Double SOS ! Réponse des socialistes aux Syriens de France
Personnellement, la fort triste histoire du scrutin syrien en France me rappelle l’observation de François Hollande quant au déroulement du référendum criméen qu’il qualifia de «nul et non avenu».
C’est vrai qu’avec une côte de popularité aussi fracassante que celle du chef d’Etat français, ce genre de réflexion est tout à fait de mise. L’hôpital ne se moque même plus de la charité car de l’hôpital, il ne reste plus que des ruines battues par les vents de la déroute. Nous sommes au-delà du bon sens, au-delà du Droit le plus élémentaire, l’Intérieur s’étant évertuée à annuler la tenue des élections syriennes sur son territoire parce que SELON LUI la Syrie, un pays souverain, ne devrait pas s’opposer à la mise en place d’un gouvernement de transition.
Nous sommes dans une logique qui peut sembler schizophrénique même si, en réalité, elle avoisine plutôt l’endoctrinement vicieux du bolchevisme. Le principe est simple : toute élection dont le résultat déplairait aux lobbies influents est considérée comme «nul et non avenue». L’Occident savait ainsi que Porochenko, faute d’alternative raisonnable, serait élu. Et il l’a en effet été au premier tour. Qu’ont donc fait Washington et ses satellites ? Non seulement ils ont donné feu vert à des élections assez contestables l’Est n’ayant presque pas voté, mais en plus ils prévinrent la Russie qu’elle serait tenue pour seule responsable de l’éventuelle annulation de ces dernières. Or, si la Russie avait agi dans l’esprit de la France, de l’Allemagne, de la Belgique et des USA qui interdirent aux Syriens résidents de se prononcer par les urnes, elle aurait dû interdire (comme minimum) aux Ukrainiens installés sur son territoire de voter dans leurs ambassades.
Comme il est clair que Bachar el-Assad sera réélu à une écrasante majorité, il s’agit d’installer un gouvernement de transition dont on sait pertinemment qu’il sera constitué d’éléments radicaux promoteurs de la Charia - on dira ensuite avoir mal calculé les conséquences comme on le dit aujourd’hui pour la Libye - il s’agit également d’inventer de toute pièces «des rebelles syriens modérés» (SIC !) comme l’a angéliquement signifié Barack Obama, une opposition qui viendrait «libérer» le pays d’un «tyran» massivement soutenu par ce même pays. On croirait rêver. Hélas, c’est la réalité. Le politique l’ayant largement emporté sur le droit, le référé d’urgence envoyé par 19 Syriens de France aux autorités compétentes a été rejeté au seul motif que la France ne voulait pas d’el-Assad au pouvoir. Et el-Assad alors, veut-il de Hollande en France ? Sans commentaires.
Mme Khoury est l’une de ces 19 Syriens qui aiment leur pays et ont courage de militer autant que cela puisse se faire dans un pays que M. Hollande a osé qualifier, dans un communiqué alarmiste ayant suivi les Européennes, de «pays de la liberté». Oui, la France est un pays de liberté. Mais pas la France de Hollande. Pas la France de BHL. Pas la France de Fabius.
La Voix de la Russie. «Le référé que vous avez envoyé le 23 mai avec 18 autres Syriens par l’intermédiaire de Me Damien Viguier a été rejeté par le juge des référés, Me Bernard Stirn. Il a déclaré la juridiction administrative incompétente concernant une décision non détachable des relations internationales de la France. Manifestement, l’une des raisons évoquées, c’était la volonté de se voir mettre en place un gouvernement de transition en Syrie ce qui nous pousse poser une question bien simple : qui va désigner les membres de ce gouvernement ? La France ? L’Allemagne ? Les monarchies du Golfe ? Je ne sais vraiment plus sur quel pied danser. Et vous ?
Mme Khoury. Je vais répondre en deux temps si vous le permettez. En premier lieu, j’évoquerai l’interdiction du vote syrien sur le territoire français et la réponse du juge des référés. Ce dernier a rejeté les 19 requêtes qui ont été déposées le 23 mai parce que le délai était très court et les élections devaient avoir lieu pour les Syriens résidant à l’étranger le 28 mai. Ladite décision est d’ordre à la fois juridique et politique. La portée politique a été explicitement mentionnée dans la réponse du juge des référés et s’appuyait sur le constat de son incompétence à annuler une décision découlant de la politique internationale menée par la France. Celle-ci insiste sur la mise en place d’un gouvernement de transition doté des pleins pouvoirs. Qu’est-ce que cela signifie en pratique ? Je l’ignore.
