Le monétaire a échoué, passons à ….
Après 6 ans de stimulation monétaire effrénée et casse cou, les pays phares en ce domaine, les anglo-saxons, n’en finissent pas de retarder la normalisation.
Cela devrait faire débat! Comment après tant d’années de remèdes exceptionnels peut-on encore différer et oser dire, c’est trop fragile, cela n’est pas assez assuré, il y a risque de rechute.
Ainsi la Banque d’Angleterre utilise la déroute des marchés de matières premières pour, une fois de plus, repousser l’échéance. On sent bien à lire les interventions des gouverneurs de la Fed, qu’outre Atlantique, c’est la même chose : on cherche une bonne excuse pour retarder la minuscule hausse des taux pourtant promise et même claironnée il y a quelques semaines. Quelle est cette fragilité de la situation qui après 6 années de bétonnage monétaire est encore menaçante au point de paralyser les institutions les plus puissantes et les mieux équipées du monde ?
Les observateurs et commentateurs, nous n’osons même plus utiliser le mot analystes ou spécialistes, se laissent prendre au piège. Au lieu de s’interroger sur l’adéquation de ces remèdes qui ne produisent aucun retour à la santé et aux équilibres, ils glosent, ils parient, ils nous rabattent les oreilles avec leurs pseudo prévisions. Montera ? Montera pas ? Septembre ? Décembre ?
Personne ne se rend compte à quel point cela est dérisoire. Pourquoi ? Parce que le sens des réalités et le ridicule ont disparu à la faveur de l’irrésistible ascension du tyran que sont les marchés. L’esprit de jeu a tout contaminé, même les capacités de raisonnement. On ne pense, on ne réfléchit qu’en fonction d’eux et de l’effet que telle ou telle décision on non-décision aura sur leur comportement. C’est l’envahissement par le trouble des marchés! L’autisme de ces gens a quelque chose de poignant et de pathétique. Surtout eu égard aux ressources dépensées pour alimenter ce jeu de devinettes.
Alors il faut répéter, ne pas avoir peur de dire et redire cette vérité d’évidence à savoir que si, après 6 années, cela ne marche pas, c’est parce que les politiques qui sont menées sont idiotes. Eh oui, cela crève les yeux , cela découle du bon sens, tout simplement. Les caricatures que sont la Grèce, la Chine devraient pourtant, tellement le trait est gros , favoriser la prise de conscience que le monétaire ne donne aucun résultat réel, que le « extend and pretend » sont des recettes de lâches et de charlatans et que tout l’édifice que l’on construit et entretient sur ces bases est voué non seulement au rebut, mais également à la destruction même pas créatrice. Rien ne peut en sortir, il n’y a rien d’autre que du gaspillage.
C’est par construction que nos Systèmes sont maintenant gouvernés pour favoriser la stagnation économique, le sous emploi et les inégalités. Nous laissons de côté la question de savoir si cela est volontaire ou pas. Ces politiques soutiennent et encouragent la consommation financée par la dette ; voila le résumé cynique du choix qui sous tend les politiques menées partout dans le monde. Ces politiques refusent la recherche de l’équilibre par l’emploi et les revenus salariaux ou les revenus d’épargne. Elles découragent l’épargne et l’investissement productif et créateur d’emplois et en revanche, elles favorisent les opérations spéculatives telles que l’agiotage sur les marchés, les buy-back ou rachats d’actions, les rachats de titres anciens sur les marchés, l’arbitrage en général, les fusions acquisitions, la roulette biaisée des IPO, le Private Equity dévastateur, …Les politiques menées donnent la priorité à l’ingénierie financière et ils la rendent tellement attrayante qu’elle dévore tout. Elle est ainsi devenue structurellement et pas seulement conjoncturellement , plus attractive que les investissements productifs.
On a choisi de fabriquer de la fausse prospérité, de multiplier les signes de la prospérité au détriment de la production de vraies richesses. On l’a fait au prix :
– d’une hausse terrible des inégalités
– d’une mise au rebut du travail humain
– d’une dislocation des sociétés civiles
– d’une instabilité extrême des marchés
– d’une fragilité effrayante d’un système bancaire devenu une véritable bombe
– de la destruction des valeurs d’effort, d’épargne et de justice
– de l’inadaptation des humains aux authentiques défis de l’avenir
Car le règne des perceptions, la dictature des signes empêchent l’adaptation et les bonnes décisions. Que l’on songe seulement aux grands défis comme le réchauffement de la planète ou ceux connexes du peuplement et des migrations. Pire, le règne des perceptions, le voile monétaire, l’illusion de la fausse richesse empêchent les bonnes décisions mais en outre ils détruisent le réel et son potentiel.
