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Les médias grand public évitent soigneusement de parler de « coup d’État » au sujet de la Bolivie

Auteur : Caitlin Johnstone | Editeur : Walt | Mardi, 12 Nov. 2019 - 20h09

Il y a eu un coup d’État militaire en Bolivie soutenu par de violents émeutiers de droite et le gouvernement américain, mais vous ne le sauriez pas en lisant les gros titres des médias.

« Le président bolivien Evo Morales se retire suite à des accusations de fraude électorale », proclame CNN.

« Morales de Bolivie démissionne à la suite d’un rapport cinglant sur les élections et de protestations grandissantes », rapporte le Washington Post.

« Le leader bolivien Evo Morales démissionne », titre le New York Times.

« Le président bolivien Evo Morales démissionne à la suite de protestations contre les fraudes électorales », déclare la BBC.

« Le président de Bolivie se retire sur fond d’allégations de truquage des élections », nous informe le Telegraph.

« Le président bolivien Morales démissionne après un retour de bâton à la suite d’élections contestées », a déclaré le Sydney Morning Herald.

Alors voilà. Le leader indigène d’un gouvernement socialiste sud-américain qui a réussi à sortir des masses de gens de l’extrême pauvreté, qui se trouve contrôler les plus vastes réserves de lithium mondiales (le lithium peut un jour remplacer le pétrole comme ressource énergétique cruciale en raison de son utilisation dans les smartphones, ordinateurs portables, voitures hybrides et électriques), qui a une longue histoire bien documentée de cible pour un changement de régime orchestré par le gouvernement américain, aurait simplement abandonné en raison d’un scandale impliquant une « élection disputée ».

Rien à voir avec le fait que des foules d’extrême droite terrorisaient la famille de ce chef, ni avec le fait que les militaires du pays lui ont littéralement ordonné de se retirer et le recherchent actuellement pour l’arrêter, ce qui a conduit à l’arrestation et à la détention de responsables gouvernementaux arrêtés et détenus par des soldats portant des masques.

Tout cela est parfaitement normal et pas suspect du tout.


(Tweet : Plein soutien aux conclusions de l’étude de l’@OEA_officiel recommandant de nouvelles élections en Bolivie pour assurer un processus véritablement démocratique représentatif de la volonté du peuple. La crédibilité du système électoral doit être restaurée.)

Comme à l’accoutumée, la couverture médiatique de cette affaire par les médias est en plein accord avec le Département d’État américain, avec le Secrétaire d’État Mike Pompeo répétant également le mantra des « élections contestées » dans un tweet, peu avant la démission forcée de Morales. Pompeo a cité l’allégation sans preuves et discréditée d’un décompte de voix censément suspect, lors de la réélection de M. Morales le mois dernier, avancée par l’Organisation des États américains (OEA) basée à Washington. Comme l’explique Mark Weisbrot, du Center for Economic & Policy Research dans un article récent pour The Nation, l’OEA reçoit 60% de son financement de Washington, ce qui donne aux États-Unis une influence considérable sur cet organisme soi-disant neutre et international. Cela rappelle de façon intéressante d’autres faits dont nous avions parlé précédemment, à savoir l’utilisation bien connue du soutien financier disproportionné accordé par Washington à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour influencer cet organisme soi-disant neutre et international et le forcer à se conformer aux plans des États-Unis.

Le domaine de la gestion de la narration médiatique progresse de plus en plus.


(Tweet 1 : Ils n’ont jamais trouvé de preuve de fraude aux élections du 20 octobre, mais les médias ont répété l’allégation tellement de fois qu’elle est devenue « vraie », dans ce monde de post-vérité.

Tweet 2 : C’est officiellement un coup d’Etat militaire en Bolivie. Et, comme d’habitude, avec le soutien du gouvernement des États-Unis. Sans l’OEA dominée par les États-Unis et sans nombre de reportages terribles et même faux, cela ne se serait probablement pas produit.)

