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Le projet « Blair-Erdogan-Mechaal » pour Gaza et ses répercussions en Syrie

Auteur : Nasser Kandil-Transcription et traduction Mouna Alno-Nakhal | Editeur : Walt | Mardi, 25 Août 2015 - 21h30

I-Que se passe-t-il en coulisse des négociations menées par Tony Blair pour la levée du blocus de Gaza ?

La constante stratégique occidentale étant la sécurité et la suprématie d’Israël, je me propose de vous exposer ce qui se trame contre la Palestine historique et plus particulièrement le projet concernant le devenir de Gaza. Une lecture personnelle certes, mais basée sur des faits qui commencent à envahir la presse, certains parlant de simples pourparlers, d’autres de négociations directes ou indirectes entre le Hamas et Israël.

Un projet en cours d’arrangement et dont le parrain marionnettiste est Tony Blair, le promoteur est Rajab Tayib Erdogan, et le complice apparent est Khaled Mechaal [dirigeant du Bureau politique du Hamas] sans que l’on puisse présumer jusqu’à quel point il réussira à convaincre les autres dirigeants du Hamas et notamment les Brigades al-Qassam [branche militaire du Hamas].

L’avenir le dira, mais en tout cas ceci pourrait expliquer pourquoi Israël a accusé le mouvement du Jihad islamique palestinien d’avoir lancé, le Jeudi 20 août, des roquettes sur le plateau du Golan syrien occupé et sur la Galilée adjacente, alors qu’il sait parfaitement qu’il n’y est pour rien. Autrement dit, le raid israélien du 21 août sur le sud syrien à Al-Qunaitra, en représailles à ces tirs de roquettes, est un message adressé au Jihad islamique et en relation avec la bande de Gaza, non avec le Golan. Nous y reviendrons […].

Il faut savoir que selon le mythe sioniste c’est la Cisjordanie [ou Judée-Samarie], de Tulkarem au nord jusque Al-Khalil [Hébron] au sud, qui ferait partie intégrante de la terre promise, non Gaza qui a toujours été sous tutelle égyptienne, ni Haïfa, ni Yafa, ni la côte méditerranéenne. C’est pourquoi je n’ai jamais cru qu’Israël accepterait une solution de paix qui l’obligerait à restituer les territoires occupés en 1967 pour se contenter de ses frontières de 1948.

Cela, aucun dirigeant israélien n’oserait l’accepter, tout comme aucun dirigeant palestinien n’oserait signer l’unique alternative se résumant à des directions autonomes, ici ou là, sous contrôle de l’occupant. Hillary Clinton n’a-t-elle pas essuyé le refus cinglant de Netanyahou à sa proposition de déménager 25 000 colons de Tulkarem à Jéricho ?

D’où l’idée d’un État palestinien à Gaza, [une bande de terre de 41 km de long et de 6 à 12 km de large, Israël ayant procédé unilatéralement au retrait de son armée et d’environ 9000 colons en 2005], avec ouverture des points de passage, port, aéroport, passeport, électricité, eau, reconstruction, élections, Assemblée législative, etc… ; la Turquie garantissant que Gaza ne menacerait plus jamais la sécurité d’Israël ; le Hamas parlant d’une « trêve de longue durée » avec l’espoir de libérer le reste des territoires occupés par la seule force de ses négociations politiques [sic].

Ce qui signifie que sous le slogan « Votre État palestinien est Gaza », Israël se prépare à éliminer l’Autorité palestinienne et à poursuivre jusqu’au bout son projet d’un État juif, lequel devra coloniser toute la Cisjordanie et Jérusalem au prix de souffrances et d’exterminations qui dépasseront celles endurées par le peuple palestinien en 1948 […]. Ce n’est plus une théorie qui a germé depuis longtemps dans l’esprit de certains, c’est bel et bien le projet confié à Erdogan.

À Erdogan coincé dans une situation désespérée en attendant les élections législatives anticipées du 1er novembre prochain, où ceux qui ont voté pour lui parce qu’ils pensaient qu’il était le plus fort risquent de changer d’avis ; où ceux qui n’ont pas voté pour l’opposition parce qu’ils pensaient qu’elle était perdue d’avance voteront contre lui. Deux mois durant lesquels il a absolument besoin que les États-Unis lui donnent le feu vert, et que les Européens ferment les yeux, pour qu’il puisse briser le cou des Kurdes, au point qu’ils n’oseront même pas songer à voter pour l’opposition ; ceci en sachant que 2% seulement de votes supplémentaires en sa faveur, par rapport aux dernières élections, suffiraient à lui garantir les 65 sièges nécessaires à sa victoire.

C’est le prix à payer pour qu’Israël ne s’oppose plus à la signature de l’accord sur le nucléaire iranien et même offre ses services à l’Administration US pour le faire accepter à ceux qui s’y opposent et à l’opinion publique américaine : « Gaza est le futur État palestinien, accordez à Erdogan ce qu’il demande en Turquie ! ». C’est ainsi que se formera le trio « Israël-Turquie-Frères Musulmans », ces derniers ayant un État à Gaza sous la bannière du Hamas.

Que ce projet réussisse ou échoue est un autre problème. Ce qui est certain est que les israéliens étudient sérieusement la levée du blocus de Gaza dans ces conditions de sortie du Hamas hors du camp de la Résistance palestinienne, en exploitant une carte gagnante à tous les coups: le souci humanitaire envers la population de Gaza qui a tant souffert […].

