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Lettre perdante -- Jacques SAPIR

Auteur : Jacques SAPIR | Editeur : Walt | Mercredi, 29 Oct. 2014 - 17h01

Ainsi, François Hollande se refuse à publier la lettre envoyée par la Commission de Bruxelles sur le budget français. Le Premier Ministre italien, M. Renzi, n'a pas eu cette pudeur, et il en a profité pour attaquer de front la-dite Commission. On pourrait croire que c'est là une différence de style et, on le sait, le style c'est l'homme. Mais il y a quelque chose de plus dans ce comportement timide, et pour tout dire puéril, de notre Président.

La lettre révélatrice

Ce que cette lettre révèle, car de bonnes âmes, MEDIAPART pour les nommer, en ont publié le texte obtenu par des fuites venant soit de Bruxelles soit de Paris, c’est l’arrogance d’une Commission européenne. Mais, pourquoi donc cette dernière prendrait-elle des gants ? Après tout, c’est bien François Hollande qui signa le Traité sur la stabilité et la gouvernance, le TSCG, qui met la France sous la tutelle de Bruxelles, c’est à dire en fait de l’Allemagne. Ce que François Hollande redoute, tout comme un mauvais élève craint le courroux de ses parents et cherche à leur cacher une mauvaise note, c’est d’être confronté aux conséquences de ses actes. Ce traité, le fameux traité « Merkozy », négocié par Mme Merkel et Nicolas Sarkozy, organise la soumission institutionnelle de la France à un pouvoir étranger. Oh, bien sûr, il est aujourd’hui facile d’affirmer qu’il n’est pas question que Paris modifie son budget pour satisfaire tant Bruxelles que Berlin. Mais, le mal est fait. Soit nous nous plierons, de mauvaise grâce, à cette règle inique et nous l’entérinerons, soit nous allons au conflit ouvert tant avec Bruxelles qu’avec Berlin, qui a refusé les 50 milliards d’investissements quémandés, toute honte bue, par le triste duo Macron-Sapin.

Le comportement de François Hollande sur cette fameuse lettre est révélateur de l’échec de sa politique. Il est révélateur de son incapacité fondamentale à assumer les conséquences de ses actes et de ses politiques. Mais, de cela, nous nous en doutions un peu. Sa vie privée en porte constamment témoignage.

La lettre accusatrice

Il n’en reste pas moins que le problème est bien réel et ne disparaîtra pas parce que notre Président n’a pas le courage de l’affronter. Sa politique économique est un échec, ce que les chiffres du chômage, publiés ce vendredi 24 octobre, viennent nous rappeler. L’économie française est à l’arrêt et n’engendre plus les recettes fiscales escomptées, ce qui creuse encore plus le déficit. Au-delà, sa politique européenne est un champ de ruines. Il n’a su ni gagner l’amitié ni gagner le respect de ses partenaires. La France se trouve aujourd’hui sur une trajectoire de collision avec l’Allemagne, ce qu’il prétendait éviter, en raison même de la politique qu’il a menée, toute faite de demi-mesures et de gros mensonges. Si, devant l’insensibilité et l’obstination allemandes, le gouvernement français avait menacé de quitter l’Euro, peut-être aurions-nous été pris au sérieux. A tout le moins, une sortie de l’Euro aurait redonné à l’économie française les marges de manœuvres qui aujourd’hui lui font si dramatiquement défaut.

Si François Hollande n’a pas voulu révéler le contenu de cette lettre, c’est parce qu’il sait, au plus profond de lui, qu’elle le condamne. Elle le condamne par son existence même. Cette lettre n’aurait jamais dû pouvoir être écrite. Elle le condamne par son contenu, cette inquisition à laquelle est soumise la représentation nationale française. Elle le condamne enfin et ce qu’elle témoigne de l’inévitabilité d’un conflit qu’il n’a pas voulu admettre mais qui s’impose à lui. Comment ici ne pas penser aux mots terribles de Winston Churchill lors des accords de Munich : « nous avions le choix entre le déshonneur et la guerre ; nous avons choisis le déshonneur ; nous aurons la guerre ».

Une lettre volée ?

On se souvient peut-être de la nouvelle d’E. A. Poe, La lettre volée, qui met en scène un détective et un policier autour d’une lettre dérobée susceptible de provoquer un effroyable scandale. Toutes choses étant égales par ailleurs, comme adorent le dire les économistes, et le talent en moins, c’est à une variante de cette lettre volée que nous convie François Hollande en prétendant nous dérober son contenu. Mais, nul n’est besoin de le connaître précisément, de savoir si Bruxelles a mis une virgule ou un point d’exclamation.

Ce qu’il est impossible de dérober, c’est ce que cette lettre établit de manière fort claire : nous ne sommes plus un Etat souverain.

Cette lettre signe la honte de François Hollande, et celle-là il ne l’a pas volée…

 


- Source : Jacques SAPIR

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