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Mercredi, 25 Déc. 2024

« Remdesivir pour quelques dollars de plus » de Gilead avec l'Agence Européenne du Medicament?

Auteur : Le Collectif Citoyen | Editeur : Walt | Vendredi, 10 Juill. 2020 - 08h02

L’Agence Européenne du Médicament (EMA) sur fond de négligence a approuvé le remdesivir comme traitement pour la Covid-19. Une décision potentiellement à plusieurs milliards d’euros sur une base scientifique plus que questionnable pour ne pas dire faussée. L’étude, pivot de la recommandation du remdesivir, parue dans le New England Journal of Medecine est vraisemblablement une imposture scientifique qui fait que les relecteurs, la communauté scientifique ainsi que les lecteurs lambda sont incapables de retrouver leur chemin dans ce labyrinthe de données et de mots inextricables.

A côté le surdosage d’hydroxychloroquine de l’étude britannique Recovery ferait presque office de bon élève si elle n’avait pas entrainé de probable décès par overdose. De plus, après des semaines où les médecins et chercheurs ont vanté les mérites des études cliniques randomisées en double aveugle à la télévision, le gouvernement français ne peut laisser passer une telle imposture pour un médicament qui n’a rien prouvé.

Les Français se contenteront des Ségur de la Santé, mais pour Gilead, cela sera plutôt devant le film « pour quelques milliards de dollars de plus » qu’ils boiront à la santé des Européens dans ce qui peut s’apparenter à un "hold-up" à ciel ouvert.  Les Français ne seront pas dupes.

Un petit résumé comme mise en bouche avant une analyse détaillée pour ceux qui voudront aller plus loin.

Tout d’abord cette étude devait porter sur 600 patients « modérés » et 400 patients « sévères ».  Les patients modérés recevant trois traitements (remdesivir 5 jours, remdesivir 10 jours et le placebo), les patients sévères recevant deux traitements (remdesivir 5 jours, remdesivir 10 jours).

En premier lieu, il y a eu un changement de l’objectif principal de l’étude, c’est normalement proscrit dans les protocolesMais le début de l’enfumage consiste à s’apercevoir que dans le pre-print qui forme la base de la décision de l’European Medecines Agency et de la FDA, il n’est plus mention de la durée du traitement du tout.  L’arbre d’inclusion et de randomisation des patients indique bien deux bras de l’étude (531 patients recevant le remdesivir vs 518 patients placebo) mais ne parle plus des deux types de patients modérés versus sévères.

En analysant ce tableau d’inclusion, on s’aperçoit que l’on ne parle plus des patients recevant le remdesivir pendant 5 jours ou 10 jours mais apparait la mention que dans le groupe remdesivir 180 patients ont reçu 10 doses et dans le groupe placebo 185 patients l’ont reçu. Il n’est donc plus possible de regarder les patients ayant reçu 5 doses ou 10 doses dans l’étude ni même d’identifier l’état de santé des patients à l’inclusion, et pourtant Gilead conclura sur ces points.

De plus les conclusions de l’étude, sur la diminution du temps d’hospitalisation des patients, mélangent les patients « modérés » et les patients « sévères ».  Il manque tellement de données dans l’étude (pas loin de 200 patients en sont exclus pour des raisons d’absence de données, que l’on ne peut que se poser des questions). Un point surprenant est l’analyse de la mortalité au 14ème jour de l’étude ainsi que l’analyse des scores initiaux de classification des patients, car ils indiquent dans l’annexe (figure S1) qu’il y avait 115 patients dans le groupe placebo avec un score de base de 7 ou 77 avec un score de 6 alors qu’il n’était pas prévu que les patients sévères aient le placebo.

Dans cette étude il est donc impossible de relier le texte aux tableaux hormis à de vagues endroits et il y a une totale incohérence avec les objectifs de base.

Une analyse détaillée des résultats de l’étude pour montrer les incohérences

  1. Le chiffre « 127 patients « de la courbe favorable Plan B
  1. C’est le nombre qui apparaît dans les figures sous « no O2 » dans FIGURE 2 – Plan B qui est la figure la plus favorable à REM (Diapositive 1)

  1. 127, c’est aussi le nombre qui apparaît dans la Table 1 Groupe 4 « all » et reporté dans la table S1 Appendix page 22 (Diapositive 2).

On pourrait en déduire donc que les 127 patients classés en catégorie 4 de sévérité est le groupe de patients « modérés » et que patients classés dans les groupes 1,2 et 3 sont les « mild » ou légers.

La logique voudrait que Gilead considère « modérés » les 127 patients de la baseline en catégorie 4 (ou la courbe plan B appelé ici « sans oxygène ». Un des problèmes est que la table S1 appendix en page 21 dit que le nombre total de patients à « l'inclusion légér et modéré » fait 120 patients. (Diapositive 3).