II-Que se passe-t-il au Golan syrien ?

Pour le comprendre il nous faut analyser les comportements d’Israël en cette période de recherche de solutions par les uns et les autres. Nous avons déjà parlé du rapport de DEBKAfile considérant que la Russie et les États-Unis courtisaient les Saoudiens pour sauver Al-Assad, mettant en danger Israël et la Jordanie… »; lequel rapport nous a amené à prédire qu’Israël ferait tout pour torpiller le rapprochement syro-saoudien parrainé par la Russie.

Ce qui fut fait par la rétractation du ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir, en pleine conférence de presse avec M. Lavrov. En effet, il fallait comprendre ce rapport comme un avertissement en direction de l’allié saoudien qui ne peut espérer jouer cavalier seul à ce stade, même si l’allié américain pouvait être d’accord sur le principe, vue la priorité de la lutte contre le terrorisme […].

En effet à partir du moment où les États-Unis, l’Arabie Saoudite et l’Iran, se joindraient à la Russie pour trouver une solution en Syrie et au Yémen de telle sorte que l’Arabie Saoudite puisse sauver la face, comment Israël pourrait-il avoir voix au chapitre et concrétiser le projet « Blair-Erdogan-Mechaal » pour Gaza ? Comment, sinon par une action d’éclat sur le terrain et par l’exploitation des groupes armés, à ses ordres, dans le sud de la Syrie ?

D’où son raid sur Al-Quneitra dans le Golan syrien. Une action d’éclat qui ne démontre nullement qu’Israël est prêt à mener sa guerre tout seul […], mais qu’il envoie un message complémentaire à celui transmis par DEBKAfile :

« Nous sommes là ! Nous n’avons pas couvé et autorisé les groupes armés à occuper le sud de la Syrie pour que la solution se fasse dans notre dos. D’ailleurs, ces groupes armés ainsi que la Jordanie sont des atouts dans nos mains, non dans celles de l’Arabie Saoudite qui n’a pour elle que Zahrane Allouche [chef du Front islamique et de Jaïch al-Islam]. Tant qu’il en sera ainsi, c’est nous qui décidons ».

En d’autres termes, ce énième raid envoie le message suivant : Israël est désormais le seul joueur dans le sud de la Syrie, la Turquie étant le seul joueur dans le nord ; s’il fallait ne s’intéresser qu’à la lutte contre le terrorisme, il faudrait se focaliser uniquement sur Daech [l’État islamique]  et oublier Al-Nosra ainsi que tous les autres groupes terroristes sur lesquels Israël et la Turquie se sont entendus ; l’Arabie Saoudite n’a rien à faire en Syrie, Israël parie sur la Turquie.

III. Pourquoi parier sur la Turquie ?

Israël parie sur la Turquie, aussi bien contre l’État syrien que contre la Résistance libanaise, la Résistance palestinienne et l’Autorité palestinienne. Ceci car Erdogan réglerait tous ses problèmes si jamais il réussissait à encaisser le précieux chèque du montant de ladite « carte palestinienne » au profit de la sécurité d’Israël. Il soulagerait l’Occident qui lui accorderait le grand prix tant attendu en Syrie et ailleurs, pour ne plus avoir à se creuser la tête en cherchant comment assurer une continuité géographique entre Gaza et les lambeaux de la prétendue solution à deux États.

Sans oublier la concrétisation du projet d’alliance de l’Occident avec les Frères Musulmans qui auraient leur capitale à Gaza, ce qui pourrait faciliter leur retour au pouvoir en Égypte, leur permettrait de partager le pouvoir en Libye, consoliderait éventuellement la situation de Ghannouchi en Tunisie, et pourrait même amener les Ansarullah à participer au futur gouvernement du Yémen. Tout ceci parce que la victoire de Gaza a été vendue au Turc et au Qatari.

IV-Pourquoi maintenant ?

Le trait d’union des fronts successifs dans le sud de la Syrie allant d’Al-Qusayr, à Yabroud, à Zabadani, puis à Al-Quneitra ; la réponse est que la victoire de la Syrie et du Hezbollah à Zabadani signifie la fin de la guerre du Qalamoun, par élimination des groupes terroristes armés à la frontière syro-libanaise, et que la prochaine étape du nettoyage sera donc la guerre d’Al-Quneitra.

Par conséquent en s’impliquant de la sorte, Israël prévient que ce sera une toute autre affaire bien plus difficile et compliquée qu’à Zabadani, car les groupes terroristes et notamment Al-Nosra, branche d’Al-Qaïda en Syrie, seront soutenus et protégés par le feu de l’aviation israélienne. Israël ne permettra pas la défaite d’Al-Nosra, ni l’échec du projet pour Gaza.

Le message israélien a été reçu cinq sur cinq. Nous devons donc nous attendre à encore plus d’escalade dans les deux prochains mois, en sachant que la réponse viendra en temps utile, comme pour les raids 1 et 2 sur Joumraya […].

Source : Extraits de l’émission « 60 minutes avec Nasser Kandil »

Monsieur Nasser Kandil est libanais, ancien député, Directeur de TopNews-nasser-kandil, et Rédacteur en chef du quotidien libanais Al-Binaa


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