Enfin, Macron veut créer une Pravda à la française!
Spectacle fascinant de fin de règne ! Avec une régularité de métronome, le pouvoir macroniste, confronté à l'effondrement de son autorité, répond par le seul réflexe qu'il connaisse : le serrage de vis technocratique. La dernière trouvaille en date? L'instauration d'un "label" pour distinguer l'information "sérieuse" de celle qui ne l'est pas, une idée lumineuse issue des très oubliables États Généraux de l'Information (EGI).
Derrière la novlangue habituelle sur la "protection de la démocratie", la manœuvre est grossière. Il s'agit, ni plus ni moins, d'officialiser une Pravda à la française. Mais en voulant ainsi casser le thermomètre de la dissidence, Emmanuel Macron commet une erreur stratégique majeure : il s'apprête à devenir sourd et aveugle à la colère qui monte.
La Caste face à la "sécession" du réel
Il faut comprendre la panique qui saisit l'Élysée. Les chiffres sont cruels. Selon le dernier baromètre Kantar pour La Croix, seuls 32 % des Français font encore confiance aux médias. Ce n'est pas une simple baisse, c'est une sécession. Le peuple a décroché. Il ne croit plus la parole officielle, subventionnée à coups de centaines de millions d'euros chaque année par le Projet de Loi de Finances.
Face à ce désaveu, la "Caste" – cette alliance objective entre la haute administration, la finance et les éditorialistes parisiens – ne se remet pas en question. Elle ne se dit pas qu'elle a peut-être menti sur les masques, sur l'Ukraine ou sur la dette. Non, elle se dit que le peuple est mal informé. Pire, qu'il est mal-pensant à cause des "ingérences étrangères" ou des algorithmes.
D'où l'idée du label. En s'appuyant sur des normes comme la Journalism Trust Initiative (JTI) de Reporters Sans Frontières, le pouvoir veut créer un tampon "Certifié Conforme". L'objectif est double : rassurer les annonceurs pour assécher financièrement les sites dissidents, et forcer les algorithmes des GAFAM à mettre en avant la parole d'État.
Tuer le messager pour ne plus voir le message
C'est ici que le piège se referme sur le Président. En voulant contrôler les critiques, Emmanuel Macron organise sa propre cécité.
Dans un système ouvert, la presse d'opposition, les blogs furibards, les tweets vengeurs jouent un rôle vital : ils sont les capteurs de la réalité. Ils signalent la douleur sociale, les dysfonctionnements, les incohérences. Ils sont le système nerveux périphérique de la nation.
En labellisant l'information, Macron construit une bulle cognitive hermétique. Il ne lira plus que ce qui est validé par ses propres normes. Il ne verra plus le monde tel qu'il est, mais tel que ses courtisans certifiés JTI le lui décrivent. C'est exactement le syndrome soviétique. À force de lire dans la Pravda que la récolte de blé était record, les apparatchiks du Kremlin ont fini par croire que le peuple n'avait pas faim. On connaît la suite.
En criminalisant ou en invisibilisant la critique (via le shadow banning ou la désindexation), le pouvoir se prive de la seule information qui compte : celle qui dérange. Il s'expose au risque mortel de ne pas voir venir l'explosion sociale, car les signaux faibles auront été filtrés par le label "complotiste" ou "fake news".
L'Effet Streisand : la publicité gratuite pour la dissidence
Le cynisme de la situation est que cette mesure est vouée à l'échec total grâce à ce qu'on appelle l'effet Streisand. Sur Internet, vouloir cacher quelque chose, c'est le désigner à l'attention de tous.
Le grand public n'est pas idiot. Il sait d'instinct que si le gouvernement lui dit "Ne lisez pas ça, c'est dangereux", c'est qu'il y a là une vérité qui dérange.
- Le label "Information Sérieuse" deviendra instantanément un label "Ennuyeux / Propagande".
- L'absence de label deviendra un gage d'authenticité, une marque de rébellion intellectuelle.
Les lecteurs intelligents, ceux qui cherchent à comprendre les coulisses de la mondialisation ou les dérives liberticides, se précipiteront sur les sites "déconseillés". Grâce au système Macron, la cartographie de la résistance intellectuelle sera claire et accessible à tous.
Merci, Monsieur le Président
Finalement, nous devrions remercier Emmanuel Macron. En voulant instaurer ce ministère de la Vérité, il nous rend un fier service. Il clarifie les lignes de front. D'un côté, une presse de courtisans, sous perfusion d'argent public, qui parlera dans le vide à une élite aveuglée. De l'autre, une nébuleuse vivante, critique, parfois excessive mais toujours libre, qui captera l'attention de ceux qui refusent la "fatigue informationnelle".
Le pouvoir pense construire une digue ; il est en train de creuser le fossé dans lequel il tombera, faute d'avoir voulu regarder où il mettait les pieds.
