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Thaïlande: Le peuple a parlé, aucune confiance dans le régime ou le système

Auteur : Tony Cartalucci | Editeur : Stanislas | Lundi, 10 Févr. 2014 - 19h19

Avec un régime et un système rendus illégitimes par un boycott largement suivi d’élections bidons, la Thaïlande doit trouver des alternatives pour se retrouver au-delà des urnes brisées.

Les élections de 2 février en Thaïlande ont produit le pire taux de participation de l’histoire du pays avec un humiliant 46% venant voter (NdT: Le vote étant obligatoire en Thaïlande, ceci est un acte massif de désobéissance civile !!…). De ce petit nombre, un grand nombre a choisi de défigurer leur bulletin ou d’émettre un bulletin “no vote” en protestion à la fois du processus et du régime les surpervisant.

Les élections étaient très controversives dans la mesure où tous les partis politiques d’opposition les avaient boycotté et que le seul parti politique d’importance au scrutin était ouvertement piloté par un criminel condamné et en fuite, Thaksin Shinawatra, actuellement planqué à l’étranger afin d’éviter une condamnation à deux ans de prison, de multiples mandats d’arrêt et une longue liste de casseroles judiciaires à ses basques.

Les élections furent organisées avec un lourd support de l’occident, et ce malgré l’illégitimité flagrante du processus et la nature du régime en place. Tandis que l’occident ne fait que dire qu’il “défend le processus démocratique”, un regard sur la relation entre le dictateur Shinawatra et les intérêts corporatistes financiers de Wall Street et de la City de Londres nous dit bien autre chose, et plus précisément l’histoire d’imposer sur la Thaïlande un régime proxy marionnette servant les intérêts de l’occident et non pas ceux des Thaïlandais.

Du taux de participation, Thai PBS rapporta dans son article, "EC says latest voter turnout is 46.79%," que:

La Commission électorale (CE) a publié aujourd’hui le dernier taux de participation en date pour les élections de 2 février courant, celui-ci fut de 46,79%, avec un pourcentage de bulletin “vote no” de 16,57%.

Le taux de participation fut calculé sur 68 provinces, excluant 9 provinces où les élections ne purent avoir lieu et quelques circonscriptions de Rayong et Bangkok.

Des 68 provinces où les élections eurent lieu, la CE a dit qu’il y avait un total de 43 024 042 électeurs éligibles, que de ceux là 20 129 976 ou 46,79% ont voté. De tous les votes enregistrés, 71,38% étaient valides et 12,05% nuls.

Elle a dit que des votes valides, 16,57% des électeurs ont voté non et avec un si grand nombre décidant de gribouiller leur bulletin ou choisissant l’option “no vote”, le régime Shinawatra a clairement perdu des millions de voix depuis 2011. Il doit être noté que le pourcentage de participation est déterminé sur une étude des bureaux de vote non perturbés par des manifestations, bien que les zones où l’élection fut perturbée sont attendues de produire des résultats moins favorables au régime en place si et quand l’élection se déroula.

Il est clair que le régime a perdu la confiance et le soutien de la vaste majorité de la population thaïlandaise et se retrouve maintenant sans mandat pour gouverner le pays. De plus, les Thaïlandais apparaissent avoir perdu confiance dans le soi-disant “processus démocratique” que le régime a détourné afin de créer l’illusion de son mandat et de sa légitimité.

Malgré cela, les souteneurs occidentaux du régime continuent de promouvoir le mythe que parce que des “élections” ont eu lieu, quelque soit le gouvernement formé à l’issue, il possèdera une légitimité inquestionable. Avec cette “légitimité”, Thaksin Shinawatra et son parti politique tentent d’arrêter l’opposition qui clairement commanda la majorité de l’opinion thaïlandaise en ce 2 février. Dans l’article du Bangkok Post: , "Arrest warrants for PDRC leaders, CMPO to suspend transactions," il est rapporté:

Mercredi la cour criminelle a approuvé la demande du Department of Special Investigation (DSI) pour la diffusion de mandats d’arrêt pour 19 membres importants du People’s Democratic Reform Comittee (PDRC) pour des violations présumées de décret d’urgence.

Pour renforcer la posture dictatoriale du régime, il doit ici être noté que le décret d’urgence fut annoncé en réponse à une campagne de terreur que le régime a lui-même mis en place contre l’opposition. Ceci incluait des fusillades quasi-quotidiennes noctures dans des sites de manifestations ainsi qu’aux domiciles des leaders de l’opposition, ainsi que des attaques à la grenade en plein jour qui ont fait un mort et beaucoup de mutilés.