Donc un décalage de 7 patients qui disparaissent.

  1. Combien de patients y a-t-il dans les catégories 1,2 et 3 à l'inclusion ?  Et quel est l’effet sur les décès dans la catégorie patients « modérés ».

Si on prend la Table 2 ci-dessous dans la diapositive 4, on trouve globalement 1059 patients (538 et 521).  Cependant quand on regarde les catégories 4, 5, 6 et 7 on a un total de 1017 personnes.

Par différence avec l'inclusion on a donc 42 patients qui devraient être dans les catégories 1, 2 et 3. (Diapositive 4).

De plus dans la diapositive 2, il y a 46 patients en inclusion « inconnus ».

En s’intéressant dans la diapositive 4 à la catégorie 8 (les décès), dans le groupe total on trouve 88 personnes dont 33 viennent du bras traité remdesivir et 55 du groupe placebo (en bleu).

Or sur ces 88 décès au 15ème jour seulement 2 viennent du groupe 4 à l'inclusion. Ce groupe 4 étant a priori les « modérés », autant dire que l’on observe : aucun effet de mortalité sur les patients « a priori modérés ».

Sur les 88 décès, 24 viennent du groupe 5 nettement favorable au remdesivir (4 décès versus 20), 26 viennent du groupe 6 et 33 viennent du groupe 7 un peu favorable au remdesivir (14 décès versus 19 dans le groupe placebo)

Le total des décès des groupes 4, 5, 6 et 7 est de 85 décès.

Par différence, le nombre de décès dans les groupes 1, 2 et 3 est donc de 3 (88 total – 85 groupes 4 - 7)

Curieusement c’est sur le groupe 5 à l'inclusion que les chiffres sont les meilleurs pour REM.  Et sur la durée de récupération c’est aussi le groupe 5 qui semble avoir le meilleur résultat pour le traitement remdesivir ; mais l’étude est claire c’est juste en effet l’échelle des groupes.

« L'avantage était le plus apparent chez les patients avec un score ordinal de base de 5 (nécessitant de l'oxygène), une conclusion très probablement en raison de la plus grande taille de l'échantillon dans cette catégorie (puisque le test d'interaction du traitement par le score de base sur l'échelle ordinale n'était pas significatif) »

On retrouve cette analyse dans l’article de fiercepharma.

  1. Ce que nous dit la table S2 en annexe

Ce tableau reprend les deux colonnes avec les deux bras de l’étude : total remdesivir et total placebo.

  • En base (à l'inclusion) on retrouve bien 538 patients sur remdesivir et 521 patients avec le placebo pour un total de 1059 patients.  Conforme au tableau 2.
  • Dans ce tableau on trouve au jour 15, 844 patients dont 434 sur remdesivir et 410 sur placebo.

Et là ce tableau nous donne une analyse non pas par rapport au groupe de base 4, 5, 6 et 7, mais en deux groupes nouveaux « léger/modéré » et « sévère » (Diapositive 5)

L’intérêt est donc de comparer le tableau 2 et le tableau S2 et d’essayer de comprendre comment Gilead a construit le groupe « léger et modéré » puisqu’aucune explication n’est donnée. 

Le tableau S2 annexe est assez clair :

  • au départ, il n’y a au maximum que 119 patients « légers et modérés » (62 patients sur remdesivir et 57 patients sur placebo)
  • au jour 15, il y a au maximum 96 patients « légers et modérés » (51 patients sur remdesivir et 45 avec le placebo)
  • et sur les 51 patients traités au remdesivir, 48 se retrouvent dans avec un score 1,2,3,4 au 15ème jour et sur les 45 patients placebo, 40 se retrouvent avec un score 1,2,3,4 au 15ème jour.

Autrement dit, aucun bénéfice du remdesivir par rapport au placebo sur les patients « légers à modérés » de l’étude.

Ce résultat est reflété en dernière ligne de ce tableau avec le « odd ratio » et la probabilité « p ».

Pour le groupe « léger modéré » le ratio est de 1.13.  Un ratio proche de 1 veut dire qu’il n’y a pas de différence.  Cependant les « p value » sont absentes des deux groupes « légers/modérés » et « sévères » au motif qu’ils n’ont pas fait le test sur les sous-groupes, alors que la totalité de l’échantillon le p-value est de 0.001.  Cela ne manquera pas d’attirer l’attention de notre expert.

Autrement dit, les rapporteurs donnent la valeur « p » pour l’échantillon total, mais se gardent bien de la donner pour chacun des 2 groupes, c’est dire que sur le groupe « modéré » il faut cacher le vrai résultat.