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Derrière le démenti, la stratégie : Emmanuel Macron prépare en catimini son « label de la vérité » pour les médias
Le tweet lénifiant de l’Élysée, posté le 1er décembre, tente de noyer le poisson. Face aux accusations de « ministère de la Vérité », le palais diffuse un montage vidéo montant en épingle les critiques – de Praud au JDD – pour mieux les étouffer sous les assurances présidentielles. Emmanuel Macron y clame, avec une sérénité de façade, que l’État ne vérifiera rien, laissant aux seuls journalistes le soin de s’auto-labelliser entre « professionnels sérieux ». La ficelle est grosse : ce démenti minutieusement scénarisé sent davantage l’opération de diversion que la réfutation.

Entre démenti officiel et promotion active, la schizophrénie du pouvoir sur le contrôle de l’information est révélatrice.
Un projet nié mais activement poussé
L’enfumage ne résiste pas à l’examen des faits. Le projet de labellisation, loin d’être une chimère, est l’enfant direct des États généraux de l’information (EGI), lancés sous l’égide du président lui-même. Son soutien est explicite et répété. À Arras, le 19 novembre, Macron s’est déclaré « favorable à la création d’un label professionnel » et a promis de faire « tout » pour le concrétiser, s’appuyant sur des outils comme la Journalism Trust Initiative de Reporters Sans Frontières. Cette ONG, notoirement liée aux financements publics et aux orientations du quinquennat, incarne le paravent « indépendant » dont le pouvoir aime s’entourer. La Journalism Trust Initiative est financée par l’AFP, la Commission européenne, la CIA (sous l’appellation National Endowment for démocraty), le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, l’Agence française de développement, etc. Où est son indépendance ?
Pravda ?
— Élysée (@Elysee) December 1, 2025
Ministère de la vérité ?
Quand parler de lutte contre la désinformation suscite la désinformation… pic.twitter.com/PspZup1aXF
L’État, spectateur ou architecte ?
L’argument de l’auto-régulation est un leurre. Comment croire à la neutralité de l’État quand le label s’accompagne de promesses de financements préférentiels pour les médias estampillés et de mécanismes judiciaires accélérés contre les contenus « faux » ? La « Déclaration de Paris » d’octobre 2025, poussée par Macron, prévoit un fonds international pour soutenir les médias « dignes de confiance », cimentant une économie de l’information sous perfusion et sous condition. Les déclarations présidentielles, relayées sans nuance par des comptes affiliés, contredisent allègrement le démenti officiel : le chef de l’État « entend tout faire » pour l’instaurer. La sémantique change, la volonté de structurer le paysage médiatique demeure.
La mémoire courte des « menteurs d’État »
Faut-il rappeler au pouvoir son pedigree en matière de vérités alternatives ? La gestion de la crise Covid offre un manuel du reniement en bonne et due forme. Les masques, d’abord inutiles, devinrent obligatoires. Le pass sanitaire, présenté comme temporaire et anodin, se transforma en sésame coercitif pour l’accès à la vie sociale. La vaccination, dont on jurait qu’elle ne serait jamais obligatoire, le devint par la contrainte économique et professionnelle. Chaque fois, le scénario fut identique : un démenti initial pour endormir les critiques, suivi d’une implémentation brutale une fois la contestation engourdie. Ce pattern d’action, documenté et vérifié, jette une lumière crue sur les assurances contemporaines. Pourquoi croirait-on aujourd’hui celui qui hier mentait avec une telle constance ?
La méthode est rodée
Le démenti de l’Élysée n’est donc qu’un épisode de plus dans une stratégie éprouvée. Il s’agit de désamorcer une polémique naissante par une communication agressive, pour mieux faire avancer, dans l’ombre des travaux techniques et des recommandations « indépendantes », un projet aux relents autoritaires. La promesse d’un label « par et pour les professionnels » ne peut masquer l’obsession centralisatrice d’un exécutif qui, sous couvert de lutter contre la désinformation, entend définir les contours de la vérité admissible. La vigilance, face à ce pouvoir qui ne supporte que les échos qui lui renvoient sa propre voix, n’a jamais été aussi impérieuse.
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Zapping : Macron veut se farcir CNews et mettre au pas toute la presse
Emmanuel Macron a dévoilé sa nouvelle ambition : labelliser l'information "vraie". Une proposition inquiétante, qui révèle une conception managériale et autoritaire du débat démocratique.
Sous couvert de lutter contre la désinformation, notre cher Président esquisse les contours d’un ministère de la Vérité à la française, où des « tiers » auto-désignés garantiraient la doxa officielle. La cible est à peine voilée : CNews, dont il s’agacerait que le gendarme de l’audiovisuel n’en fasse pas « suffisamment » contre elle.
Derrière le jargon technocratique sur la « déontologie » et la « méthodologie », se lit en creux la volonté de mettre au pas toute parole discordante. Elle trahit une même pulsion : régenter, trier, et in fine, exclure. Le « 1984 » d’Orwell n’est plus une fiction, mais un manuel de communication à l’usage de l’Élysée.
- Source : Le Courrier des Stratèges















