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Les EHS (électro-hypersensibles) : où et comment vivent-ils en France ?

Auteur : Alice Pouilloux | Editeur : Walt | Samedi, 23 Mai 2020 - 13h11

Certains électro-hypersensibles (EHS) ont trouvé refuge dans des habitats d’urgence, d’autres ont passé l’essentiel du confinement sous des tissus de protection. Pour eux comme pour 3,3 millions de Français dont je fais partie, l’enfer, c’est les ondes.

Les électro-hypersensibles, des parias

Être EHS, c’est par exemple, comme dans mon cas, souffrir de maux de tête insupportables en présence d’un smartphone à vingt mètres, d’une box internet deux étages en dessous ou à proximité d’une lampe de bureau. Le confinement représenta pour bien des personnes EHS un accroissement de leurs symptômes, en raison des voisins connectés toute la journée. Une nécessité vitale dans ce cas, fuir… mais où ? Les zones blanches sont en voie de disparition, le gouvernement s’en est fixé l’objectif en 2018 avec la loi Élan. L’espace public, lui, est interdit à ces parias des temps hyper-connectés : transports collectifs, terrasses de cafés, hôpitaux, lieux de culture, de formation, de culte sont infréquentables pour beaucoup d’EHS. En fonction du degré d’atteinte, travailler s’avère impossible.

Les effets prouvés des ondes électromagnétiques

L’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation et du travail) reconnaît l’électro-hypersensibilité depuis 2018 : un pas de géant selon les associations. Pourtant, le lien causal avec l’exposition aux champs électromagnétiques artificiels (issus des technologies sans fil notamment) peine à être admis malgré les très nombreuses études internationales non contestées. Alzheimer, cancers, infertilité, électro-hypersensibilité (EHS) sont quelques conséquences possibles de l’exposition aux champs électromagnétiques indiquées dans près de 2000 études depuis 2012 et référencées dans ce document de l’association Poem26. Une étude des Dr Belpomme et Irigaray, publiée en mars 2020, confirme le lien entre ondes électromagnétiques artificielles et électro-hypersensibilité. Pour le docteur Béatrice Milbert, médecin chercheur pionnière de l’électro-hypersensibilité en France, « les électrosensibles sont des sentinelles environnementales indiquant clairement que la densité du champ électromagnétique dans l’environnement dépasse les mesures acceptables par le corps humain » (vous pourrez lire notre interview complète de Béatrice Milbert dans le prochain numéro de Nexus n°128 disponible sur nexus.fr début juin). Le pronostic des spécialistes fait froid dans le dos : il y aura 50 % d’EHS d’ici 50 ans si rien n’est fait.

Comment devient-on malade des ondes ?

La pathologie s’installe parfois du jour au lendemain à l’occasion de la mise en service du courant porteur en ligne Linky d’Enedis comme en témoigne le docteur Béatrice Milbert, qui reçoit des EHS en consultation depuis 20 ans, ou lors de la mise en service d’antennes 5G comme rapporté par des Suisses genevois. Le plus souvent, cependant, le processus prend plusieurs années. La personne souffre d’abord de symptômes légers quand elle s’expose aux technologies sans fil (maux de tête en téléphonant avec son smartphone par exemple). Ensuite, en l’absence de protection s’opère un glissement vers des symptômes de plus en plus aigus en présence de fréquences élargies, comme devant un ordinateur en WiFi, une plaque à induction ou une ligne haute tension : tachycardies, sifflements dans les oreilles, douleurs musculaires ou oppression thoracique peuvent s’installer.

Trois axes pour se soigner

Pour se soigner, éviter toutes les pollutions, en particulier électromagnétiques et chimiques, est indispensable. Il faut aussi éliminer les polluants du corps comme les parasites ou métaux lourds qui amplifient l’inflammation, ainsi que soutenir le système nerveux et rééquilibrer l’organisme dans son ensemble. Tout un programme à l’issu duquel, après plusieurs années, environ 60 % des patients retrouvent une vie presque normale. Dans la pratique, pour beaucoup d’EHS, l’allocation adulte handicapée (accordée dans certains départements) ne suffit pas à blinder le logement et financer le traitement médical, non remboursé par la Sécurité sociale. La Suède, où 10 % de la population est reconnue EHS, est souvent citée en exemple : la pathologie est considérée comme un handicap, une aide financière est allouée et les frais de blindage de l’habitat sont pris en charge.

Des perspectives et de l’impuissance

Quelques initiatives voient le jour en France : en décembre 2019, une dizaine de parlementaires ont déposé un projet de loi en vue d’autoriser les EHS à bâtir leur habitation sur des terrains non constructibles hors des ondes. Plus sûr d’aboutir, le projet de la mairie d’Aubervilliers est encadré par David Bruno avec Ondes-expertise : 7 salles en zone blanche dans sa nouvelle bibliothèque. À Paris, l’hôtel Le Pavillon possède même trois chambres blindées spécifiques pour personnes électro-sensibles, avec protection basses et hautes fréquences. L’association Zone Blanche, quant à elle, envisage d’ouvrir un écovillage/centre de recherche pour EHS dans les Hautes-Alpes, d’ici 5 ans dans le meilleur des cas. Pendant ce temps, les grandes villes testent la 5G (lire notre article sur la puissance des antennes 5G) et le « new deal mobile », dispositif rassemblant le gouvernement, les opérateurs et l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes), prévoit le développement de nouveaux sites mobiles équipés 5G dans les zones rurales « afin de renforcer la couverture et la qualité du réseau ». Ces jours-ci, quelque part dans une petite zone blanche bretonne, Danièle, électro-hypersensible reconnue handicapée, nous témoigne son impuissance. Réfugiée des ondes dans sa caravane garée sur un parking public en forêt, elle se voit désormais menacée d’expulsion par l’Office national des forêts. Elle ne sait pas où aller, la pollution électromagnétique est partout. Sa situation révèle l’extrême difficulté que rencontrent les EHS en France pour s’abriter et concerne finalement tous les Français de plus en plus massivement exposés aux ondes.

Lire aussi:

5G : le déploiement

d’abord, l’évaluation

des risques sanitaires

ensuite


- Source : Nexus

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