Tandis que le régime et l’occident vont continuer à cadrer les élections en tant que nouveau mandat pour l’administration illégale de la Thaïlande par Thaksin Shinawatra et de présenter l’opposition comme s’opposant de manière ostentatoire à la volonté de la “majorité” rurale, la réalité est que la majorité rurale a rejoint l’opposition le 2 février en boycottant le scrutin et est littéralement en train de rejoindre les manifestants à Bangkok en réponse à l’escroquerie du plan d’achat du riz (contre votes) mis en place par le système.

En attente de l’inévitable

L’illusion de la popularité de Thaksin Shinawatra a été pulvérisée et les barrières de la peur imposées au peuple thaïlandais par ses sbires “chemises rouges” se sont totalement effondrées. Son régime a éviscéré l’industrie de la production du riz en Thaïlande, faussé l’économie, secoué la confiance à la fois intra muros et à l’étranger et est toujours en attente des retombées des autres opérations d’achats de votes qui ne vont pas tarder à s’effondrer aussi.

Ce que les manifestants n’ont pas été capables de faire eux-mêmes, le régime va le faire dans les étapes finales de s’agripper au pouvoir.

Quoi qu’il en soit, les gens ne doivent pas attendre pour ramasser les morceaux du régime corrompu, des ministères incompétents sont laissés à l’abandon après une décennie de pouvoir. Bien qu’un nouveau gouvernement va remplacer le régime Shinawatra, les leçons de la dernière décennie devraient informer le peuple thaïlandais que les réponses et les solutions ne sont pas et ne viendront pas des urnes, mais de ses propres mains. Alors que le système éducatif, l’industrie agricole, le système bancaire et l’infrastructure thaïlandais ne peuvent pas être facilement remplacés, ils peuvent être améliorés par l’activisme local, des institutions locales ainsi qu’une collaboration locale afin de palier aux manques qui pourraient ou ne pourraient jamais être solutionnés de manière adéquate.

Les manifestants qui se sont réunis et se sont organisés pour se rendre aux manifestations de masse, soutenant les médias alternatifs dans leurs efforts de contrer le régime et ses souteneurs occidentaux et leur propagande, qui ont été volontaires aux manifestations, peuvent commencer à étendre leurs activités vers des solutions tangibles et explicites, des principes spécifiques de réforme.

Tout commence avec une véritable éducation et se termine par un véritable activisme

L’escroquerie de la “tablette PC gratuite” du gouvernement a été une très mauvaise idée, même si cela fut appliqué de manière efficace. Le problème du système éducatif thaïlandais n’a jamais été un manque d’ordinateur, mais un manque de ressources pour faire coïncider des professeurs qualifiés avec un curriculum pratique dans des classes de taille appropriée.

Une vraie solution pourrait-être une version thaïlandaise de OpenCourseWare où le programme est disponible gratuitement sur internet dans un système de stockage centralisé incluant à la fois des manuels de cours en .pdf gratuits, des cours sous format vidéo sur YouTube, en parallèle avec des ressources pédagogiques pour aider les éducateurs et les éducateurs potentiels à appliquer le curriculum aux élèves. Ceci peut-être effectué en parallèle avec le système éducatif existant et offert dans des programmes après les heures régulières d’école. Ceci peut-être lucratif et bénéficiaire pour à la fois les éducateurs et les élèves dans leurs villages ou districts.

Des concepts comme "hackerspaces" et "DIYbio labs"  peuvent donner aux lycéens et étudiants une pratique directe et l’expérience pour augmenter leurs niveaux théoriques depuis leurs salles de classes. Ces institutions locales peuvent aussi servir de base de départ SME, alors que les ressources technologiques et humaines qu’ils peuvent collecter pourront être appliquées directement aux problèmes locaux par les citoyens locaux eux-mêmes (voir "How to Start a Hackerspace")

Ceci peut impliquer des choses pour améliorer ou augmenter l’infrastructure informatique locale, développer des technologies bon marché et faciles à reproduire afin d’assister les agriculteurs à la fois à améliorer leur efficacité mais aussi à diversifier leurs activités économiques. Des institutions locales comme hackerspace qui combinent éducation, recherche technologique et développement ainsi qu’un endroit de réunion pour se rencontrer et s’organiser au sujet d’un vaste catalogue de buts pragmatiques, peuvent aussi servir de nexus pour la réponse à une urgence, un autre domaine où le régime a lamentablement échoué.

Un exemple de mouvement politique qui a tourné pragmatique fut Occupy Wall Street, qui face à l’ouragan Sandy devint “Occupy Sandy”. Il tourna son réseau politique vers les réseaux d’aide au désastre et illustra sa lutte politique contre Wall Street et le régime par procuration qu’il contrôle à Washington et que ceci put être dépassé par sa réponse pragmatique au lamentable échec du régime face à l’adversité de la catastrophe naturelle.

