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Jeudi, 26 Déc. 2024

Les États-Unis en Ukraine et à Gaza: deux poids, deux mesures, vraiment?

Auteur : Michel Seymour, Samir Saul | Editeur : Walt | Vendredi, 19 Avr. 2024 - 14h43

Le silence de l’Occident face au génocide présentement en cours à Gaza n’incite-t-il pas à interroger les hauts cris d’indignation morale de ce même Occident face à l’invasion de l’Ukraine par la Russie? Certains s’étonnent de voir les pays occidentaux adopter une position différente dans les deux cas. Ils reprochent, par exemple, aux États-Unis d’adopter une politique de deux poids, deux mesures. Ils estiment que ce pays devrait condamner l’invasion de Gaza par Israël, tout comme il a condamné l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Malheureusement, il s’agit là d’une analyse à courte vue. Ceux qui pensent ainsi ne voient pas que nous sommes plutôt en présence de deux poids et de deux démesures. L’histoire des relations entre la Palestine, Israël et Washington n’a pas commencé le 7 octobre 2023, et celle qui concerne les relations entre la Russie, l’Ukraine et Washington n’a pas non plus commencé le 24 février 2022.

Une lutte à tout prix contre la Russie

La condamnation de la Russie faisait l’impasse sur trente ans de provocations américaines conduisant à l’augmentation du nombre de pays faisant partie de l’OTAN (passant de 16 à 30) et ceinturant de plus en plus la Russie. On favorisa aussi l’installation de bases militaires dans tous les pays d’Europe de l’Est. On assista par la suite au retrait américain des accords portant sur les missiles antibalistiques et les missiles à moyenne portée. On promit en 2008 d’inclure l’Ukraine dans l’OTAN, malgré les avertissements répétés des autorités russes et les avis d’experts américains. Poursuivant les tentatives de provocation, l’OTAN procéda à l’installation de boucliers anti-missiles en Pologne et en Roumanie pouvant être transformés en moins de 24 heures en armes offensives pouvant atteindre Moscou en quelques minutes. Les Américains encadrèrent et financèrent le coup d’État de Maïdan de 2014, ce qui permit à Washington d’exercer un contrôle politique sur l’Ukraine, allant jusqu’à déterminer qui allait être le premier ministre, le maire de Kiev, le gouverneur d’Odessa, la ministre de l’économie et le procureur général. Une place de choix fut réservée aux factions d’extrême droite (en particulier le parti Svoboda) au sein du gouvernement, alors que ceux-ci trouvaient inspiration dans le « modèle » qu’a été le criminel nazi Stepan Bandera. L’accès au pouvoir des Bandéristes donna rapidement lieu à l’adoption de lois russophobes, puis à l’incorporation du groupe néo-nazi Azov au sein de l’armée. Une guerre civile s’est engagée visant le Donbass et entraînant 14 000 personnes dans la mort.

Les accords de Minsk servirent officiellement à mettre fin à la guerre civile. Ils reconnaissaient les droits linguistiques des Ukrainiens russophones et proposaient l’incorporation dans la constitution ukrainienne d’une autonomie fédérale pour les oblasts du Donbass. La Russie y était favorable, notamment parce que le maintien d’une importante minorité russophone au sein de l’Ukraine pouvait contribuer à infléchir les choix politiques du pays dans un sens qui serait favorable à Moscou. Toutefois, de l’aveu même d’Angela Merkel, François Hollande et Petro Poroshenko, il n’a jamais été question d’appliquer ces accords, car ils servaient essentiellement à gagner du temps pour se préparer à la guerre. L’OTAN procéda à la militarisation du pays (fortifications, équipement militaire fourni, formation des soldats), ainsi qu’à l’installation de laboratoires chimiques.

Dans une ultime tentative de mettre fin à cette escalade, Moscou proposa en décembre 2021 deux documents de négociations pour assurer la sécurité de la Russie : l’un destiné à l’OTAN et l’autre destiné aux États-Unis. Les Américains rejetèrent ces propositions et réitérèrent leur volonté d’inclure formellement l’Ukraine dans l’OTAN. Volodymyr Zelensky, quant à lui, exprima le vœu de retrouver une capacité nucléaire. Des missiles nucléaires allaient effectivement y être installés, car Joe Biden a retiré dès janvier 2022 la promesse qu’il avait faite à Poutine en décembre 2021 de ne pas en installer. En fin de compte, l’Ukraine était pour ainsi dire devenue un membre de facto de l’OTAN.

