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La demande d'un état national « juif » : une chimère de Netanyahou !

Auteur : Info Palestine | Editeur : Stanislas | Samedi, 15 Févr. 2014 - 20h14

Qu’est-ce qui cloche avec cette demande aux leaders palestiniens de reconnaître « l’Etat National du Peuple Juif » ? En fait, pratiquement tout ! Les Etats se reconnaissent l’un l’autre. Ils n’ont pas à reconnaître le caractère idéologique d’un autre état. Un état est une réalité. Quant aux idéologies, elles appartiennent au domaine de l’abstrait. Quand les Etats-Unis ont reconnu l’Union Soviétique en 1933, ils ont reconnu l’état. Ils n’ont pas reconnu sa nature communiste.

Quand l’OLP a reconnu l’Etat d’Israël dans l’Accord d’Oslo et dans les lettres échangées avant l’Accord, on ne lui a pas demandé de reconnaître son idéologie sioniste. Lorsqu’en retour Israël a reconnu l’OLP en tant que représentant le peuple palestinien, il n’a pas reconnu une idéologie palestinienne particulière, séculière ou religieuse.

Certains Israéliens (notamment moi-même) aimeraient changer l’auto-définition d’Israël comme « état juif et démocratique », en omettant le terme « juif ». Certains autres Israéliens aimeraient omettre ou bannir le mot « démocratique ». Aucun de nous ne croit que nous ayons besoin pour ce faire des Palestiniens. Cela ne les regarde pas.

L’ultimatum de Netanyahou

Je ne sais pas quelle est l’intention véritable de Netanyahou quand il présente sa demande sous forme d’ultimatum.

L’explication la plus flatteuse pour son ego est qu’il s’agit juste d’une autre ficelle pour saboter le « processus de paix » avant qu’on en arrive à la demande d’évacuer les colonies israéliennes dans les territoires palestiniens.

L’explication la moins flatteuse est qu’il y croit vraiment, qu’il est mû par quelque complexe d’infériorité profondément enraciné qui a besoin d’une assurance de « légitimité » extérieure. Reconnaître « l’Etat national du peuple juif » signifie accepter toute l’histoire sioniste, tout le baratin de A à Z, depuis la promesse divine faite à Abraham jusqu’au jour d’aujourd’hui.

Quand John Kerry envisage d’inclure cette demande dans son accord-cadre, il ferait bien d’y réfléchir à deux fois.

Dans quelle position cela mettrait-il son émissaire spécial, Martin Indyk ?
M. Indyk est un juif, portant un nom yiddish (« indyk » veut dire dindon). Si Israël est l’état de la nation et/ou du peuple juif dans son entier, alors il y est inclus, bon gré mal gré. L’état d’Israël le représente, lui aussi. Dans ce cas, comment pourrait-il faire office « d’honnête courtier » entre les deux parties en conflit ?

Et quid des millions de juifs étatsuniens, alors que le conflit entre les USA et Israël s’approfondit ? De quel côté sont-ils ? Sont-ils tous des Jonathan Pollard ? (*)

Les voix indépendantes qui commencent à se faire entendre aux Etats-Unis vis-à-vis d’Israël poussent l’extrême droite israélienne à imaginer de plus en plus de solutions absurdes.

Des colons juifs citoyens palestiniens

Le dernier exemple en date est cette brillante idée de Netanyahou : pourquoi ne pas laisser les colons israéliens où ils sont, comme citoyens palestiniens. Cela paraît éminemment équitable à beaucoup de gens sensés, dans la meilleure tradition anglo-saxonne.

L’état israélien a maintenant 1,6 millions de citoyens arabes palestiniens. Pourquoi l’Etat de Palestine, qui inclut Jérusalem-Est, n’inclurait-il pas 0,6 million de citoyens juifs israéliens ?

En Israël, les arabes bénéficient – du moins en théorie – de tous les droits légaux. Ils votent pour la Knesset. Ils sont soumis à la loi. Pourquoi ces Israéliens ne jouiraient-ils pas de tous les droits légaux en Palestine, votant pour le Majlis [Parlement palestinien] et soumis à la loi ?

Les gens adorent la symétrie. La symétrie rend la vie plus simple. Elle élimine les complexités. (Quand j’étais une recrue de l’armée, on m’a enseigné à me méfier de la symétrie. La symétrie est rare dans la nature. On m’a dit : si vous voyez des arbres équidistants, ce n’est pas une forêt, ce sont des soldats ennemis camouflés).

Une symétrie fallacieuse.

