« Tout autour de moi était déchiqueté » : Israël commet un nouveau massacre dans la « zone de sécurité » de Gaza
Israël a commis un nouveau massacre dans une zone qu’il avait désignée comme « zone de sécurité ». Les frappes aériennes ont enterré des familles entières dans le sable.
Lampes de poche à la main, des secouristes percent l’obscurité dense sur le sable à al-Mawasi, le campement de tentes abritant des Palestinien·nes déplacé·es à Khan Younis. Un groupe d’hommes armés de pelles s’efforce d’enlever le sable au milieu d’un cratère géant créé par une frappe aérienne israélienne sur la « zone de sécurité » désignée par les Israélien·nes. Dans un témoignage vidéo recueilli pour Mondoweiss, des secouristes sortent du sable des couvertures à moitié enterrées et expliquent qu’ils tentent d’extraire des personnes de l’énorme cratère causé par une frappe aérienne israélienne.
Le massacre israélien de Mawasi aux premières heures du mardi 10 septembre est le dernier en date d’une série de frappes israéliennes ciblées sur des camps de déplacés dans la bande de Gaza, ainsi que le bombardement d’abris scolaires. À l’heure où nous écrivons ces lignes, le massacre a coûté la vie à au moins 40 Palestiniens et en a blessé 60 autres, selon le ministère de la santé basé à Gaza. Il s’agit également du deuxième grand massacre dans la « zone de sécurité » de Mawasi et du cinquième dans l’ensemble de la région. Le premier grand massacre a eu lieu à la mi-juillet et a entraîné la mort de 90 Palestinien·nes. Lors de cette attaque, Israël avait affirmé viser le chef des brigades Qassam du Hamas, Muhammad al-Deif. Lors de l’attaque la plus récente de mardi, l’armée israélienne a affirmé viser un centre de commandement du Hamas.
Selon l’Observatoire euro-méditerranéen des droits de l’homme, le dernier massacre à al-Mawasi a été perpétré à l’aide de bombes fabriquées aux États-Unis et dotées d’une « grande capacité de destruction ». Le secrétaire général des Nations unies, le coordinateur des Nations unies pour les affaires humanitaires en Palestine et le chef de la diplomatie de l’Union européenne ont tous condamné le massacre.
Une attaque sans avertissement
« On nous a dit d’aller à al-Mawasi, alors nous sommes allé·es à al-Mawasi », explique à Mondoweiss un homme d’âge moyen vêtu d’un maillot de corps bleu, au lendemain de l’attaque. « On ne nous a donné aucun avertissement. On ne nous a pas dit de bouger ou qu’il s’agissait d’une zone de combat. On a été frappés par surprise ».
« Je me suis réveillé en cherchant mes enfants, puis je suis sorti et j’ai vu des gens dispersés. Un mort par ici, un autre par là », poursuit-il. « Regardez ce cratère. Il fait au moins 20 mètres de large. Bien sûr, il y a d’autres personnes sous le sable, mais nous ne le saurons que demain matin ».
« Celles et ceux qui sont ici sont des pauvres qui fuient les bombardements », explique un autre habitant de Mawasi, âgé, à la caméra. « Certains d’entre nous paient un loyer pour l’endroit où ils ou elles se trouvent, d’autres sont autorisé·es à rester gratuitement, mais ce sont tous des gens normaux. Aucun d’entre nous ne fait partie de la résistance ou quoi que ce soit d’autre ».
« Nous avons sorti beaucoup de martyr·es et de blessé·es. Il y en a encore beaucoup sous le sable, mais la plupart sont des femmes et des enfants », s’exclame-t-il.
Au cours des dernières semaines, l’armée israélienne a réduit les zones qu’elle a désignées comme « zones de sécurité » à Gaza à moins de 30 % de la superficie de la bande. Plus d’un million de personnes, soit la moitié de la population de Gaza, sont contraintes de s’entasser dans ces petites zones. Chaque fois que l’armée israélienne bombarde ces campements, des familles entières sont souvent tuées. Lors du massacre de Mawasi, mardi, des familles entières ont été enterrées dans le sable.
Les bombes israéliennes changent le paysage
Bien que l’armée israélienne affirme que chaque attaque conduisant à un massacre vise le Hamas, les campements sont en grande partie improvisés et ne disposent que de peu d’infrastructures qui pourraient vraisemblablement être utilisées par le Hamas comme « centres de commandement ». À al-Mawasi, les Palestinien·nes ont installé des toilettes improvisées dans les allées, seules structures existantes à part les tentes fragiles. Lorsque les bombes israéliennes tombent sur ces zones, elles changent littéralement le paysage de la région.
« L’explosion a été si forte que même l’eau est sortie du sol », raconte un survivant déplacé à Mondoweiss. « Comme vous pouvez le voir, il n’y a que des tentes autour de nous, rien d’autre », souligne-t-il. « Imaginez que vous dormez et que tout d’un coup vous vous rendez compte que tout ce qui vous entoure est en train d’être déchiqueté. Bien sûr, nous avons été choqués ! Au début, je ne voyais rien ni personne devant moi », ajoute-t-il.
« Il y avait cinq tentes ici », dit-il en montrant l’un des cratères. « Et puis quatre tentes là-bas, et quelques toilettes de ce côté-là.
« Je me suis réveillé et je me suis retrouvé couvert de sang », raconte un autre survivant, un bandage sur le front et la moitié du visage brûlée à la suite d’un précédent incident. « J’ai couru en criant, appelant ma famille, pour découvrir que la maison voisine s’était effondrée sur eux, mais Dieu merci, ils et elles ont tous survécu ».
« Ils [l’armée israélienne] avaient bombardé un autre campement de l’autre côté, et la maison ici s’est effondrée sur les gens », ajoute-t-il à bout de souffle. « Je ne sais pas quoi dire d’autre. Que Dieu nous vienne en aide ».
Hassan Suleih a recueilli des témoignages pour ce rapport.
Traduction : JB pour l’Agence Média Palestine
L`auteur, Qassam Muaddi, est rédacteur spécialiste de la Palestine pour Mondoweiss. Suivez-le sur Twitter/X à @QassaMMuaddi.
- Source : Mondoweiss