L’escalade dans la provocation, déployée par les États-Unis face à la Russie n’est pas une « théorie du complot », car cela avait été élaboré dans un document rédigé par le think tank de la Rand Corporation intitulé « Extending Russia » (2019). Les États-Unis ont appliqué systématiquement les propositions se trouvant dans ce document, et ce, malgré l’avertissement que ces gestes constitueraient une escalade entraînant inévitablement une contre-escalade russe ainsi que des pertes de vie ukrainiennes. Or, l’objectif de Washington était justement de provoquer une escalade et de rendre la guerre inévitable, car la contre-escalade de Moscou allait permettre d’appliquer par la suite des mesures punitives à l’encontre de la Russie. Il fallait tout faire pour forcer la Russie à intervenir militairement en Ukraine, car cela justifierait d’augmenter les sanctions, de sortir la Russie du système SWIFT, d’interrompre le commerce gazier et pétrolier de la Russie avec l’Europe et de détruire le gazoduc Nordstream. Tel était l’objectif ultime : affaiblir la Russie, provoquer des troubles à l’intérieur, renverser le régime, installer un pouvoir à la solde des États-Unis et piller ses matières premières.

Combattre la Russie à tout prix, même s’il faut pour cela sacrifier le peuple ukrainien

La Russie a compris que Washington faisait tout pour la forcer à réagir. Certains ont reproché à Poutine de ne pas avoir exploré toutes les avenues possibles pour résoudre de façon pacifique le conflit. Il n’a fait que ça depuis le coup d’État antirusse de 2014 à Kiev, contre l’avis d’une partie de l’opinion russe qui demandait des actions plus fermes pour protéger les Ukrainiens russophones contre les putschistes bandéristes fanatiquement russophobes. La critique possiblement recevable de Poutine est de ne pas avoir agi plus tôt, avant que la situation ne devienne intolérable pour la sécurité de la Russie et pour la survie des Ukrainiens russophones. Cependant, quand on comprend la trame historique ayant abouti à la situation de crise dans laquelle les États-Unis ont placé la Russie, on comprend mieux la décision des autorités russes. Poutine a fini par réaliser que, peu importent les mesures proposées, l’escalade allait de toute façon se poursuivre. La Russie est donc intervenue, mais avec des effectifs minimaux et sous la forme de ce qu’elle a nommé « une intervention militaire spéciale ». L’objectif de Moscou était de mettre rapidement fin au conflit et d’obtenir un accord avec l’Ukraine. La Russie n’a aucun intérêt à vaincre l’Ukraine et à l’occuper. On estimait qu’elle pouvait le faire en une semaine de guerre si elle le souhaitait. Elle n’a aucun intérêt à se créer le cauchemar d’administrer un vaste pays de 40 millions (en 2022), aux problèmes internes innombrables et avec une population hostile. C’était exactement le piège que lui tendaient les États-Unis qui proclamaient leur espoir que la Russie s’enlise dans un nouvel Afghanistan. La Russie a opté pour une « opération militaire spéciale », à mi-chemin entre l’inaction devant les menaces et la guerre.  Malheureusement, les États-Unis ont interprété la modération de l’intervention russe comme une marque de faiblesse. Ils se sont trompés dans leur évaluation des capacités de l’armée russe, prenant leurs désirs pour des réalités. C’est la raison pour laquelle les États-Unis ont voulu poursuivre l’affrontement. Alors que les négociations entre la Russie et l’Ukraine étaient sur le point de connaître un aboutissement heureux dès avril 2022 (neutralité de l’Ukraine, pas de missiles nucléaires sur le territoire, pas d’inclusion au sein de l’OTAN), les États-Unis, via leur émissaire britannique Boris Johnson, convainquaient les dirigeants ukrainiens d’interrompre les négociations, promettant l’appui de l’Occident à son proxy ukrainien dans une guerre par procuration pour abattre la Russie. Ils choisirent de poursuivre l’escalade, toujours dans l’espoir de mettre la Russie à genou et de réaliser un changement de régime à Moscou.

