Pour priver les Etats d’Europe de la possibilité, même théorique, de sortir de la nouvelle structure centralisée, Bruxelles détruit leur souveraineté non seulement par leur haut, par le durcissement de la discipline budgétaire et le transfert des politiques économiques vers la Commission européenne, mais aussi par le bas, via la « régionalisation », qui empêche les pays européens d’influer sur la politique des autorités locales et régionales. Sous le couvert du développement de l’autonomie locale, l’UE détruit les administrations centrales des Etats de l’Union. Serait-il possible d’empêcher la région de rendre son pouvoir au centre, si cela était nécessaire ? Les dirigeants européens ont pris en compte cette possibilité ; et pour détruire complètement les Etats nationaux, ils ont lancé un programme visant à créer les Eurorégions.
Contrairement aux régions classiques, aux comtés ou aux districts, les Eurorégions sont des structures composées de zones issues de différents pays. Elles auront leurs propres programmes de développement et un niveau important d’autonomie par rapport aux gouvernements nationaux.
Parmi les politiciens européens, il est rare d’en trouver un ayant suffisamment de courage et de volonté pour s’opposer à la destruction de fait de la souveraineté des pays européens. En France, c’est le parti d’extrême droite dirigé par Marine Le Pen qui lutte pour la préservation de la souveraineté et de l’identité nationale. Au Royaume-Uni, les projets de l’UE sont combattus à la fois le parti d’opposition, le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP), mais aussi par les membres du gouvernement. Eric Pickles, Secrétaire d’État aux Communautés et à l’Administration locale, a accusé l’Union européenne de vouloir « rayer l’Angleterre de la carte » et a promis de résister pleinement au diktat de Bruxelles.
Parmi les pays d’Europe orientale, seule la Hongrie tente de résister au processus de destruction de la souveraineté et de dissolution de l’identité nationale. Même si l’UE fait régulièrement miroiter à Budapest « un avenir radieux » via la perspective théorique de création de régions ethniques hongroises dans les pays voisins, le pouvoir hongrois ne se presse pas de soutenir les initiatives de fédéralisation de l’Union européenne. Les hommes politiques hongrois ne sont sans doute pas assez naïfs pour croire que Bruxelles attend le moment opportun pour annuler le traité de Trianon de 1920 et rétablir la « Grande Hongrie », et comprennent que seul le gouvernement européen central coordonne le morcellement des pays en en petites régions. Après la conclusion du Traité de Trianon, la Hongrie a perdu les deux tiers de son territoire et le tiers de sa population, mais elle a préservé son Etat. Si les projets des « Fédéralistes Européens » se réalisent, la Hongrie, comme les autres pays européens, n’existeront plus. Ils cesseront d’être des sujets du droit international. C’est apparemment l’hypothèse d’une telle perspective qui conduit le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, à refuser de coopérer avec le FMI, à subir les sanctions économiques de Bruxelles, et à chercher des alliés géopolitiques en dehors de l’Union européenne.
En novembre 2012, Angela Merkel a déclaré qu’« un jour la Commission européenne deviendrait un gouvernement, et le Parlement européen un parlement. » On paraît se rapprocher de plus en plus d’un tel scénario, et l’UE ressemble de plus en plus à un piège pour les Etats, séduits par les promesses de bien-être européen. Quels pays réussiront à s’échapper à temps, et quels pays disparaîtront de la carte du monde, aspirés par un Etat européen unique, l’avenir nous le dira bientôt.