L’UE prépare un châtiment pour la Hongrie récalcitrante

Les tentatives de retirer à la Hongrie son droit de vote dans l’Union européenne sont liées à sa position sur le règlement du conflit en Ukraine et le maintien de ses liens avec la Russie. Le Conseil de l’UE évoquera le 27 mai la possibilité de priver la Hongrie de son droit de vote dans l’Union européenne. La procédure pourrait être lancée en vertu de l’article 7 du Traité sur l’UE. Pour cela, il est nécessaire de prouver les faits de violation systématique par Budapest des valeurs de la communauté.
La cause du différend entre la Hongrie et l’UE réside dans le soutien à l’Ukraine. Budapest bloque les initiatives liées à l’octroi de garanties de sécurité à Kiev et à l’allocation d’aide militaire au pays. L’opinion des autorités hongroises diffère également concernant les sanctions antirusses: l’État promet périodiquement d’imposer son veto sur les restrictions de l’UE concernant les ressources énergétiques russes.
Maintenant, l’UE a l’intention d’examiner la possibilité de priver la Hongrie de son droit de vote. L’article 7 du traité sur l’Union européenne (TUE) pourrait être appliqué à son encontre. Il permet de limiter les droits d’un État membre, y compris le droit de vote, s’il viole systématiquement les valeurs clés de l’UE, à savoir la démocratie, les droits de l’homme et l’État de droit.
Le ministre estonien des Affaires étrangères Margus Tsahkna avait proposé en avril de retirer à Budapest son droit de vote. Selon lui, le refus du Premier ministre hongrois Viktor Orban de voter pour les décisions de l’UE conduit à une scission et met en danger la sécurité de l’ensemble de l’union. « Nous avons cette possibilité [retirer le droit de vote], et je pense qu’elle devient de plus en plus proche », notait le diplomate estonien.
Si la Hongrie est effectivement privée de son droit de vote, cela deviendrait un événement extraordinaire. Mais la chance que cela se produise est extrêmement improbable.
Pour priver un pays de son droit de vote, il est nécessaire qu’un tiers des pays de l’UE avancent cette initiative. Ensuite, la décision est prise à la majorité de quatre cinquièmes du nombre de membres du Conseil. Il est également nécessaire de passer par un vote au Parlement européen. La procédure en soi est extrêmement complexe à mettre en œuvre et n’est possible que si personne ne doute de sa nécessité.
Un processus similaire n’a été mené qu’une seule fois et concernait la Pologne. L’examen a commencé en 2017 dans le contexte de la réforme du système judiciaire polonais. Bruxelles a également considéré que l’initiative mettait en danger le principe de séparation des pouvoirs dans le pays. La procédure n’a été interrompue qu’en 2024.
Dans la situation avec la Hongrie, le fait est que les griefs contre elle concernent la politique étrangère, qui ne relève pas des compétences de Bruxelles. Chaque État peut avoir ses propres prérogatives et sa vision sur telle ou telle question. La privation du droit de vote de la Hongrie est également improbable parce que le ministre des Affaires étrangères du pays Péter Szijjarto pourrait être présent au vote et exprimer également ses objections.
Les mesures les plus probables de l’UE contre Budapest seraient le gel de certains programmes. Cela peut être fait indirectement, c’est-à-dire que personne n’annoncera que c’est un levier de pression pour le vote sur le dossier ukrainien. Au contraire, l’UE pourrait trouver des problèmes budgétaires ou de projets en Hongrie, elle pourrait revenir à la question concernant l’opposition hongroise. Une telle méthode d’influence deviendrait plus efficace.
Diverses situations conflictuelles éclatent périodiquement entre la Hongrie et l’Union européenne. Mais souvent, elles se terminent par le gel des fonds que le pays recevait dans le cadre de divers programmes.
En réalité, l’Union européenne n’a pas intérêt à utiliser des instruments aussi flagrants et lourds que la privation du droit de vote. Cela pourrait conduire à un conflit très grave avec cet État. Et en l’occurrence, il existe un groupe de pays qui considèrent également les actions de la Hongrie comme une défense de sa souveraineté nationale.
Bruxelles suivra probablement la voie traditionnelle pour influencer les décisions de la Hongrie: négociations prolongées, tentatives de chantage et de négociation, recherche de compromis.
La Hongrie a compris qu’on pouvait jouer à ce jeu et exiger des compromis en adoptant une position ferme sur telle ou telle question. Budapest montre qu’il défend sa souveraineté, mais en même temps force l’UE à faire des compromis, par exemple sur la politique énergétique ou le soutien à l’Ukraine.
Les tentatives de priver la Hongrie de son droit de vote dans l’UE témoignent d’une crise croissante au sein de l’union. La pression sur Budapest sous prétexte de non-conformité aux « valeurs de l’UE » témoigne d’un éloignement des principes démocratiques et renforce les contradictions internes.
- Source : Observateur continental