Beaucoup d’observateurs n’ont pas vu les provocations américaines que nous venons de relater. Celles-ci n’ont jamais été rapportées dans les médias grand public. En ce qui concerne les relations internationales, les médias mainstream ne sont que des relais de diffusion de la politique de leur pays, laquelle n’est que la politique de l’hégémon étatsunien. Il n’y a pas de journalisme d’enquête en matière de géopolitique au sein de ces médias. Les reporters envoyés, là où il y a des conflits ne font que rapporter des évènements interprétés et faussés selon les aprioris, les récits et les grilles de perception créés par l’impérialisme étatsunien pour promouvoir sa politique. Ainsi, les nouvelles au sujet de l’Ukraine ne sont parvenues aux citoyens occidentaux que lorsque Moscou a rassemblé ses troupes à proximité de la frontière ukrainienne. Lorsque les Russes sont intervenus, l’invasion a été en première page des journaux et en première place dans les bulletins de nouvelles. Les citoyens occidentaux ont ainsi cru la propagande américaine affirmant qu’il s’agissait d’une agression non provoquée. Ils ont alors attribué à Poutine des visées impérialistes et même la volonté de reconstituer l’Union soviétique.

La vérité est pourtant toute autre. Cacher les origines d’un conflit est une vieille technique pour manipuler l’opinion publique. L’Oncle Sam s’est servi de la minorité néo-nazie installée au pouvoir en 2014 pour entraîner l’Ukraine dans la guerre. Le moyen était de sacrifier le peuple ukrainien en faisant de lui de la chair à canon, le but ultime étant d’affaiblir la Russie. Cet objectif l’emportait sur des considérations « bassement » humanitaires. Les effusions d’émotion et de sympathie pour le peuple ukrainien n’étaient que cynisme, hypocrisie et duplicité. Il a été jeté au feu par ses faux amis occidentaux qui s’en sont servis pour leur politique mondiale.

L’intervention russe du 24 février 2022 a donné lieu à des interprétations divergentes. Pour certains, c’était une agression, donc une violation du droit international; pour d’autres, un acte d’autodéfense contre une menace explicite, mesure reconnue par le droit international. Il s’agissait d’une intervention préventive, un peu comme lorsqu’un individu intervient vigoureusement, même violemment, pour empêcher qu’on lui place un fusil sur la tempe. Tout de suite après, il aurait voulu faire la paix pourvu qu’on lui promette de ne pas tenter à nouveau de lui mettre un fusil sur la tempe. Les deux étaient sur le point de s’entendre lorsque le véritable responsable du trouble est apparu pour interrompre la négociation.

Ceux qui se sont insurgés contre la désinformation russophobe des États-Unis ont été aussitôt catalogués de pro-Poutine. On leur a reproché de ne pas démontrer suffisamment de compassion à l’égard du peuple ukrainien. L’unanimisme a été imposé à l’opinion. Il n’y a pas eu un seul son de cloche dissonant, aucune dissidence exprimée au sein des médias établis. On n’a pas vu ni compris que la critique des États-Unis visait justement à empêcher la guerre que les Américains étaient en train de mener sur le dos du peuple ukrainien.

Pour agir en fonction d’une véritable compassion à l’égard du peuple ukrainien, il ne fallait pas promouvoir l’escalade belligérante américaine, car celle-ci favorisait une guerre par procuration qui allait décimer cette population. Il fallait au contraire démontrer de la compréhension à l’égard des besoins sécuritaires de la Russie, cesser de rapprocher les forces militaires de l’OTAN de ses frontières et favoriser de cette manière la désescalade pour sauvegarder l’intégrité du peuple ukrainien.

Malheureusement, les politiciens, les journalistes et les intellectuels occidentaux ont pour la plupart été bluffés par la propagande des néoconservateurs bellicistes américains. Ces derniers ont rendu la guerre inévitable afin d’essayer de perpétuer la domination des États-Unis dans le monde. Ils ont délibérément choisi de combattre la Russie jusqu’au dernier ukrainien.