L’empire centré sur les États-Unis ne cesse de lancer des tentatives de coup d’État contre des gouvernements non alignés, jusqu’à ce qu’ils marchent. Le coup d’État au Venezuela a échoué en 2002 et en 2019, mais ils continueront à les tenter jusqu’à ce qu’ils y arrivent. Un kickboxer lance des coups en combinaison en sachant que la plupart des attaques contre un adversaire entraîné rateront ou feront des dégâts minimes, mais que l’un peut finir par passer et marquera le KO. Les programmes de changement du régime impérialiste emploient la même philosophie des coups en rafale : il suffit de continuer à attaquer et à saper à chaque fois que c’est possible, et quelque chose finira par réussir.

Et l’empire peut se le permettre. Lorsque vous avez tous les pouvoirs et toutes les ressources, vous pouvez attendre votre heure, sachant que si votre tentative actuelle de renverser le gouvernement d’une nation souveraine échoue, il y a toujours un jour suivant.

Lors d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies l’année dernière, le président Morales a résumé très précisément la véritable nature du rôle de l’Amérique du Nord dans le monde, et il s’avère qu’il l’a fait avec une grande prescience.

« Je voudrais vous dire, franchement et ouvertement ici, que les États-Unis ne s’intéressent en aucune manière à la défense de démocratie », a dit Morales. « Si c’était le cas, ils n’auraient pas financé des coups d’État et soutenu des dictateurs. Ils n’auraient pas menacé d’intervention militaire des gouvernements démocratiquement élus comme ils l’ont fait avec le Venezuela. Les États-Unis ne se soucient absolument pas de droits de l’homme ou de justice. Si c’était le cas, ils auraient signé les conventions et traités internationaux qui protègent les droits de l’homme.

Ils n’auraient pas menacé le mécanisme d’enquête de la Cour pénale internationale, ni approuvé le recours à la torture, ni quitté le Conseil des droits de l’homme des Nations unies. Et ils n’auraient pas non plus séparé les enfants migrants de leur famille, ni ne les auraient mis dans des cages.

Les États-Unis ne s’intéressent pas au multilatéralisme », a poursuivi Morales. « S’ils s’intéressaient au multilatéralisme, il ne se seraient pas retirés de l’Accord de Paris ou du Pacte mondial sur les migrations, ils n’auraient pas lancé d’attaques unilatérales, ni pris de décisions telles que de déclarer illégalement Jérusalem capitale d’Israël. Ce mépris du multilatéralisme est motivé par la soif de contrôle politique et de pillage de ressources naturelles des États-Unis ».

« Chaque fois que les États-Unis envahissent des pays, lancent des missiles ou financent un changement de régime, ils le font derrière une campagne de propagande qui martèle le message selon lequel ils agissent au nom de la justice, de la liberté et de la démocratie, des droits humains ou pour des raisons humanitaires », a ajouté Morales.

« La responsabilité de notre génération est de transmettre un monde plus juste et plus sûr à la génération suivante », a conclu Morales. « Nous ne réaliserons ce rêve que si nous travaillons ensemble pour consolider un monde multipolaire, un monde avec des règles communes qui soient respectées et défendues contre toutes les menaces qui pèsent sur les pays des Nations Unies ».

De fait, la seule raison pour laquelle les États-Unis sont capables de mener leurs incessantes campagnes de changement de régime contre des gouvernements non alignés est que l’ordre mondial unipolaire qu’ils gouvernent leur a permis d’avoir le pouvoir, les ressources et les loisirs pour ce faire. Un monde multipolaire permettrait aux citoyens de cette planète d’avoir leur mot à dire sur ce qui leur arrive d’une manière qui ne soit pas dictée par une poignée de sociopathes de Washington. Un monde multipolaire est à la démocratie ce qu’un monde unipolaire est à la tyrannie. Les citoyens du monde doivent s’opposer à cette unipolarité.

Traduction Entelekheia


- Source : Medium(Etats-Unis)

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