L’opposition syrienne est une opposition qui n’est ni connue ni reconnue par l’ensemble du peuple syrien. A l’œuvre depuis voilà trois ans, on la voit à présent s’entretuer. On ne sait plus qui la préside. Tous les trois mois en moyenne on a des nouvelles de ses sempiternels différends sans avoir une représentation ne serait-ce que vague de sa véritable identité. Pourquoi ? Primo, parce que ses membres ont été désignés par l’Occident selon des critères qui nous échappent. Secundo, ils n’ont aucun programme politique parce que, s’ils en avaient un, ils l’auraient fait connaitre en se présentant aux présidentielles. Il y a aujourd’hui trois candidats dont deux issus de l’opposition interne qui n’est pas celle que met en avant, après l’avoir fabriquée, l’Occident. Cette opposition est à l’heure actuelle mal en point. Initialement, il y a trois ans, elle était soutenue par 130 pays. Aujourd’hui, il n’y a plus que 11 pays pour la soutenir et l’aider aussi bien financièrement que militairement. Je rappelle que cette opposition promeut le fondamentalisme islamique dont la Charia est le code de référence. Cela explique pourquoi elle est rejetée par environ 80% des Syriens, qu’elle soit sur place ou à l’étranger. Je ne sais donc pas comment est-ce que la France et d’autres pays de l’UE entendent installer ce gouvernement de transition et notamment en vertu de quel type de Droit vont-ils le faire le peuple syrien étant un peuple souverain. Qui donc accordera un mandat à cette opposition ? Certainement pas l’Etat syrien. Certainement pas la communauté internationale qui n’en a nullement le droit.
Je voudrais revenir maintenant sur la décision du juge. Elle donne quand même une ouverture parce qu’elle ne reprend qu’un seul point qui est de nature administrative. Elle rejette la requête sur la décision de la France à un niveau politique mais elle ne la rejette pas au niveau de son ancrage juridique. Ce point-là n’est pas évoqué par le juge et donc, formellement, il n’existe pas n’ayant pas de fondement juridique.
La VdlR. Justement, le deuxième motif mentionné s’appuie sur une lecture partiale de la Convention de Vienne cette dernière autorisant l’Etat – même si le conditionnel serait ici de mise – en des cas de force majeure à s’opposer à la tenue d’élections étrangères sur son sol. Néanmoins, quand bien même la Convention de Vienne prévoirait ce genre d’interdit, elle autorise bien sûr les parties intéressées à faire appel auprès d’instances juridictionnelles compétentes. Avez-vous l’intention de saisir ce droit ou alors, concernant les présidentielles syriennes à l’étranger, c’est partie perdue et il n’y a plus aucune chance d’ici le 3 juin ?
Mme Khoury. Il se pourrait qu’une date soit fixée avant le 3 juin pour les personnes qui avaient été interdites d’élection dans certains Etats tels que la France, l’Allemagne et la Belgique. La Cour européenne des droits de l’homme pourra rapidement statuer sur ce point. On verra à ce moment-là si elle tiendra compte de l’avis exprimé par le Conseil d’Etat ou si elle statuera par elle-même, d’une manière indépendante.
La VdlR. Les élections vont se tenir le 3 juin. Il est tout à fait évident que Bachar el- Assad sera réélu à une franche majorité. Comment voyez-vous la suite des évènements ? Assisterons-nous à une exacerbation des tensions en Syrie ?
Mme Khoury. Il y a une partie de l’opposition qui commence déjà à se rendre. Nous relevons des mouvements de réconciliation dans certains endroits de la Syrie. L’avancée de l’armée syrienne permet non seulement de regagner du terrain mais aussi de faire revenir la paix dans certaines régions où on voit certains acteurs du conflit opter pour la réconciliation. Cela n’empêche pas les franges radicales pour la plupart non-syriennes – 83 nationalités combattent actuellement sur le territoire syrien dont nos compatriotes français partis faire le djihad – aidées par la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Qatar de sombrer dans la folie. Déjà que leur attitude est pour le peu bestiale, leur cruauté vis-à-vis de leurs victimes inqualifiable, je n’ose même pas supposer quelle sera leur réaction à la réélection d’el-Assad. Néanmoins, l’avancée de l’armée syrienne sur le territoire peut aussi contribuer à une stabilisation de longue durée qui permettra aux Syriens installés à l’étranger de revenir chez eux et de retrouve cette paix sociale dans laquelle ils vivaient jusqu’au début du carnage il y a trois ans».
- Source : Françoise Compoint