Un appui indéfectible à Israël

La démesure manifestée à l’égard du peuple palestinien est plus facile à comprendre, car elle existe depuis un très grand nombre d’années. Les États-Unis font parvenir de l’aide financière à Israël à la hauteur de 3.8 milliards de dollars par année. L’illégalité entoure tout ce que fait Israël. Il occupe illégalement le territoire de Cisjordanie, de Gaza, de Jérusalem et du Golan. Le pays colonise illégalement la Cisjordanie et le mur érigé par Israël est aussi illégal, tout comme le blocus de Gaza et l’occupation de Jérusalem-Est. Les arrestations illégales, les exécutions sommaires d’adolescents et l’emprisonnement d’enfants font partie du quotidien du peuple palestinien, de même que la destruction des maisons et des oliviers. Pour Gaza, l’accès à la mer est bloqué, l’électricité est rationnée et l’eau est souillée. Les Gazaouis ne peuvent sortir de Gaza et la bande de Gaza est une prison à ciel ouvert. Entre 2008 et 2023, 4600 palestiniens ont été tués par l’armée israélienne. Rien de tout cela n’a été rapporté dans les médias établis, mais l’information a fini par circuler assez pour que le citoyen moyen ait le sentiment diffus que le peuple palestinien est un peuple opprimé.

Israël a malgré tout toujours été appuyé par les États-Unis. Ces derniers ont reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël, contrevenant directement aux résolutions du Conseil de sécurité. Après avoir normalisé les relations avec la Jordanie et l’Égypte, puis avec le Maroc, le Bahreïn, le Soudan et les Émirats Arabes Unis, on s’apprêtait grâce à Washington à normaliser les relations d’Israël avec l’Arabie saoudite. L’étau se refermait lentement et de plus en plus complètement sur le peuple palestinien, avec le concours des Américains. Le destin du peuple palestinien semblait être sans issue et la communauté internationale affichait une indifférence absolue.

Les États-Unis ont appuyé Netanyahou sans condition et ce, même si ce dernier n’a jamais voulu envisager sérieusement l’hypothèse d’une solution à deux États. Il en était même venu à l’écarter et à afficher ouvertement ses ambitions annexionnistes aux Nations unies en brandissant une carte géographique dans laquelle disparaissait totalement le territoire palestinien.

C’est dans ce contexte qu’il faut se replacer pour comprendre les événements du 7 octobre 2023. L’extrême droite israélienne au pouvoir en a profité de cette occasion pour se rapprocher de l’objectif ultime de réaliser le Grand Israël en essayant de se débarrasser des Palestiniens par des massacres à caractère génocidaire. Les États-Unis leur ont procuré toute l’aide nécessaire pour mener à bien cette entreprise funeste.

Appuyer Israël à tout prix, même s’il faut pour cela sacrifier le peuple palestinien

L’intervention militaire à Gaza a pris la forme démultipliée d’une série de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité : riposte disproportionnée, nettoyage ethnique, punition collective, population civile ciblée. Les habitations furent détruites, les hôpitaux bombardés, les cimetières profanés. Les journalistes et les aidants humanitaires furent assassinés, tandis que les écoles, les universités, les mosquées et les églises furent réduites en cendres. Le tout a clairement pris la forme d’un carnage atroce. En décembre 2023, l’Afrique du Sud a donc déposé une plainte auprès de la Cour internationale de justice visant Israël et l’accusant de génocide.

La démonstration étayée sur 84 pages montrait notamment les intentions explicites du régime sioniste. L’objectif avoué et annoncé par le ministre de la défense Yoav Gallant était de priver les Gazaouis, ces « animaux humains », d’eau, de nourriture, de gaz et d’électricité. Le 26 janvier 2024, la Cour internationale de justice a jugé qu’Israël ne semblait pas respecter ses obligations à l’égard de la Convention sur la prévention du génocide. Elle a statué qu’un génocide était plausiblement en train de se produire. Elle n’a pas seulement parlé d’un risque de génocide, mais bien du fait qu’il était plausible d’affirmer qu’un génocide était en cours.

En riposte à cette décision et pour en neutraliser les effets auprès de la communauté internationale, Israël a dès le lendemain accusé l’organisme des Nations unies chargé d’assurer la survie des Gazaouis (UNRWA) d’avoir participé aux massacres du 7 octobre. Or, le dossier faisant cette « démonstration » au sujet d’une douzaine d’employés de l’UNRWA (sur les treize mille œuvrant à Gaza) n’était en fait qu’un tissu d’allégations obtenues sous la torture. Ce fut l’alibi dont s’est servi Israël pour bloquer les convois apportant l’aide humanitaire à Gaza à partir de la ville de Rafah.

