Quand la Commission européenne s’intéresse à l’information…
Le 4e pouvoir ne laisse pas l’UE indifférente. Plusieurs initiatives récentes témoignent de l’intérêt des institutions européennes pour l’information et la communication. À l’appui : stratégie de communication et incitations financières (prix et subventions). Une façon de reprendre la main sur une opinion publique sans doute jugée trop rétive au projet de la bureaucratie européenne et trop perméable aux pseudo « fake news ».
Des universitaires et des professionnels de l’information ont analysé les carences des institutions européennes en matière de communication. Un site internet est même dédié à l’analyse de la communication européenne, lacomeuropeenne.fr. Pour le Président d’Euronews development, « l’Europe est doublement déficiente : sur le plan des modes de communication et au niveau du contenu même de sa communication ». Pour y remédier, un plan de communication a été adopté pour la période 2015-2019 pour « reconnecter l’Europe à ses citoyens ».
Revue de quelques actions visant à redresser le cap tant dans la communication sur les institutions européennes et leurs actions que dans l’information délivrée par les médias.
Lutte contre les « bobards »
Dans l’objectif de lutter contre les « bobards » sur l’Europe qui circuleraient dans certains médias et dans l’opinion, la Commission européenne a créé en 2016 « Les Décodeurs de l’Europe ». Au travers d’argumentaires et de vidéos en ligne sur le site de la Commission européenne, l’objectif est « de répondre à une série de questions ou d’accusations ». Ce type de communication en « pure player » est déjà largement utilisé par les partis politiques pour éviter le filtre des journalistes.
Le site Euractiv, qui se présente comme « un réseau de médias européens présent dans 12 capitales de l’Union Européenne » annonce dans un article du 30 août que la commissaire au numérique, Mariya Gabriel, « s’apprête à prendre une des premières mesures de son mandat : mettre sur pied un groupe d’experts sur les « fake news ». L’article précise que « certains États membres font pression pour que la Commission annonce ces nouvelles mesures sur les fausses nouvelles et les contenus illégaux en ligne ».
Bigre, on se demande quelle va être la traduction concrète de ces cogitations, qui amènent le journaliste Benjamin Masse-Stamberger à imaginer avec humour dans une tribune publiée le 7 septembre par Le Figaro une possible « norme B-684 donnant l’estampille aux « informations justes et recoupées », qui pourront dès lors être diffusées de manière libre et non faussée partout sur le Vieux Continent ».
Vulgarisation
La communication institutionnelle est souvent aride. Le site touteleurope.eu « propose une information pédagogique sur le fonctionnement et les politiques de l’Union européenne ainsi qu’un décryptage de l’actualité européenne dans toutes ses dimensions ». À l’appui, des fiches thématiques et des vidéos en ligne.
Politique migratoire européenne
Plus pérennes, les subventions de la commission européennes en matière de culture et de medias comptent un « prix medias ». Il a cette année récompensé 35 journalistes pour des reportages sur le thème de la migration. Le site de l’Union européenne indique que « ce prix est la première initiative financée par l’Union Européenne qui met en lumière les difficultés auxquelles sont confrontées les journalistes dans la production de reportages équilibrés sur la migration ». Le point commun des reportages primés : ils passent quasiment tous sous silence l’impact des migrations auprès des populations autochtones.
Il s’agit sans doute pour cette institution de contre-balancer « la disproportion entre la relation des sentiments des réfugiés (au détriment de ceux-ci, NDR) et de ceux de la population » dans les médias français, selon un rapport du Conseil de l’Europe réalisé par deux universitaires sur la « couverture médiatique de la crise des réfugiés ».
Sur le même thème, l’OJIM présentait il y a quelques mois le séminaire organisé par le Comité économique et social européen les 24 et 25 novembre 2016 à destination des « attachés de presse de la société civile » destiné à repérer les bonnes pratiques en matière de communication sur le sujet des migrants. Partant du constat que la faible acceptation par les citoyens de la politique migratoire européenne « ouverte » est due à une perception erronée, l’objectif était de la corriger grâce aux relais d’informations en contact avec les médias.
Gageons qu’à l’approche des élections européennes de 2019, la médiatisation d’initiatives populaires dans l’opinion publique, comme une plus grande taxation des GAFA (Google, Facebook, Apple et Amazon), le renforcement des contrôles contre le travail détaché, une meilleure protection commerciale de l’Europe, etc. ne faiblira pas.
- Source : Ojim