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Fuite radioactive au Tricastin en décembre 2014 : EDF avoue avoir menti

Auteur : Coordination-antinucléaire | Editeur : Walt | Vendredi, 13 Févr. 2015 - 23h00

EDF a menti. Le 31 décembre 2014, le réacteur délabré n° 4 de la centrale nucléaire EDF du Tricastin se mettait en arrêt d’urgence (scram) après une tentative de redémarrage. Un dégazage accompagné d’un immense panache de fumée suivait des bruits assourdissants de sifflements et de détonations. Les détonations de sur-pressions furent entendues jusqu’à 12 km au-delà du site nucléaire. Alors que l’organisation indépendante « Next-Up » révélait que ses mesures démontraient des rejets de radioactivités dans l’air, EDF affirmait la main sur le cœur qu’il n’en était rien. Aujourd’hui, EDF avoue publiquement qu’il a menti : oui il y a bien eu des rejets radioactifs. Du tritium … et peut-être d’autres contaminants radioactifs.

Panique le soir du réveillon du jour de l’an au Tricastin. Ce 31 décembre 2014 vers 19h30 le réacteur n° 4 de la centrale nucléaire EDF du Tricastin se met en arrêt d’urgence (scram) alors qu’il est en cours de relancement au terme de 4 mois de réparation. Un important dégazage accompagné d’un immense panache de fumée suit un bruit assourdissant d’explosion. La détonation est entendue jusqu’à 12 km du site nucléaire. Non ce n’est pas un pétard de fête finissent par se dire les habitants. D’autant que ça siffle fort du côte des réacteurs.

L’organisation indépendante « Next-Up » qui se rend courageusement aussitôt sur place procède à des mesures de radioactivité. Pas de doute, en certains endroits, en fonction de l’orientation du vent, il y a des rejets de radioactivités dans l’air. EDF affirme la main sur le cœur qu’il n’en est rien. Et la Préfecture comme les médias relaient ce que dit le nucléariste. Il ne s’agirait que d’un simple problème de soupape sur le circuit secondaire du réacteur (celui qui alimente, par l’eau portée à ébullition par la réaction atomique et transformée en vapeur, la turbine à produire un peu d’électricité).

« C’est une zone non nucléaire » affirme la direction de la centrale et « une équipe est intervenue sur la soupape qui a été réparé en une heure » donc « la montée en puissance du réacteur se poursuit normalement« . Cela ressemble tellement à un beau conte de Noël que les médias aux anges et aux ordres, et absolument pas curieux, livrent à leurs lecteurs ce bobard en n’hésitant pas à égratigner au passage l’organisation antinucléaire. Pourtant « Next-Up » qui, elle, poursuit ses investigations et ses mesures en lien constant avec le Collectif antinucléaire de Vaucluse (CAN84), constate et informe la presse que la radioactivité est encore persistante à 1h30 du matin et même toujours, ce 1er janvier 2015, à 20h.

Contrairement à ce que les « experts du nucléaire » tentent de faire croire, le circuit primaire et le circuit secondaire ne sont pas en réalité distincts et sans effet l’un sur l’autre. Ils sont même concrètement indissociablement liés. Non seulement une défaillance de l’un d’entre eux entraine immanquablement un arrêt du réacteur, mais en ce qui concerne la radioactivité, elle n’est pas contenue de manière absolue par le circuit primaire. Et on la retrouve couramment par migration du circuit primaire dans le circuit secondaire du fait de la détérioration des métaux et de perte d’étanchéité dus à l’usure et à la corrosion des tubes (échangeurs) des Générateurs de Vapeur.

Un dépôt radioactif, qui pourrait être du tritium ou/et de l’iode 131 (1) est détecté à 3km au sud de la centrale. Certainement lié aux arrêts et redémarrages à répétition du réacteur qui aurait à 4 reprises envoyé dans l’atmosphère ses dégazages. Mais pour les autorités et l’exploitant nucléaire c’est impensable et rien de tel n’existe, « ceux qui répandent ces fausses nouvelles sont des irresponsables« . Et ce n’est que 5 jours plus tard qu’EDF indique dans un communiqué sibyllin que des techniciens sont intervenus sur une vanne, affirmant comme d’habitude que « cet événement n’a eu aucune conséquence sur la sûreté des installations, ni sur l’environnement« .

