La NSA pratiquait aussi l'espionnage économique massif de son "allié" français
Pierre Moscovici et François Baroin, alors ministres de l'Économie, et des centaines d'entreprises françaises ont été écoutés par les services secrets américains, selon plusieurs documents obtenus par Wikileaks et rendus publics lundi soir par Libération et Médiapart.
Bercy sur écoute. Le système mis en place par les États-Unis a permis de collecter des renseignements au plus haut niveau de l'État sur les affaires économiques. Outre les présidents de la République, dont l'on sait depuis peu qu'ils ont été écoutés, Pierre Moscovici (2012-2014) et François Baroin (2011-2012), à l'époque où ils étaient ministres de l'Économie, ont également été visés, selon plusieurs documents obtenus par Wikileaks et rendus publics lundi 29 juin au soir par Libération et Médiapart.
"Jamais la preuve d'un espionnage économique massif de la France, orchestré au plus haut niveau de l'Etat américain, n'avait été établie aussi clairement", estime Libération.
Des fonctionnaires ont également été ciblés par la National Security Agency, notamment un haut responsable du Trésor chargé de la politique commerciale, précisent les deux médias. Surtout, ils publient une note secrète, partagée par les États-Unis avec leurs alliés australien, canadien, britannique et néo-zélandais, qui requiert une information quasiment systématique sur les contrats à l'export.
Les entreprises françaises scrutées et pillées
L'agence de renseignement américaine avait ciblé "une centaines d'entreprises hexagonales, dont la quasi-totalité de celles cotées au CAC 40", assure Libération. Cet espionnage a pu "aller du simple vol des plans d'étude au pillage de données technologiques confidentielles", mais ce sont surtout "les renseignements sur les appels d'offre impliquant des entreprises américaines" qui intéressait la NSA.
Selon les fac-similés publiés par les sites d'information, l'objet de cet espionnage était de "rapporter toute proposition de contrats français ou d'études de faisabilité et de négociations imminents concernant des ventes ou des investissements internationaux dans des projets d'envergure ou des systèmes d'intérêt significatif pour le pays étranger hôte, ou 200 millions de dollars ou davantage en ventes et ou en services, comprenant le financement d'informations ou de projets de haut intérêt".
Les deux médias n'apportent cependant pas de preuve des conséquences de ces écoutes sur des contrats commerciaux ou des négociations qui ont pu se dérouler. Seul Médiapart propose de "revisiter" des "récits de contrats commerciaux perdus par les entreprises françaises".
Les États-Unis espionnent pour "comprendre les systèmes économiques"
Après la publication de ces information, la Direction nationale du renseignement américain (DNI) a indiqué la doctrine des États-Unis, décrite dans une déclaration de septembre 2013 :
Ces derniers "n'utilisent pas leur capacités de renseignement pour voler les secrets commerciaux de compagnies étrangères pour le compte de compagnies américaines", afin d'améliorer la "compétitivité" ou la "rentabilité" de celles-ci.
Les efforts du renseignement américain pour "comprendre les systèmes économiques, les politiques économiques et surveiller les activités économiques anormales" permettent aux dirigeants politiques américains de "prendre des décisions informées dans le meilleur intérêt de notre sécurité nationale", écrivait alors James Clapper, directeur de la DNI.
- Source : AFP-Reuters