La famine imposée à une population entière constituait une preuve additionnelle qu’un génocide était en train d’être commis. Comment les États-Unis pouvaient-ils, en de telles circonstances, justifier un appui militaire inconditionnel à Israël? Au lieu de prendre leurs distances, ils ont renchéri et approfondi leur complicité génocidaire. En plus de maintenir leur aide militaire, ils se sont opposés à trois reprises au Conseil de sécurité à voter en faveur d’un cessez-le-feu et ils sont même allés jusqu’à retirer leur contribution à l’UNRWA.

Les citoyens américains ont toutefois été de plus en plus nombreux à critiquer ouvertement le gouvernement Biden. Pour sauver du temps et contenir une population américaine de plus en plus hostile au comportement pro-génocidaire étasunien, les autorités américaines annoncèrent la construction d’un port aux abords de la bande de Gaza par où serait acheminée l’aide humanitaire. Ce projet était à sa face même un subterfuge. Après tout, si les Américains croyaient nécessaire d’acheminer une aide à Gaza et qu’Israël était disposé à la recevoir, le meilleur moyen aurait été de faire entrer immédiatement par la ville de Rafah les centaines de camions qui étaient bloqués par l’armée israélienne. Pourquoi fallait-il choisir plutôt d’étaler sur plusieurs mois la construction d’une zone portuaire? La réponse est simple. Les Américains prenaient ainsi officiellement leurs distances à l’égard de la famine imposée par Israël aux Gazaouis, tout en continuant de leur fournir un appui militaire et en leur donnant encore du temps pour leur permettre de poursuivre leur entreprise mortifère.

Conclusion

La question qui se pose est alors la suivante : comment se fait-il que les États-Unis qui prétendent défendre l’Ukraine n’hésitent pas à appuyer le génocide à Gaza? Plusieurs dénoncent les deux poids deux mesures que cela représente. Mais ne faut-il pas plutôt interroger les bonnes intentions affichées à l’égard de l’Ukraine?  La politique extérieure américaine n’est-elle pas cohérente et dans, tous les cas, dirigée aveuglément à l’encontre de ses « pays ennemis » et en faveur de ses « pays amis », et ce, quelles que soient les conséquences que tout cela entraîne pour des populations entières? Bien entendu, il ne s’agit pas de reconnaître aux États-Unis une rationalité parfaite. Il s’agit plutôt d’observer dans les deux cas la présence d’un même réflexe irrationnel : un état de panique à l’idée de perdre une hégémonie économique et politique dans le monde. Le point commun est l’intérêt des États-Unis, pas le bien-être des Ukrainiens ou des Palestiniens. Il n’y a pas de contradiction entre la politique américaine en Ukraine et la politique américaine en Palestine. Elles sont symétriques, complémentaires et de même nature.

La vérité crue et cruelle est donc la suivante. Les États-Unis n’hésitent pas à sacrifier le peuple ukrainien pour affaiblir leur ennemi, la Russie. Ils n’hésitent pas non plus à sacrifier le peuple palestinien pour défendre leur ami, Israël. Nous sommes donc en présence de deux poids et de deux mesures.

A propos des auteurs:

Samir Saul est docteur d’État en histoire (Paris) et professeur d’histoire à l’Université de Montréal. Son dernier livre est intitulé L’Impérialisme, passé et présent. Un essai (2023). Il est aussi l’auteur de Intérêts économiques français et décolonisation de l’Afrique du Nord (1945-1962) (2016), et de La France et l’Égypte de 1882 à 1914. Intérêts économiques et implications politiques (1997). Il est enfin le codirecteur de Méditerranée, Moyen-Orient : deux siècles de relations internationales (2003). Courriel : [email protected] 

Michel Seymour est professeur retraité du département de philosophie à l’Université de Montréal, où il a enseigné de 1990 à 2019. Il est l’auteur d’une dizaine de monographies incluant A Liberal Theory of Collective Rights, 2017; La nation pluraliste, ouvrage co-écrit avec Jérôme Gosselin-Tapp et pour lequel les auteurs ont remporté le prix de l’Association canadienne de philosophie; De la tolérance à la reconnaissance, 2008, ouvrage pour lequel il a obtenu le prix Jean-Charles Falardeau de la Fédération canadienne des sciences humaines. Il a également remporté le prix Richard Arès de la revue l’Action nationale pour l’ouvrage intitulé Le pari de la démesure, paru en 2001. Courriel : [email protected] site web: michelseymour.org


- Source : Pressenza

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