La Russie ne renforce pas ses capacités militaires à l’étranger, elle ne fait que répondre aux menaces engendrées par les expansions américaine et de l’OTAN à ses frontières, a indiqué Vladimir Poutine dans une interview au Corriere della Sera.
Dans le quotidien italien, le président russe, a souligné que personne ne devrait prendre au sérieux l’hypothèse d’une «agression russe», dont l’Occident n’arrête pas de parler, étant donné que l’existence d’un conflit global dans le monde moderne est inimaginable.
«Je crois que seul un fou, et seulement dans un rêve, peut imaginer que la Russie attaque soudainement l’OTAN. Il me semble que certains pays tirent simplement profit des craintes des gens par rapport à la Russie. Ils veulent juste jouer le rôle de pays aux avant-postes qui devraient recevoir certains équipements militaires supplémentaires, des aides économiques, financières autres», a fait remarquer Vladimir Poutine.
D’autre pays pourraient délibérément alimenter de telles craintes, a-t-il ajouté en expliquant qu’hypothétiquement les Etats-Unis pourraient avoir besoin d’une menace extérieure pour maintenir leur leadership au sein de la communauté atlantique. «L’Iran n’est évidemment pas assez dangereux ou assez grand pour ça», a noté le président russe non sans ironie.
Vladimir Poutine a invité les journalistes à comparer le déploiement militaire global des forces russes et celui des Etats-Unis/OTAN, de même que leur niveau respectif de dépenses militaires. Il les a aussi encouragés à observer les mesures prises concernant le Traité anti-missile ABM (Anti-Balistic Missile) depuis que l’Union soviétique s’est effondrée.
La politique militaire de la Russie n’est «ni globale, ni offensive, ni agressive», a ajouté le président russe, ajoutant que la Russie n’avait pratiquement pas de bases militaires à l’étranger et que les rares bases qui subsistent sont des vestiges de son passé soviétique.
Il a encore expliqué qu’il y avait de petits contingents de forces russes au Tadjikistan sur la frontière avec Afghanistan, principalement en raison de la menace terroriste dans cette zone. Il y a aussi une base aérienne au Kirghizstan qui a été ouverte à la demande des autorités kirghizes pour lutter contre le terrorisme. La Russie possède encore une unité militaire en Arménie qui a été déployée pour maintenir la stabilité dans la région et non pas pour contrer une menace extérieure.
En fait, la Russie a travaillé à la réduction de sa présence militaire globale tandis que Washington faisait le contraire. «Nous avons démantelé nos bases dans différentes régions, y compris Cuba, le Vietnam, etc.», a encore souligné le maître du Kremlin avant d’ajouter : «Je vous propose de publier dans votre quotidien une carte du monde et d’y répertorier toutes les bases américaines, vous verrez la différence».
Toujours est-il qu’il ne faudra que 17 minutes à un missile lancé depuis des sous-marins américains en alerte permanente au large des côtes norvégiennes pour atteindre Moscou, a précisé Vladimir Poutine tout en faisant remarquer qu’aucun média ne qualifie cela de menace. Les Etats-Unis effectuent sans arrêt des vols de bombardiers stratégiques le long des frontières russes depuis le temps de l’Union soviétique, tandis que la Russie a arrêté au début des années 1990 et ne les a repris que récemment.
Les Etats-Unis sont en train de déployer «des systèmes anti-missiles, des bases et des radars situés sur le territoire européen ou en mer», en dépit des avertissements répétés de la Russie sur le fait que cela met en péril la sécurité internationale.
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Il est révélateur de noter que ce sont les Etats-Unis qui ont choisi de se retirer du Traité ABM limitant les arsenaux de missiles anti-missiles balistiques, qui d’après Vladimir Poutine était «la pierre angulaire de tout le système de sécurité internationale». Et à propos de cette décision américaine, le chef de l’Etat russe a fait la réflexion suivante : «Quelqu’un s’attendait-il à ce que la Russie désarme unilatéralement ?»
Il a expliqué que Moscou avait essayé de dissuader les Etats-Unis de se retirer du traité et au lieu de ça de «créer un système ABM commun entre la Russie, les Etats-Unis et l’Europe». Cette proposition a été rejetée, et la Russie a dû commencer à développer un système de «défense antibalistique» pour garantir l’équilibre stratégique. D’après Vladimir Poutine, la Russie a même fait «des progrès significatifs dans ce domaine».
«Tous ce que nous faisons n’est qu’une réponse aux menaces qui émergent contre nous. D’ailleurs, ce que nous faisons est limité quant à l’échelle et à la portée, mais cela reste quand-même suffisant pour assurer la sécurité de la Russie», a souligné Vladimir Poutine.
Reste que le président russe a déclaré qu’il considérait les Etats-Unis non pas comme un rival de la Russie, mais plutôt comme un partenaire concernant de nombreux problèmes mondiaux, tels que le terrorisme mondial, les crises du Moyen-Orient et le programme nucléaire de l’Iran.
«Nous ne sommes pas seulement des partenaires ; je dirais que nous sommes des alliés sur les questions liées à la non-prolifération des armes de destruction massive. Nous sommes sans doute des alliés dans la lutte contre le terrorisme. Il y a aussi quelques autres domaines de collaboration. Le sujet central d’Expo Milano…est encore un autre exemple de notre travail en commun», a souligné Vladimir Poutine.
Expo Milano 2015 est l’exposition universelle qui se tient cette année à Milan, en Italie, et qui a pour slogan «Nourrir la planète, l’énergie pour la vie». Vladimir Poutine se rendra en personne à cette exposition à laquelle la Russie participe en présentant ses propres technologies et innovations.