Hollande à la pointe du fanatisme des euro fédéralistes
Même si on y est totalement opposé, il faut lire le texte de François Hollande, publié il y a 10 jours dans le JDD, en hommage au 90ème anniversaire de Jacques Delors. C’est sans doute un texte de référence pour comprendre à quel point le fédéralisme européen tient de la religion plus que de la pensée.
Entre Orwell et les Bisounours
Ce texte, signé par le président de la République, est tellement mauvais qu’on se demande dans un premier temps s’il n’est pas l’œuvre d’un stagiaire fils d’un hiérarque des institutions européennes tant il cumule tous les clichés les plus rebattus et discrédités sur la construction européenne, tout en y mélangeant des contre-vérités plus évidentes les unes que les autres. On y apprend ainsi que Saint Jacques Delors aurait apporté à « la politique contractuelle pour redistribuer les fruits de la croissance (…) et la maîtrise des comptes publics, qu’il avait engagé au début des années 1980 ». Double carton rouge factuel : la part des salaires dans le PIB décroche justement au début des années 1980 et, alors que les comptes publics étaient équilibrés à son arrivée au pouvoir, ils les laissent en déficit marqué…
Ensuite, nous avons droit au roman classique des euro béats, entre une Europe « bloquée par les égoïsmes nationaux (…) capable de préserver la paix » et la dénonciation des « populistes » qui « ont peur du monde, parce qu’ils veulent revenir aux divisions, aux murs, aux grillages ». Il ose même écrire « l’Union ne peut se réduire à des règles, des mécanismes ou des disciplines », alors même que ses dernières réalisations (two pack, six pack, TSCG ou les plans pour la Grèce) ne sortent pas de ce cadre étroit. Nous avons droit à la tarte à la crème de la « puissance au service de l’équilibre du monde » avec le leitmotive classique sur « ce qui nous menace, ce n’est pas l’excès d’Europe, mais son insuffisance ». Il faudrait lui dire que plus les pays européens s’intègrent, plus la situation se déteriore…
Une illusion sur le point d’être brisée
Ce qui est frappant dans ce texte paresseux sur tous les aspects, c’est la faiblesse incroyable des lignes de défense des euro béats. Malheureusement, le fait qu’aucun pays n’ait voulu quitter l’euro s’est ajouté à leur panoplie argumentaire. Juste pour le principe, on pourra rétorquer que les « égoïsmes nationaux » n’ont jamais semblé aussi forts que dans le monstre qu’ils ont construit et que c’est leur chère monnaie unique qui a bien produit la pire des monstruosité en Grèce, divisions et murs entre peuples européens, s’insultant par presses interposées, ou grillages pour un peuple Grec qui se soumet à une répression inhumaine pour un rêve fou. Il est aussi incroyable de parler de puissance de l’Europe quand elle doit recourir au FMI et donc aux Etats-Unis pour aider un pays qui pèse 2% de son PIB…
Bien sûr, les euro béats ont toujours été habiles, retournant les catastrophes produites par leurs projets funestes pour les transformer en raisons d’aller toujours plus loin. On libéralise les marchés financiers ? La soumission des Etats aux humeurs des marchés monétaires justifie alors la monnaie unique. Cette monnaie unique provoque une crise plus grave qu’aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne ? On renforce les règles qui ceinturent l’autonomie budgétaire des Etats. Mais il ne faut pas trop s’inquiéter du projet d’avant-garde, de cette organisation renforcée qu’appelle François Hollande. Les soubresauts des dernières années ont calmé pour longtemps toute envie de cela outre-Rhin et sans l’Allemagne, rien ne se fera, si ce n’est de nouvelles règles pour renforcer les cadennas des politiques d’austérité.
Il ne faut pas oublier que Berlin a tué l’idée d’euro-obligations (la pourtant très diplomatique Angela Merkel ayant même déclaré qu’elles ne se feraient pas de son vivant) et grandement limité les programmes de rachat de dettes souveraines. On approche du moment où les illusions fédéralistes vont se briser, même s’il faudra sans doute attendre encore un peu trop longtemps…
- Source : Laurent Herblay