Ces politiques pénalisent l’effort par l’impôt et la chasse aux énergies créatrices. Elles découragent l’épargne par la destruction de sa récompense et la glorification des modèles douteux comme les initiés bancaires et financiers qui tondent les épargnants. Nous donnons des assurances aux spéculateurs du clan « too big to fail », nous les cajolons de promesses de largesses infinies et pratiquement éternelles.
Nous favorisons la reproduction des nuisibles et nous éliminons les utiles.
Personne ne parle plus de revenir sur terre, de marcher sur les pieds et de récompenser l’effort et l’épargne. Au moindre frémissement des salaires, les banques centrales ont déjà averti qu’elles resserreront ! Nous habitons un monde de fausses valeurs, un monde ou ceux qui ne connaissent rien, politiciens, hauts fonctionnaires domestiques et internationaux, donnent des ordres à ceux qui connaissent et font, et fabriquent, et apprennent en se coltinant le réel. Le monde des signes récompense non ceux qui produisent, mais ceux qui les manipulent le mieux ; et ce qui marche, c’est le gaspillage, la dette, la confiscation.
L’idiotie clef, c’est celle du Savings Glut, l’idiotie qui prétend que tous nos maux viennent de l’excès d’épargne. Qui ne voit que si il y a trop d’épargne, c’est parce qu’il n’y a pas assez d’investissement productifs? Par identité logique, l’épargne est égale à l’investissement, ce qui implique qu’il faut chercher un équilibre à un niveau plus élevé, favoriser non pas la consommation, mais l’investissement productif. C’est l’investissement qu’il faut libérer, encourager , voire stimuler. Mais pour cela, il faut sortir du monétaire, il faut revenir à la seconde arme des gouvernements, le fiscal
Pourquoi ne fait on pas du fiscal, pourquoi miser tout sur le monétaire dont le caractère déflationniste est maintenant bien connu ? La réponse est à la fois politique et financière .
La première raison pour laquelle on refuse de faire de la stimulation fiscale de l’investissement est que l’on n’ose pas détruire le capital ancien, obsolète, celui qui fait obstacle au progrès. On préfère laisser se perpétuer l’inefficacité en la soutenant par la monnaie et le crédit facile. On garde un stock de capital gaspilleur, malthusien considérable qui, en quelque sorte, nie les progrès des techniques et des savoirs. C’est bien sûr ce capital ancien qui est le frein politique puisque c’est lui qui tient le pouvoir !
La seconde raison qui fait que l’on ne peut faire jouer au fiscal son rôle de starter c’est l’état des finances publiques, des budgets. Tous sont déficitaires, on a usé le pouvoir d’endettement, on a tellement creusé les déficits pour acheter la paix sociale et financer les prébendes que l’arsenal est épuisé. Le stock de promesses intenables est colossal. Il faut oser restructurer les dettes.
La réponse de la politique actuelle, réponse monétaire, consiste à faire croire que les rendements zéro, la création de liquidités, sont efficaces, mais que cela ne suffit pas, il faut passer aux taux négatifs, amputer les épargnes, euthanasier par le biais de la volatilité sélective sur les marchés, par le biais de la fameuse dissémination du risque. Cette solution se résume à ceci : mettre un tigre dans le moteur des spéculations de la haute finance tout en asphyxiant la classe moyenne et les salariés. Leur faire faire du surplace ne suffirait plus, il faudrait organiser la régression , la répression.
C’est un changement de cap radical qui s’impose, pas une correction à la marge.
– il faut cesser de se reposer sur la politique monétaire
– il faut cesser de favoriser la consommation
– il faut cesser de stimuler le crédit
– il faut cesser de détruire l’épargne
– il faut réorienter les ressources vers l’investissement public, privé, et personnel comme l’éducation.
- Source : Brunobertez