  1. Reste donc la double question : où Gilead est-il allé chercher la courbe plan B avec 127 patients ?  Et, comment trouver la probabilité d’une amélioration de 65% de l’état des patients au jour 11 avec un traitement remdesivir 5 jours pour le groupe « légers/modérés » ?

Sachant que pour distinguer le traitement remdesivir 5 jours et 10 jours, c’est impossible car tout a été volontairement mélangé.

En page 19 de l’annexe on trouve cette mention (traduction en français page 19 annexe) :

« Dans le bras remdesivir, 180 participants ont reçu 10 doses de remdesivir, 168 patients ont reçu

De plus on peut lire dans diverses conclusions de Gilead les éléments suivants (traduction en français) :

« L’étude a démontré que les patients du groupe de traitement remdesivir 5 jours étaient 65 % plus susceptibles d’avoir une amélioration clinique au jour 11 que ceux du groupe de soins standard (Ratio de 1,65 [IC à 95 % 1,09-2,48]; p=0,017). Les chances d’amélioration de l’état clinique avec le traitement de 10 jours de remdesivir par rapport à la norme de soins étaient également favorables, tendant vers mais n’atteignant pas la signification statistique (Ration de 1,31 [IC 95% 0.88-1.95]; p=0.18) »

Alors que le préprint de l’étude écrit partout qu'il n'y a que remdesivir 10 jours.

« Méthodologie :  Nous avons mené un essai en double aveugle, randomisé et contrôlé avec un goupe placebo et un groupe traité au remdesivir intraveineux chez des adultes hospitalisés avec Covid-19 ayant des symptômes dans les voies respiratoires inférieures. Les patients ont été assignés au hasard pour recevoir soit le remdesivir (dose de charge de 200 mg le jour 1, suivi de 100 mg par jour pendant jusqu’à 9 jours supplémentaires) ou un placebo jusqu’à 10 jours »

« Les résultats préliminaires de cet essai suggèrent qu’un traitement de remdesivir de 10 jours était supérieur au placebo. »

Incompréhensible.

Voilà ce que Gilead et l'étude disent :

  • Aucune différence statistiquement significative sur la mortalité et sur la dégradation clinique du groupe placebo versus le groupe remdesivir.
  • Au maximum 120 patients « légers et modérés » à l'inclusion dont au maximum 96 de ces patients ont été analysés au jour 15.
  • Sur le groupe 4 en base, a priori le plus proche de « modéré » pas de mortalité à jour 15 (en fait 1 décès dans chaque groupe).
  • Sur le groupe 4 en base, le taux d’amélioration est de 90.1% pour remdesivir versus 78.4% pour le placebo, c’est-à-dire un ratio de 1.13 non significatif statistiquement (Fig S1 annexe).
  • L’étude ne fait pas de séparation claire entre le traitement remdesivir 10 jours et 5 jours comme prévu dans le protocole et encore moins dans les résultats.
  • Les patients « modérés » traités au remdesivir pendant 5 jours ont un ratio d’amélioration de 1.65 avec p = 0.017 c’est-à-dire à peu près 90% d’amélioration pour le remdesivir 5 jours versus 55% pour placebo.  D’où viennent ces chiffres car ils ne sont nulle part dans les tableaux.
  • Les patients « modérés » avec un traitement remdesivir 5 jours ont un ratio d’amélioration de 1.35 non significatif.
  • Gilead explicite que la mesure a été faite au jour 11.

Alors que le rapport de l’étude ne donne pas de résultats différenciés pour les traitements 5 jours et 10 jours et que la procédure de base est 10 jours, ce qui fait que remdesivir-5 jours et la donnée jour 11 sont inconnus dans l’étude !

Comment une telle étude qui ne passe pas les tests minimums de cohérence et de concordance des données, a-t-elle pu être la base d’un rapport du CHMP (comité des médicaments à usage humain) et d’une décision d’autorisation de l’Agence Européene du Médicament ?

Cela ressemble de plus en plus à la fameuse étude Mehra de The Lancet qui a dû être retirée par ses auteurs faute de pouvoir prouver l’origine des données.

Nous ne pouvons pas faire confiance à l’Agence Européenne du Médicament, qui de par ses recommandations construites sur des bases douteuses, publie une décision qui devient applicable par les Etats membres.  Cette Agence doit faire l’objet d’un audit approfondi qui mettra sans aucun doute à jour des dysfonctionnements entraînant des risques sanitaires pour les Européens mais aussi de lourdes conséquences financières puisque les Etats se doivent d’appliquer les recommandations ne conservant visiblement leur souveraineté nationale que sur le montant pris en charge ou remboursé. Quelques 2340 dollars par traitement aux Etats-Unis.

La santé n'a pas de prix dit-on, mais pour quelques euros de plus on aimerait voir et avoir des résultats probants.


- Source : FranceSoir

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