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Vendredi, 27 Déc. 2024

Pourquoi il faut avoir peur des experts

Auteur : Nicolas Bonnal | Editeur : Walt | Jeudi, 18 Janv. 2018 - 17h36

Nous vivons au siècle des experts, dont le patriarche Joseph, le conseiller de Pharaon, est le fondateur (voyez ou relisez Genèse, 41 à 48).

Le domaine par excellence de l’expertise est celui de la science économique : ce n’est pas pour rien que, dans Le Monde, les économistes comme Piketty avaient décrété que le programme de Hollande était le meilleur pour sortir de la crise. Mais dans un petit film intitulé « Pourquoi les experts se trompent » , le documentariste John Freed a relevé les inepties de tous les caïds concernés.

Pourquoi un tel recours aux experts ? C’est le nombre de chaînes de télé qui devient prodigieux, confirmant que l’humanité ne fait plus rien ou presque. On regarde 6.000 chaînes de télé et on a besoin d’experts sur tous les sujets pour savoir quoi penser en matière de sommeil, de nourriture, de sexe, d’atomisme nord-coréen ou de hamsters transgéniques.

Et qu’est-ce qu’un expert ? C’est un hâbleur qui dispose d’un jargon (philo, éco, psycho, théo, techno-quelque chose) et surtout d’un réseau média qui le réinvite jusqu’à la nausée. C’est qu’un expert, pour devenir médiatique, doit se régler en conséquence. Il est là pour produire une technicité du discours politiquement correct, justifier la chute d’un avion, la diabolisation des uns et le bombardement des autres.

Le film de Freed commence par le vin, sujet a priori œcuménique. Il nous apprend que l’on a organisé un concours qui engageait la science de 54 sommeliers ou œnologues… Tout le monde a jargonné : « Il est lourd, sa robe est souple, il sent la cerise, il y a du cuivre – surtout au Chili ! – et du camphre », etc. Mais il n’y a pas eu de vainqueur car personne ne n’est rendu compte qu’il n’y avait pas… de vin rouge ! Il y avait un vin blanc qui avait été maquillé pour paraître rouge. Personne ne l’a su, sauf l’ingénieur moléculaire farceur qui avait organisé le show. Un bon viticulteur bourguignon confirma, guilleret, les escroqueries de ce milieu huppé et explique qu’aucun vin, même un montrachet ou un romanée-conti, ne devrait coûter plus de quinze euros. Le reste est une simple affaire de réclame. Pardon : de prestige.

Le film continue sur sa lancée : l’art moderne avec ses copies indécelables et ses toiles blanches ; la météo avec son réchauffement climatique ; la bourse, bien sûr, avec la fameuse parabole du singe qui ne se trompe pas plus qu’un analyste payé des fortunes.

Puis il s’arrête. Nous continuons.

L’affaire devient plus grave, en effet, quand il s’agit d’experts « néo-cons » en terrorisme, en islamisme, en néo-soviétisme, en n’importe quel « isme ». Mais quand il s’agit de faire la guerre à l’Irak ou à la Russie et de détruire l’Europe, pourquoi ne pas se tromper ?

Vivement un comité d’experts faisant la chasse aux experts ! Car l’expert est devenu une âme de destruction massive.

« Quant aux gens, il les réduisit en servage, d’un bout à l’autre du territoire égyptien. » (Genèse, 47, 21)


- Source : RI

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