www.zejournal.mobi
Vendredi, 03 Mai 2024

Le Pentagone admet que le «ballon espion» chinois n’a pas espionné les États-Unis

Auteur : Peter Symonds | Editeur : Walt | Jeudi, 06 Juill. 2023 - 19h19

Plusieurs mois après la frénésie médiatique suscitée par le ballon «espion» chinois ayant survolé les États-Unis, le Pentagone a reconnu la semaine dernière que le ballon n’avait ni collecté ni transmis de données ou renseignements. Autrement dit, loin de collecter et de renvoyer à la Chine des informations vitales sur des bases militaires américaines sensibles, comme on l’a prétendu, le ballon n’a rien espionné du tout.

Cet aveu n’a pas fait l’objet d’une annonce officielle et encore moins d’excuses au gouvernement chinois pour avoir abattu ce ballon le 4 février. Cela s’est fait par le biais du porte-parole du Pentagone, le général de brigade Pat Ryder, en réponse à une question posée à une conférence de presse.

Tout en continuant à affirmer que le ballon avait des «capacités de collecte de renseignements», Ryder a déclaré sans ambiguïté : «Nous estimons aujourd’hui qu’il n’a pas collecté de renseignements pendant qu’il transitait par les États-Unis ou qu’il les survolait». Dans le même temps, il a affirmé que des efforts américains non spécifiés avaient contribué à «atténuer les efforts de collecte potentiels de ce ballon».

Pékin a toujours insisté sur le fait que le ballon était un dirigeable civil de recherche qui avait été accidentellement dévié de sa trajectoire. Le gouvernement chinois a même publié une déclaration officielle de «regrets» à propos de l’incident. Mais cela n’a pas empêché la machine de propagande américaine de produire une avalanche d’articles et de commentaires alléguant un «espionnage chinois».

L’incident a entraîné une nouvelle rupture des relations avec la Chine. Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a affronté le haut diplomate chinois Wang Yi lors de la conférence de Munich sur la sécurité, plus tard en février, déclarant que le ballon chinois constituait une «violation inacceptable de la souveraineté des États-Unis et du droit international», sous-entendant que son entrée dans l’espace aérien américain était délibérée. Le voyage de Blinken prévu en Chine pour rétablir les relations a été annulé.

Le mois dernier, le président Biden a encore jeté de l’huile sur le feu. S’adressant à de riches donateurs lors d’une collecte de fonds, il a affirmé que le président chinois Xi Jinping avait été «très contrarié lorsque j’ai abattu ce ballon qui contient deux wagons remplis de matériel d’espionnage… [parce qu’il] ne savait pas qu’il était là». Le président a ajouté l’insulte à la blessure en déclarant : «C’est un grand embarras pour les dictateurs quand ils ne savent pas ce qui s’est passé».

Les commentaires de Biden montrent clairement que les autorités chinoises ne savaient même pas où se trouvait le ballon et qu’elles ne pouvaient pas le diriger délibérément pour «espionner» les installations militaires américaines. Quant aux «deux wagons remplis de matériel d’espionnage», Washington n’a toujours pas présenté publiquement la moindre preuve que le ballon était autre chose que ce que Pékin a dit qu’il était.

Les commentaires du général de brigade Ryder faisaient suite à une question sur un article paru dans le Wall Street Journal, intitulé «Un ballon chinois a utilisé des technologies américaines pour espionner des Américains». Citant des responsables américains anonymes, l’article affirmait que les conclusions préliminaires des enquêteurs américains, après avoir passé au crible les débris récupérés du ballon, était que «l’engin avait recueilli photos et vidéos mais ne semblait pas les transmettre».

L’article déclarait à tue-tête que le rapport «avait découvert que le ballon était bourré d’équipements américains disponibles dans le commerce, dont certains vendus en ligne, et qu’il était parsemé de capteurs chinois plus spécialisés et d’autres équipements de collecte de photos, vidéos et autres informations à transmettre en Chine», permettant de «conclure que l’engin était destiné à l’espionnage».

