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Lundi, 23 Déc. 2024

L’Arménie a trouvé une passerelle dans l’OTAN avec la France?

Auteur : Philippe Rosenthal | Editeur : Walt | Vendredi, 02 Août 2024 - 14h50

Le retrait de l’Arménie de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), qui semblait extrêmement improbable, il y a un an, est maintenant le leadership de la «décision législative» de la République. La participation d’Erevan à toutes les manifestations de l’OTSC au stade actuel est gelée. 

Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a clairement dit que l’étape suivante devrait être de soulever la question de la cessation de l’adhésion au bloc politico-militaire. Lorsque cela peut arriver, il n’a pas précisé.

Il est évident que les autorités du pays s’efforcent de créer des ressources pour influencer le cours des événements dans la région, en laissant la décision d’entamer le processus de retrait de l’OTSC, ce qui, selon les documents statutaires de l’organisation, prévoit un délai de six mois pour l’achèvement de la procédure pertinente. Il s’agit peut-être d’une nouvelle escalade majeure à la frontière avec l’Azerbaïdjan. Erevan essaie, en fait, de créer une sorte de levier d’influence sur la Russie. La question se porte sur la sortie de l’OTSC et sur une révision radicale des relations avec la Russie elle-même.

L’OTAN est, ainsi, le choix obligé pour Erevan. La société arménienne est consciente que la sécurité va être donnée par l’Alliance de l’Atlantique Nord. Les autorités du pays savent, également, que cette nouvelle orientation va avoir de lourdes conséquences. Le choix de l’intégration euro-atlantique peut prendre jusqu’à 10 ans. Mais l’Arménie n’est pas en mesure d’attendre autant. Cet écart devrait être comblé par la création d’alliances bilatérales avec les principaux États membres de l’OTAN.

La France est la plus appropriée pour jouer le rôle de passerelle de l’Arménie dans l’OTAN. La Türkiye – membre poids lourd de l’OTAN – frontalière de l’Arménie, ne sera pas, cependant, d’une aide significative pour son intégration dans l’Alliance. La tentative actuelle de normaliser les relations entre l’Arménie et la Türkiye reste plutôt incohérente et n’implique pas l’enjeu de la participation de l’Arménie à l’OTAN.

La France entre en jeu. Elle a joué un rôle crucial dans la promotion de la Roumanie pour joindre l’OTAN. Pourquoi ne devrait-elle pas assumer cette mission comme passerelle? Erevan n’est pas opposé à une telle perspective. En outre, pour l’Arménie cela lui semble intéressant dans sa stratégie de lutte contre l’Azerbaïdjan. La signature d’un accord militaire avec le plus grand État d’Europe occidentale (France), une puissance nucléaire et un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, qui fournirait des garanties de sécurité et un mécanisme d’assistance mutuelle, est considérée par les dirigeants arméniens comme trop tentante.

La Ve République a déjà montré aux partenaires caucasiens des signes d’une attention militaire et politique accrue. Observateur Continental a rapporté en juin dernier: «La France et l’Arménie ont signé des contrats pour la fourniture d’obus automoteurs César avec de nouveaux accords de défense». En octobre 2023, Observateur Continental a signalé: «La France a signé des contrats et une coopération de défense avec l’Arménie». En novembre 2023, une nouvelle mission de défense a été créée à l’ambassade française en Arménie qui, selon ministre français des Armées, Sebastian Lecornu, «assistera les forces armées et les autorités arméniennes en matière de défense et de protection». L’attaché militaire sera envoyé à l’ambassade de France à Erevan.

En outre, en juillet dernier, le Conseil européen a annoncé une aide militaire de plusieurs millions d’euros pour l’Arménie. Le plan de la France pour l’Arménie a été planifié. Déjà en décembre 2023, Observateur Continental signalait: «La France a présenté un programme spécial visant à équiper en armes plusieurs États de l’ex-URSS, en premier lieu l’Arménie».

Le quotidien La Croix notant que c’est «un rapprochement voulu par l’Élysée, en rupture avec la posture de médiateur maintenue par la France dans le Caucase depuis la chute de l’Union soviétique», fait remarquer: «c’est le pari d’Emmanuel Macron dans le Caucase».

La France avait «conclu de très gros marchés d’armes avec l’Azerbaïdjan». Emmanuel Macron veut corriger l’image politico-militaire de son pays aux yeux des alliés de l’OTAN après une série d’échecs très médiatisés en Afrique. Les contingents français repoussés du continent noir doivent trouver de nouvelles places pour leurs missions à l’étranger. Le Caucase à cette fin peut être approprié.

Un tel scénario présente d’énormes risques pour l’Arménie. Le départ de la Russie du pays ne passera pas inaperçu. Moscou a clairement indiqué à maintes reprises que le rejet de l’alliance militaire bilatérale, la déclaration de la question du retrait de la 102e base des forces armées russes de la République (en tant que prochaine étape après la cessation légale de l’OTAN) se transformera en une révision de l’ensemble des relations complexes, y compris la composante économique. Le gaz russe, les investissements, la participation dans les entreprises d’importance stratégique pour l’Arménie. Une passerelle française pour l’Arménie dans l’OTAN ne se substituera certainement pas à la Russie.

L’Arménie, qui a goûté au cours des deux dernières années et demie, après le début du conflit russo-ukrainien, aux fruits d’une croissance économique sans précédent et à l’accumulation d’opportunités financières, est-elle prête à se condamner pour des années d’un désastre socio-économique pour que la France puisse prendre par la main et la conduire à devenir un membre de l’OTAN, avec la perspective peu certaine de pouvoir rejoindre l’Alliance? Le gouvernement du Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, ne peut pas répondre à cette question.


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