Trump sous l’emprise des néoconservateurs

Le revirement de Donald Trump sur l’Ukraine, sa passivité vis-à-vis du massacre à Gaza, soulèvent des questions. Serait-il tombé sous l’emprise des néo-conservateurs ? En raison de l’affaire Epstein ?
L’emprise se resserre sur Trump, qui adopte un mode néoconservateur
Si l’impulsivité et l’impatience du Président des Etats-Unis qui n’a pas obtenu la paix en 24 h en Ukraine ni de négociations fructueuses entre Israël et le Hamas expliquent en partie son attitude actuelle, la raison principale peut être ailleurs : serait-il tombé sous l’emprise des néo-conservateurs ? C’est la thèse émise par le blog de géo-politique Piccole Note qui n’est pas dénuée de fondement. MPI se propose d’en offrir à ses lecteurs les principales considérations.
« L’emprise se resserre sur Trump, qui adopte un mode néoconservateur. En témoigne son attitude de plus en plus virulente envers les deux fronts de guerre gérés par cette sphère, la Russie et le Moyen-Orient, avec un président américain qui a adopté un mode antirusse et est écrasé par les positions de Netanyahou sur le génocide de Gaza » écrit le journaliste de Piccole Note, qui ajoute.
« Il ne s’agit pas d’une capitulation totale, comme le suggèrent ses plaintes concernant la famine à Gaza et l’espoir d’un accord de cessez-le-feu, deux éléments en contradiction avec les orientations du gouvernement israélien (qui avance rapidement dans son projet d’occupation de la bande de Gaza et d’annexion de la Cisjordanie). Mais sa marge de manœuvre s’est certes considérablement réduite. L’époque où il pouvait défier les bellicistes néoconservateurs-libéraux semble révolue (même s’il pourrait encore se ménager des marges de manœuvre à l’avenir, bien que ce ne soit pas encore à l’horizon).
Le monde traverse l’une des périodes les plus sombres de l’histoire moderne, l’Empire est désormais aux mains d’une bande de fous déchaînés
« En attendant, et en espérant, qu’il retrouvera tôt ou tard sa semi-liberté perdue, le monde traverse l’une des périodes les plus sombres de l’histoire moderne – peut-être la plus sombre, puisque l’Empire est désormais aux mains d’une bande de fous déchaînés, qui rejettent toute notion de limites et sont prêts à tout pour conserver le pouvoir acquis à l’ère unipolaire. Le génocide de Gaza est un test décisif plutôt qu’une explication de cette folie, qui inclut également la menace d’une guerre thermonucléaire (l’envoi d’ogives nucléaires américaines au Royaume-Uni est un pas dans cette direction) ».
Piccole Note trouve dans les dossiers Epstein la raison de ce revirement trumpien :
« Ce sont les dossiers Epstein qui ont fait chuter Trump. À ce sujet, lors de sa tournée en Écosse, où il a rencontré la commissaire européenne Ursula von der Leyen, il a réitéré sa déclaration précédente : si ces documents contenaient des informations le concernant, les Démocrates, qui avaient tout fait pour l’élimer, les auraient rendus publics. De plus, ils ont eu amplement le temps, sous la présidence Biden, pour y insérer de faux documents à son sujet.
« Les deux sont vrais. Mais l’insistance sur de possibles manipulations des Démocrates signale que quelque chose se trame, et même si c’est le résultat d’une manipulation, il la craint. Généralement, ce genre de manipulations repose sur des preuves réelles, fugaces et pas particulièrement criminelles, qui, lorsqu’elles sont habilement élaborées comme le savent faire certaines agences, deviennent explosives ».
Ce sont les dossiers Epstein, manipulés par les Démocrates, qui ont fait chuter Trump
« Il ne s’agit pas d’exonérer Trump, commente Piccole Note, – nous ne sommes pas ses avocats – mais simplement d’un raisonnement qui résout l’apparente contradiction, actuelle et temporelle, puisqu’il explique aussi pourquoi Trump a brandi la publication des dossiers pendant la campagne électorale avec une telle insistance qu’elle est désormais incompréhensible, étant donné qu’il aurait gagné même sans utiliser cette arme.
« Quel que soit le contexte, le fait demeure que les agents d’Epstein, qui dans le passé ont aidé et encouragé son réseau à faire chanter des personnes puissantes dans le monde entier, après avoir réussi à faire passer dans l’oubli le réseau honteux de clients du milliardaire pédophile, brandissent maintenant l’affaire comme un marteau-pilon contre Trump (sans surprise, le plus virulent est le Wall Street Journal de Murdoch) ».
Cette emprise des néo-conservateurs sur Donald Trump inaugure, selon Piccole Note, une « nouvelle ère de Trump » qui « le voit aligné sur le génocide de Gaza, à propos duquel, du moins pour l’instant, il peut tout au plus suggérer quelques variantes pour éviter de trop nuire à son image, et sur la guerre en Ukraine, où il y a eu un changement brusque de ton envers Poutine ».
Cette emprise des néo-conservateurs sur Donald Trump inaugure une nouvelle ère de Trump
Le quotidien de géo-politique conclut en émettant des perspectives pour le futur:
« Ce changement semble annoncer un tournant décisif. L’accord avec l’Union européenne le confirme : outre la résolution du problème des tarifs douaniers – dont l’Europe est la principale victime –, il a achevé le travail commencé avec le sabotage du gazoduc Nord Stream 2 par la précédente administration libérale-néoconservatrice américaine, obligeant l’UE à acheter des milliards de dollars de gaz produit aux États-Unis, à des prix manifestement gonflés.
« De plus, elle sera contrainte d’investir des milliards supplémentaires dans l’armement américain, mettant fin à la réticence des pays européens à répondre à l’appel lancé par Trump il y a quelques jours. Cet appel est devenu une contrainte : l’UE achètera des armes qu’elle enverra probablement à l’Ukraine , comme proposé à l’époque.
Sept mois après son entrée en fonction, le mandat de Trump semble déjà terminé et le Trump 2.0 a commencé
« Sans surprise, dès la signature de l’accord, Trump a déclaré qu’il n’accordait à Poutine que quelques jours pour résoudre le conflit ukrainien, réduisant ainsi l’ultimatum précédent de 50 jours. Il est probable qu’à l’expiration de cet ultimatum, outre l’imposition de nouvelles sanctions, le flux d’armes sera rétabli. Reste à savoir si cela réduira au moins le risque d’escalade (mais tout cela ne changera rien à l’issue du conflit, qui reste perdue).
« En bref, sept mois après son entrée en fonction, le mandat de Trump semble déjà terminé et le Trump 2.0 a commencé. Il tentera de s’échapper, il a l’imagination et l’imprévisibilité de son côté, mais aujourd’hui la situation est celle-ci (qui sait ce que sera demain ?).
« Poutine en est également conscient. C’est pourquoi il a appelé hier le véritable maître actuel de la géopolitique impériale, Netanyahou, qui, sans surprise, a envoyé son ministre des Affaires étrangères en Ukraine il y a quelques jours, première visite d’un homme politique israélien à Kiev depuis le début de la guerre. Le tsar et le Premier ministre israélien ont échangé leurs points de vue, notamment sur la Syrie et le dossier nucléaire iranien, mais c’est le symbole qui compte, car Poutine l’a longtemps évité ».
- Source : Médias-Presse-Info