.
Traduit par Réseau International
- Source : ALAI (Equateur)