Ryder a non seulement nié que le ballon avait recueilli photos, vidéos ou autres informations, du moins au-dessus des États-Unis, mais il a également réfuté l’idée que des technologies américaines sensibles avaient été utilisées par la Chine. Tout en refusant d’entrer dans les détails, il a déclaré que «dans des cas précédents, comme les drones et d’autres capacités… des composants commerciaux américains prêts à l’emploi ont été utilisés… Cela n’est donc pas surprenant en soi».

L’article du WSJ présente toutes les caractéristiques d’une attaque médiatique. Le FBI, responsable de l’ouverture de l’enquête, la Defense Intelligence Agency et d’autres agences de renseignement examinent les débris depuis des mois. Les conclusions préliminaires ne sont pas publiques, mais elles ne sont pas nouvelles. Au contraire, comme le reconnaît le WSJ, elles «ont circulé dans les agences de renseignement et de défense à partir de la seconde moitié de mars, ont indiqué les responsables».

L’objectif de l’article semble être d’apporter de l’eau au moulin d’une partie de l’establishment de la défense et du renseignement qui pousse à publier les conclusions et à exposer des parties soigneusement sélectionnées des débris afin d’intensifier la campagne anti-chinoise.

Dans une lettre adressée à Biden le mois dernier, deux sénateurs républicains, Roger Wicker et Marco Rubio, ont écrit : «Votre gouvernement n’a toujours pas fourni au peuple américain un compte rendu complet de la manière dont cette plate-forme d’espionnage a été autorisée à traverser le territoire souverain des États-Unis, de ce que le ballon transportait et de ce qu’il a recueilli au cours de sa mission».

Avant le voyage reprogrammé de Blinken à Pékin le mois dernier, la Maison-Blanche a minimisé l’incident et a affirmé que les deux pays le considéraient comme clos. Biden avait alors déclaré : «Je ne pense pas que les dirigeants [chinois] savaient où [le ballon] se trouvait, ce qu’il contenait et ce qui se passait».

La visite de Blinken visait à apaiser les tensions avec Pékin, du moins temporairement, alors que la guerre des États-Unis et de l’OTAN avec la Russie s’intensifie et que la contre-offensive ukrainienne s’enlise. Rien de substantiel n’y fut décidé. La propagande anti-chinoise de Washington, ainsi que ses tarifs douaniers, ses interdictions économiques et son renforcement militaire visant la Chine se poursuit à un rythme soutenu. Biden a d’ailleurs, le lendemain de la rencontre de Blinken avec Xi, qualifié le président chinois de «dictateur».

Interrogé sur l’article du Wall Street Journal, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, a déclaré vendredi dernier : «Je ne connais pas les sources de cet article. Comme la Chine l’a déclaré à maintes reprises, le dirigeable civil chinois sans équipage qui a dérivé au-dessus des États-Unis était un accident totalement inattendu, causé par un cas de force majeure. Le fait que les États-Unis l’aient qualifié de «ballon-espion» n’est qu’une diffamation à l’encontre de la Chine».

Le scénario selon lequel la Chine utilisait un ballon volant à la merci des vents pour espionner les bases militaires américaines, était invraisemblable dès le départ. Le Pentagone vient d’admettre qu’aucune donnée ne fut collectée au-dessus des États-Unis. On n’a apporté aucune preuve démontrant qu’il portait des «wagons remplis d’équipements d’espionnage». On peut prédire à l’avance que toute découverte ou tout débris susceptible d’être exposé publiquement sera soigneusement sélectionné et manipulé pour alimenter la campagne anti-Chine de Washington alors qu’il prépare la guerre contre la Chine.


- Source : WSWS

Cela peut vous intéresser

Commentaires

Envoyer votre commentaire avec :



Fermé

Recherche
Vous aimez notre site ?
(230 K)
Derniers Articles
Articles les plus lus
Loading...
Loading...
Loading...