En Europe, une percée nationaliste à la tête des parlements
Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, des partis nationalistes ont décroché quatre présidences de parlements dans des pays européens, la République tchèque étant l'exemple le plus récent, un défi de plus en plus flagrant pour l'UE.
Mercredi 5 novembre dernier, le Parlement tchèque a élu le chef du parti de droite SPD Tomio Okamura à sa tête.
Dès le lendemain, celui qui prône l'arrêt de l'aide bilatérale à l'Ukraine, a fait retirer le drapeau ukrainien du bâtiment de l'Assemblée, hissé depuis un moment déjà.
Italie fin 2022, Autriche en 2024, Slovaquie plus tôt cette année et République tchèque la semaine passée : ces pays ont rejoint les rangs de la Hongrie, avec sa chambre acquise au nationaliste Viktor Orban depuis 2010.
Chaque fois, les nationalistes ont décroché la présidence suite à un accord avec d'autres formations politiques, ne jouissant pas - sauf à Budapest - de la majorité absolue.
De plus, ils ne sont pas de la même couleur politique que leur chef de gouvernement.
Une explication à cette tendance selon Catherine Fieschi, chercheuse associée au centre Robert-Schuman de l'Institut universitaire de Florence, le dirigeant hongrois "a ouvert la voie".
"Il a démontré qu'il était possible de rester dans l'Union européenne" sans toutefois respecter tous les traités.
Mais pour la spécialiste, ce n'est pas un hasard si cette accélération a lieu dans des pays d'Europe centrale, la réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis ayant créé une "dynamique" forte dans ces pays.
"Son personnages n'agit pas comme un repoussoir" dans cette partie de l'Europe, où il y a aussi une question de "culture politique" différente et une relation parfois "ambiguë" avec la Russie.
La position géographique plus proche de Moscou et un passé communiste partagé les conduisent à vouloir éviter "l'escalade" avec le Kremlin plus qu'ailleurs, estime-t-elle.
Enfin, tous ces pays bénéficient de fonds européens et une partie de leur opinion publique, comme de leur classe politique, craint de devoir partager cet argent lors d'un nouvel élargissement de l'UE, estime-t-elle encore.
Ils vont "y perdre quelque chose", selon eux, alors que la perspective d'une adhésion de l'Albanie ou du Monténégro s'approche, mais surtout en cas d'intégration de ce vaste pays et gouffre qu'est l'Ukraine.
Pour les formations nationalistes, qui ont profité de ces inquiétudes, obtenir la présidence du Parlement est, selon les experts, une avancée indéniable.
En Slovaquie, le parti HLAS a décroché le perchoir en mars grâce à l'appui qu'il offre depuis 2023 au dirigeant Robert Fico et à l'extrême droite du parti SNS.
Il n'a pas cherché à rassurer ses alliés européens et a été exclu du groupe parlementaire européen S&D, qui estime que ses positions concernant "la guerre menée par la Russie, les migrations, l’État de droit et la communauté LGBT+ n’ont pas leur place au sein de la famille des progressistes".
En Autriche, le président du parlement issu du parti de droite FPÖ Walter Rosenkranz, qui a obtenu le perchoir grâce aux apports de voix des autres partis, n'essaie pas de rassembler au-delà de son camp, comme le font d'ordinaire les personnalités qui occupent cette fonction, protocolaire et représentative.
"Pour ces partis longtemps hors système, prendre le contrôle de présidences permet de contrebalancer les exécutifs, les partis de gouvernement ayant souvent été à la recherche de coalition en raison de leur affaiblissement", affirme Cyrille Bret, chercheur associé à l'Institut Jacques-Delors.
Ce genre de poste convient "tout particulièrement aux partis contestataires en phase de conquête du pouvoir", estime-t-il.
- Source : France-Soir