Le 5 janvier, à 8h49, l’exploitant de la centrale est obligé d’arrêter d’urgence encore une fois le réacteur n°4 (SCRAM), ce qui signifie que tout ne se passe pas au mieux. Treize jours après ces défaillances et rejets, l’ASN reprend et couvre la position de l’exploitant nucléaire tout en classant toutefois l’incident au niveau 1 de l’échelle INES des incidents nucléaires (voir la liste des incidents nucléaires sur les installations nucléaires en France ici )

La vieille centrale du Tricastin n’en est pas à ses premières atteintes à la sécurité et à la santé des habitants. Les années précédentes sont constituées d’incendies, d’explosions (2011 et 2013) de pompes hydrauliques et de transformateurs, de rejets radioactifs dans l’eau et dans l’air (en plus de ceux autorisés chaque jour par le gouvernement et la Préfecture), d’arrêts d’urgence de réacteur, d’inondation et perte de refroidissement, de fuite de tritium sous la centrale (2).

Ils mentent, jouent avec le feu,  notre santé et notre vie

La barre des 1000 incidents est atteinte depuis la mise en service de la centrale nucléaire du Tricastin dont pas moins de 64 pour cette seule année 2014 et au moins 15 avec des impacts radioactifs sur les salariés et 3 sur l’environnement et plus de 40 salariés victimes d’accidents du travail (brûlures, fuite d’étanchéité des tenues de protection contre la radioactivité, et autres mises en danger des travailleurs) au premier rang desquels les sous-traitants. Ajoutons qu’un nouveau projet de gazoduc passant à proximité du site nucléaire et sous le canal servant au refroidissement des réacteurs vient d’être validé par EDF et Areva. Au fil des années, dans la région, les pathologies thyroïdiennes et cancers (3) se multiplient tant pour les enfants que sur les adultes.

Aujourd’hui 8 février 2015, à l’occasion de la réunion officielle de la CLI (Commission Locale d’Information) du Tricastin, EDF avoue publiquement qu’il a menti et reconnaît qu’il y a eu des rejets radioactifs de tritium en 2014 et notamment par le réacteur n°4(*).

On arrête le massacre avant la catastrophe on on continue ?

Il est grand temps de mettre à l’arrêt définitif les 4 réacteurs de la centrale nucléaire, de procéder à une évaluation exhaustive des atteintes et menaces que représente cette installation pour les 100 ans à venir (minimum  lorsque l’on sait que près de 150 000 tonnes d’uranium sont entreposées au Tricastin), de prendre des mesures drastiques et impératives de protection de la population et du territoire et de proposer aux salariés un plan de formation et de reclassement digne de leur avenir, de celui de leurs enfants et de celle de la région.

(1) L’iode 131 (I 131) est un élément fortement radioactif ayant une 1/2 période radiologique de 8,02 jours. La décroissance de la radioactivité de ses isotopes est divisée par 1000 tous les 80 jours. Dans sa période d’activité radioactive, l’iode 131 est très toxique pour l’humain du fait de sa fixation sur la thyroïde et du risque d’irradiation de cette glande sensible notamment par les irradiations des rayons bêta. En radioprotection, la communauté scientifique considère qu’il constitue un des principaux dangers de contamination à court terme en cas de rejets dans l’atmosphère de contaminants

(2) Alors que la moyenne de contamination par le Tritium des eaux souterraines était dans les 12 derniers mois de 15 Bq/l (becquerel par litre), elle a atteint depuis le 8 juillet 2013 un niveau de 180Bq/l et même, au niveau du radier du réacteur n°3, une activité de 690Bq/l » soit 12 à 46 fois la valeur dite « normale ».

(3) Depuis plusieurs années l’omerta sanitaire règne : l’hôpital d’Avignon, l’Observatoire de la santé, l’Agence Régionale de la Santé refusent de communiquer au CAN84 les chiffres réels prétextant qu’il n’existe pas de registre des cancers dans la région ou bien que ces informations ne sont pas disponibles.

(*) Pour autant l’ASN vient d’autoriser la poursuite de fonctionnement du réacteur n°2 qui a pourtant dépassé ses trente d’âge initialement prévus comme limite maximale de fonctionnement.


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