Le mouvement Occupy Sandy a prouvé que l’échec du gouvernement américain n’était pas avéré parce que les évènements étaient insurmontalbes, mais simplement parce que le gouvernement n’en avait rien à cirer. La leçon à tirer est que seuls les gens se préoccupent de qui se préoccupent de nous, de nous-mêmes, nos amis, nos familles et notre communauté. Pour résoudre nos propres problèmes, nous devons trouver des solutions au sein de nous-mêmes (NdT: et arrêter de croire à la niaiserie de “l’état providence”, qui nous prouve jour après jour, qu’il n’est qu’un outil de maintien des privilèges de l’oligarchie en place…). La campagne "Occupy Bangkok" campaign” peut très facilement être changée tout comme Occupy Wall Street le fut à New York, pour commencer à évaluer le grand nombre de problèmes laissés par le régime Shinawatra au travers de moyens pragmatiques. Avant que le régime ne s’effondre et pendant que les gens sont toujours en “mode activiste”, des groupes peuvent commencer à se former autour d’une simple table avec des cahiers ou des ordinateurs et commencer à partager la connaissance et explorer des modèles qui pourront être à la fois profitables monétairement mais aussi en termes sociaux. Ceci pourrait inclure:

Hackerspaces:

Un espace, peut-être un magasin/dépôt, avec des tables pour les gens afin de se réunir et collaborer sur des projets pratiques comme l’informatique, la robotique, l’électronqiue, la fabrication, l’ébénisterie, etc… La plupart des hackerspaces se financent eux-mêmes au travers d’une combinaison de cotisations mensuelles de leurs membres et au travers des classes organisées pour enseigner des techniques, un savoir-faire ou discuter des concepts. L’espace est très flexible et peut même être utilisé pour des réunions locales, pour de l’aide aux élèves après l’école et des évènements sociaux.

Marchés fermiers:

Avec cette désastreuse escroquerie sur l’achat du riz en avance et son effondrement en un fracas de corruption, de scandale et de banqueroute, les agriculteurs de la nation sont sans rien avec une industrie du riz dévastée. Si ces fermiers possédaient le savoir-faire pour produire des fruits et légumes bio, de la viande et si les communautés urbaines à la fois dans les villes provinciales et Bangkok, créaient un marché pour eux, ceci pourrait offrir une bonne source de revenus additionnels tout en retranchant l’agriculture dans un créneau plus sain sur l’ensemble de la nation.

Par exemple, des marchés (poinrts de vente) agricoles bio pourraient être crées dans différents endroits de Bangkok, qui feraient la promotion indépendemment ou coopérativement de leurs facilités, de leurs heures d’ouverture et des agriculteurs avec qui ils travaillent (NdT: en cela très similaire aux AMAP françaises…). Des visites aux fermes qui produisent la nourriture pourraient  faire partie d’une nouvelle économie, avec de nouveaux organes médiatiques écrivant au sujet des bénéfices d’une alimentation saine, véhiculée par une agriculture bio contre l’industrie agro-alimentaire chimique et génétique.

Un secteur d’activité du peuple, pour le peuple et par le peuple est la seule façon de parvenir à une véritable redistribution de la “richesse”, sensée et durable. La technologie et les ressources existent déjà pour en faire une réalité (NdT: partout ! La Thaïlande n’est qu’un exemple dont on parle ici, il suffit d’adapter aux conditions différentes selon les endroits…), une réalité qui se développe déjà parmi les Américains déçus et qui cherchent une sortie des monopoles financiers et corporatistes des entreprises du Fortune 500. Les barrières légales et régulatrices que ces monopoles utilisent pour minimiser l’exode de consommateurs chez les producteurs n’existent pas en Thaïlande.

Pour les Thaïlandais, la seule barrière pourrait être un manque de compréhension de ce que la solution est juste là devant notre nez. La comprendre, quoi qu’il en soit, nous permet de prendre le momentum actuel de la vague politique contre Thaksin Shinawatra et le régime systémique corrompu qu’il représente, à la fois en Thaïlande et mondialement (NdT: N’oublions pas que Thaksin est directement piloté depuis le CFR de New York… Il y donnait du reste une conférence lorsqu’il fut déposé en 2006, superbe ironie s’il en est…) et de le tourner en un mouvement pragmatique et durable qui nous permettrait finalement de tenir les promesses perpétuellement faites et brisées par les politiciens ne répondant toujours qu’à leurs intérêts particuliers.


- Source : Tony Cartalucci

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