Les français sont devenus une espèce protégée
Au fil des ans, l’Etat Providence est devenu « l’Etat Assistance » et les français sont devenus une espèce surprotégée au même titre que les tortues géantes des Galápagos.
L’Etat est devenu une sorte de père protecteur qui a fini par s’abroger le droit de décider à la place des citoyens ce qui leur convient le mieux et de définir ce qui était bien et, à contrario, néfaste pour eux-mêmes et la société.
Il s’en est logiquement suivi une ribambelle de lois et décrets qui ne seraient pas mauvais dans leur principe régulateur si une juste mesure ne s’était pas transformée en une boulimie de normes empiétant de plus en plus sur notre vie privée au nom du principe de précaution et de la bonne conscience politique.
L’État en est venu à prétendre savoir mieux que tout le monde quels sont les secteurs économiques, industriels et d'avenir qu’il faut privilégier et soutenir à grands renforts d’investissements publics, de participations et de nominations d’énarques ou hauts fonctionnaires dont la mission de représentant physique de la puissance publique était plus importante que la compétence professionnelle. Areva, Société Générale entre autres ont pu apprécier les bienfaits et résultats de cette politique que Renault ne va pas tarder à « gouter » avec cette décision étatique de montée à son capital afin d’obtenir la minorité de blocage à défaut de sa direction !
Côté social, la voracité législative est sans limites, tout fait divers marquant étant pain béni pour nos parlementaires qui se bousculent pour présenter une nouvelle loi et ce d’autant plus si tel député ou sénateur peut lui donner son nom. La récente loi interdisant les mannequins trop maigres ou la norme d'accessibilité handicapé appliquée aux vestiaires des arbitres de foot en sont une parfaite illustration.
Ajouter à cela le stupide principe de précaution inscrit dans la constitution, et vous enfanter une société frileuse et peureuse refusant la prise de risques, gelant toute initiative de peur d’enfreindre une loi parmi les plus de 10 000 existantes que nul n’est censé ignorer et auxquelles s’ajoute 120 000 décrets répartis dans 62 codes différents et 400 000 normes !
Une intrusion de plus en plus pernicieuse, excessive et hypocrite qui nous infantilise et contribue à une stigmatisation sociale de tous ceux qui ne suivent pas la norme qui est forcément la bonne puisqu’on nous le dit et que l’Etat sait ce qui est bien pour nous.
Cet Etat Providence est devenu désuet, ringard et, plus grave, il est devenu un problème de génération.
Ce modèle d’Etat omni présent et omniscient s’est développé voire emballé suite aux « 30 glorieuse », période bénie du triptyque croissance-productivité-hausse salariale due à la reconstruction économique d‘après-guerre.
Ce qui était financièrement tolérable, voire économiquement nécessaire, dans cette période de redressement de la nation, est devenu un modèle d’un autre âge en décalage total avec la transformation d’une société et est fondamentalement devenu une escroquerie envers les générations d’aujourd’hui hyper-connectées et habituées à un autre mode de vie tant personnel, social que professionnel, une génération qui fait tous les jours l’amère expérience de cette société de chômage, d’économie dépressive, d’avenir incertain et qui a bien compris que l’Etat Providence est devenu une chimère à ranger au rayon d’une époque révolue.
Le problème est que la France est toujours dirigée par la génération baby-boomers qui continuent à profiter de la rente institutionnelle qu'elle s’est créée.
L’âge moyen de nos parlementaires cumulards est passé de 45 ans en 1982 à 60 ans avec une surreprésentation des 61-70 ans et, malgré la faible représentativité de leur centaine de milliers de membres, les partis politiques participent de cette gérontologie en bloquant toute émergence de candidats hors des partis et réservant les places de choix aux vieux briscards. Et en bon camarade, l’Etat, cette fois-ci Providence, verrouille le système par le mode de financement des partis politiques : hors de ceux-ci, point de salut.
Il est temps que les nouvelles générations reprennent le contrôle de leur/notre destin et inventent une nouvelle façon de vivre ensemble et de nouveaux modèles économiques afin de réhabiliter une croissance capable de nous offrir une vision crédible et mobilisatrice du futur.
- Source : Michel bougydeval