Les dérives des sponsors de l'Euro 2016 : pour un maillot à 85 euros, l'ouvrier est payé 65 centimes
Ils s'appellent Nike, Adidas et Puma. Ce sont les sponsors de l'Euro 2016 et les équipementiers des équipes nationales. Leurs produits se vendent très chers, mais leurs coûts de fabrication sont réduits au maximum. Au détriment des sous-traitants et des ouvriers. Un rapport du collectif "Éthique sur l'étiquette", relayé par Mediapart, souligne les dérives de ce système.
Des prix de vente élevés, des coûts de fabrication très faibles
L'écart entre le prix de vente et le coût de fabrication des maillots ou des baskets est impressionnant. Selon Mediapart, un maillot "acheté autour de 85 euros n'a coûté que 5,85 euros à produire. Et les ouvriers qui l'ont fabriqué n'ont été payé en moyenne que 65 centimes d'euros pour le faire". Même chose pour les baskets de Nike : pour fabriquer des Air Jordan, "Nike n'aura alloué que 2,4 euros en moyenne aux petites mains qui les ont cousues, alors que ces baskets de luxe sont commercialisées autour de 140 euros".
D'après le rapport réalisé par le cabinet d'études Basic, commandé par le collectif "Éthique sur l'étiquette", les prix de ces produits ont doublé en vingt ans, alors que le salaire des ouvriers n'a pas bougé. "La part de la main-d'œuvre dans le prix des chaussures et maillots de sport de marque a donc été divisée par deux en vingt ans", constate Mediapart.
Les sponsors font des efforts, mais c'est insuffisant
Certes, les sponsors font des efforts. Nike, Adidas et Puma "ont édicté des codes de conduite, réalisé des audits sociaux réguliers chez leurs sous-traitants, tout en donnant davantage d'informations sur leur chaîne d'approvisionnement, écrit Guillaume Duval, président d'Éthique sur l'étiquette dans le rapport. Mais force est de constater qu'elles sont toujours très loin de faire ce qu'elles pourraient – et devraient – faire sur ce terrain. En contradiction avec leur discours affiché de marques responsables, elles favorisent plus que jamais la logique financière et privilégient toujours plus les dépenses de marketing (...). Elles maintiennent une pression toujours aussi forte sur leurs prix d'achats".
Les équipementiers quittent la Chine
Dans cette logique de réduction de coûts, on apprend dans le rapport que les marques sont en train de quitter la Chine, en raison de la hausse des salaires, pour s'installer au Vietnam et en Indonésie. A terme, les équipementiers iront en Birmanie, en Inde ou au Pakistan où les salaires sont encore plus faibles et ne permettent pas à ses ouvriers de couvrir leurs besoins essentiels.
C'est ce qu'on appelle la notion de "salaire vital". Il s'agit du salaire qui doit permettre de faire vivre une famille comprenant deux adultes et deux enfants (alimentation, logement, éducation, santé). Or, d'après le rapport du collectif, les rémunérations dans les usines de confection sont 33% inférieures au salaire vital au Vietnam, 45% inférieures au Cambodge et 50% inférieures en Inde et en Indonésie. S'aligner sur le salaire vital dans ces pays n'entraînerait pourtant que "quelques dizaines de centimes de plus sur le prix final". Bon match !
Source - Dan Israel, "Euro 2016: des sponsors loin de leur responsabilité sociale", Mediapart
- Source : News360x