Les citoyens arabes israéliens vivent sur leur propre terre. Leurs aïeux y ont vécu depuis au moins 1.400 ans peut-être bien 5.000 ans. Cette semaine, Saeb Erekat s’est exclamé que sa famille vit à Jéricho depuis 10.000 ans, alors que son homologue, Tzipi Livni, est la fille d’un immigrant.
Les colons dans les TPO sont très majoritairement de nouveaux immigrés, eux aussi. Ils ne se trouvent pas sur la terre de leurs aïeux, mais sur des terres palestiniennes expropriées par la force – qu’elles aient été « privées » ou « domaine d’état ». Ces terres dites « réserve d’Etat » étaient à l’époque ottomane [jusqu’en 1922] les terres communales des villages, enregistrées au nom du Sultan, et plus tard, au nom des autorités britanniques ou jordaniennes. Quand Israël a conquis la région, il a accaparé ces terres comme si elles lui appartenaient.

Mais l’essentiel est ailleurs : il concerne le caractère des colons eux-mêmes.

Le noyau dur des colons, précisément ceux qui vivent dans les petites implantations « isolées », dans des zones qui feront de toute façon partie de l’état palestinien, sont des fanatiques religieux et nationalistes.

S’ils ont renoncé à leurs confortables maisons en Israël pour aller dans les collines rocheuses désolées de « Judée et Samarie », c’est par idéalisme pur et dur. C’était pour revendiquer ces zones pour Israël, pour accomplir leur interprétation du commandement de dieu et rendre impossible à jamais tout état palestinien.

L’idée que ces gens deviennent des citoyens respectueux de la loi dans ce même état palestinien est grotesque. La plupart d’entre eux haïssent tous les arabes, y compris les ouvriers qui travaillent pour eux sans bénéficier ni du salaire minimum ni des droits sociaux, et ils ne se gênent pas pour le dire à la moindre occasion. Ils soutiennent les bandes du « Prix à payer » qui terrorisent leurs voisins arabes, ou du moins ne se prononcent pas contre elles. Ils obéissent à leurs rabbins fanatiques qui disputent entre eux s’il est juste de tuer des enfants non-juifs, lesquels, une fois grands, pourraient tuer des juifs … Ils projettent de construire le Troisième Temple, après avoir fait sauter les sanctuaires musulmans.

Les imaginer en citoyens palestiniens est le comble du ridicule.

Les colonies sont constituées de demeures luxueuses

Bien sûr, tous les colons ne sont pas comme ça. Certains sont très différents.
Cette semaine, une chaîne de télévision israélienne a présenté une série sur la situation économique des colons. De quoi ouvrir de grands yeux.

Les pionniers idéologiques vivant dans des tentes et des cabanes en bois ont disparu depuis longtemps. De nos jours les colonies sont constituées de demeures luxueuses, chacune avec piscine, chevaux et vergers – choses dont 99 % des Israéliens ne peuvent même pas rêver. Comme la plupart d’entre eux sont arrivés dans les « territoires » sans un shekel en poche, il est clair que tous ces palaces ont été construits avec l’argent de nos impôts – des sommes énormes étant transférées chaque année à cette entreprise.

Les ensembles d’implantations urbaines près de la Ligne Verte appelés « blocs de colonies » sont un autre problème. Ils vont probablement être annexés à Israël dans le contexte d’un « échange de territoires ». Mais deux d’entre eux au moins soulèvent de graves questions : Ariel, qui se trouve à quelque 25 km à l’intérieur de l’état israélien putatif et Maaleh Adumim, qui coupe pratiquement en deux la Cisjordanie. Incorporer ces deux grandes villes avec leurs habitants dans l’état souverain de Palestine est chimérique.

Quand Netanyahou promettait ces jours-ci de ne pas déraciner un seul colon ni de démanteler une seule colonie, il pensait sans doute à Charles de Gaulle, qui lui non plus n’a pas évacué de colons ni déraciné de colonies. Il a juste fixé la date à laquelle l’armée française quitterait l’Algérie.

Cela suffisait.

(*) Emprisonné aux Etats-Unis pour espionnage au profit d’Israël.
* Uri Avnery, né en 1923, est un écrivain israélien militant pour les droits des Palestiniens et pacifiste convaincu, fondateur de Gush Shalom (Le Bloc de la Paix). Il appartient à la gauche radicale israélienne et se définit comme post-sioniste. Il a contribué au livre de CounterPunch : The Politics of Anti-Semitism.
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- Source : Info Palestine

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