Le premier ministre d'Israël Benjamin Netanyahu a promis de protéger le monde contre le « mauvais accord » avec l'Iran. C'est ainsi que Tel Aviv qualifie les propositions iraniennes sur le programme nucléaire discutées à Genève à la fin de la semaine dernière. Au fond, Netanyahu a tenu sa promesse : une nouvelle fois le groupe des 5+1 ne s'est pas entendu avec l'Iran. Ceci, bien que les Etats-Unis aient dépêché à Genève John Kerry et que l'entourage du secrétaire d'Etat se soit déclaré convaincu que cette fois tout réussira.

Depuis le début du conflit syrien Tel Aviv ne faisait presque pas de déclarations retentissantes : il se contentait d'effectuer des raids épisodiques contre des bases militaires et de se retirer pour un certain temps. Les Etats-Unis qui avaient menacé al-Assad de bombardements se sont ravisés et ont accepté la proposition raisonnable de Moscou de placer les armes chimiques syriennes sous contrôle international. Israël attendait peut-être un tel tournant, néanmoins il a exprimé son déplaisir.

Bref, l'unanimité d'antan entre Washington et Tel Aviv sur le Proche-Orient s'est évanouie. Aux Etats-Unis on écrit même que « les repères stratégiques, culturels et démographiques qui renforçaient pendant plus d'un demi-siècle les relations entre les Etats-Unis et Israël s'effondrent à nos yeux ». Pourtant en Israël beaucoup estiment que les journalistes dramatisent la situation. Alex Kogan, rédacteur en chef adjoint du site IzRus, en est convaincu :

« Il s'agit plutôt d'un refroidissement entre l'administration américaine et Israël. Quant aux relations entre l'Etat hébreu et le peuple américain, elles se renforcent d'année en année. La population considère Israël comme l'unique allié au Proche-Orient, comme l'Etat dont les actes sont conformes à la morale des Etats-Unis. En Israël les analystes disent en plaisantant que l'attitude des Américains envers Barack Obama est pire qu'envers Benjamin Netanyahu et que ce dernier devrait présenter sa candidature au poste de président des Etats-Unis.

 Cependant le problème n'est pas seulement dans Obama. Depuis plus d'un demi-siècle la politique américaine au Proche-Orient se réduisait au principe consistant à « ménager la chèvre et le chou », en d'autres termes à celui de ne pas détériorer les relations avec l'allié principal et de conserver à la fois une influence sur les pays arabes (au moins, sur une partie d'entre eux). En résultat, les points de tension dans la région se sont multipliés. Le politologue Oleg Matveïtchev, professeur du Haut collège d'économie, estime qu'à l'heure actuelle nous constatons un processus logique : le prestige des Etats-Unis au Proche-Orient tend vers zéro.

« Les contradictions se sont sérieusement accentuées, il devient de plus en plus difficile de garder l'équilibre entre les Arabes et les Juifs. Il est impossible d'être assis entre deux chaises sans provoquer le mécontentement des deux parties. Pour les Etats-Unis le problème n'est pas seulement dans la dégradation des rapports avec Israël : leurs rapports se sont également détériorés avec l'Arabie saoudite. Ainsi eu égard au Proche-Orient, Washington est en passe de perdre sa réputation de « garant de la stabilité » pour ne pas dire davantage.

Les alliés américains au Proche-Orient sont de moins en moins nombreux. L'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et le Qatar sont offensés par toutes les promesses non tenues eu égard à la Syrie. Il est peu probable que la Syrie et le Liban voisin aient des sentiments chaleureux pour le « rempart de la démocratie ». L'Egypte tente de se rétablir d'une série de coups d'Etat : le Caire en aurait assez des expériences américaines et ses regards se sont de nouveau tournés vers la Russie. Ainsi, les préoccupations des Etats-Unis à propos des relations avec Israël sont prématurées : Washington ne se querellera pas avec Tel Aviv.