Réponse au lynchage médiatique de l’abbé Pierre

Où l’on comprend mieux pourquoi depuis 2024, l’abbé, mort en 2007 à l’âge de 95 ans, est accusé d’abus sexuels sur deux douzaines de dames, plus une petite fille de 8 ans, et un garçon de 9 ans, avec des allégations d’inceste par ci-par-là, entre 1970 et 2005…
Une lecture prophétique : l’abbé Pierre
Lorsqu’au début de «l’Affaire» (de mon livre «Les mythes fondateurs de la politique israélienne» j’ai rencontré l’Abbé, je lui ai dit :
«Tu sais, Pierre, combien j’admire ton action pour les exclus et surtout pour les sans-logis. Des millions de Palestiniens ont été chassés de leur maison par la terreur du sionisme, et des milliers de Libanais ont dû fuir sur les routes lors des agressions israéliennes, ne crois-tu pas que leur défense est dans le prolongement de ton action pour les SDF de France ?»
L’inflexible prophète avait, à Gaza, demandé pardon aux Palestiniens, au nom des Occidentaux, de la spoliation de leurs terres et de leurs foyers (comme le lui reprochent Tribune juive et les Kouchner) en ajoutant qu’aucun Arabe n’a été responsable des crimes d’Hitler («chrétien apostat», disait l’Abbé Pierre).
Il a, au cours du procès infâme et menteur qui m’était fait, dit que la violence annulait la promesse. Dénonçant la «politique suicidaire» des dirigeants israéliens il parlait le langage des prophètes juifs, d’Amos à Michée criant :
«Écoutez donc, dirigeants de la Maison d’Israël… qui bâtissez Sion dans le sang et Jérusalem dans le crime. À cause de vous, Sion sera labourée comme un champ, Jérusalem deviendra un «monceau de ruines»». (Michée III, 1-12)
L’abbé Pierre se refusa toujours à appeler «terre promise» une terre conquise, que ce soit par les légendaires exterminations sacrées de Josué à Jéricho ou à Hébron, ou par les trop réels massacres de Beghin et de l’Irgoun à Der Yassine en 1948, comme à Kafr Kasem en 1956, ou au Liban, de Sharon en 1982 à Pérès en 1996.
Alors fut lâchée contre lui la meute des apostats de la grande foi universelle des Prophètes
Jacques Attali, Schwarzenberg, Kouchner, et les «grands prêtres» Sitruk et Kahn, qui le firent comparaître, comme Jésus devant le Sanhédrin, devant le nouveau tribunal de l’Inquisition, chargé de la police de la pensée : la «LICRA». Il refusa d’abjurer et fut exclus. Ce qui fut à son honneur, et la honte des pharisiens.
Il ne s’agissait nullement d’une querelle religieuse comme l’écrit le sophiste Jean Daniel dans un éditorial du Nouvel Observateur sur les «religions contre la paix». C’est au contraire contre l’utilisation intégriste des religions à des fins politiques que l’Abbé Pierre et moi-même nous élevons : juifs, chrétiens et musulmans se reconnaissent un même «père des croyants», qui ne fut ni juif, ni chrétien, ni musulman, mais antérieur à tous, un «Araméen errant», annonçant l’alliance de Dieu avec «toutes les familles de la terre», et c’est parce que nous sommes habités par ce même Dieu que l’abbé Pierre, moi-même et tous les hommes qui luttent pour l’unité humaine, résistent à toutes les tentations ou tentatives d’accaparement de la promesse divine, qui est en nous et en tous, pour en faire l’inspiration d’un nationalisme et d’un colonialisme sanglants. (1)
Ce ne sont pas, comme le prétend Jean Daniel, les religions qui sont contre la paix, mais les hérésies nationalistes, dont les dirigeants d’Israël donnent un exemple saisissant, pour sacraliser une politique de spoliation, d’agression, de violation des lois internationales, selon le but qui leur était assigné par leur père spirituel : l’athée Herzl, dans son livre «L’État juif» : «nous serons un bastion avancé de la civilisation occidentale contre la barbarie de l’Orient». (sic)
In «Droit de réponse», par Roger Garaudy, Samizdat 1996, Extrait p.21-22.
Note:
- C’est en connaissance de cause que, en juillet 2004, Juillet, lui fut remise la plus haute distinction française : la Grand-Croix de l’Ordre de la Légion d’Honneur. Jacques Chirac, président de la République, lui a remis la distinction en déclarant : «Cette prestigieuse distinction, la plus haute qui puisse être décernée en France, couronne votre combat contre l’exclusion, la misère et l’injustice. Elle récompense un homme d’exception, une figure emblématique qui a consacré sa vie à la défense des droits et de la dignité de la personne humaine. Elle récompense les services extraordinaires que vous avez rendus à notre pays, et vos actions contribuent à l’image de notre pays».
- Source : Entre la Plume et l’Enclume